Une lecture de LEO LAMARCHEDerrière ce titre un peu étrange se cache une histoire poignante, celle d’Ijaz, 15 ans. Il est soldat, enrôlé de force dans une guerre qu’il ne comprend pas. Il a tué, il n’avait pas le choix. Il ne lui reste plus que de vagues souvenirs de son enfance, la guerre a fait table rase du passé. Il n’arrive même plus à parler. Un soir, lors de l’attaque d’un village, on lui en demande trop et Ijaz craque. Il déserte, portant sur ses épaules la femme qu’on lui avait ordonné de violer. Ils vont vers les montagnes, la marche est longue et douloureuse, jusqu’à un camp fortifié transformé en dispensaire. Les lieux sont habités par une communauté de femmes et on veut le chasser, car les hommes sont dangereux, ils ne savent que se battre, ils représentent le Mal. Mais Ijaz est à bout, épuisé et malade. On tolère alors sa présence et l’adolescent traumatisé va tenter de se reconstruire. Il va réapprendre à parler, à faire autre chose de ses mains que tenir un fusil, à venir en aide aux autres. Il le fait, d’abord, en haine de lui-même, pour se punir d’être aussi vide, mais la fin du conflit, qui survient, va peut-être lui donner une raison d’espérer… Ce beau roman noir, fort et sensible, glisse sur les atrocités évoquées d’une plume allusive et – osons le dire – poétique. Cet itinéraire d’un enfant-soldat survivant laisse lire, entre les lignes, que la guerre est un crime sans nom. L’écriture de ce texte est tellement maîtrisée qu’il plaira aussi bien aux adolescents qu’aux adultes.
Récolte la tempête, de Jean-Albert Mazaud, éd. Milan, coll. « Macadam », 120 pages, 9, 90 euros. À partir de 14 ans et pour tous.
LEO LAMARCHE |
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