Une lecture de PAUL MAUGENDRECape Town en Afrique du sud, le pays où l’apartheid a été théoriquement banni. C’est dans cette ville que Caryl Ferey nous propose d’effectuer un petit voyage en compagnie d’Alice, bientôt quinze ans, et vérifier si la ségrégation économique et raciale est toujours de mise. La mère d’Alice, géographe de formation et éthologue, c'est-à-dire qu’elle observe les comportements des espèces animales dans leur milieu naturel afin de les comparer à ceux des humains, est toujours par monts et par vaux. Et Alice, en proie à un cauchemar récurrent, est élevée par son père. Aussi lorsque l’éthologue, coincée au Cap par des circonstances indépendantes de sa bonne volonté, leur propose de venir la rejoindre, c’est la meilleure des nouvelles qu’ils ont reçue depuis des mois. Avec Montgomery, son collègue océanographe, elle avait projeté de créer un parc naturel marin ayant pour but la protection des requins blancs, une espèce en voie de disparition. Malheureusement, Montgomery a été attaqué par l’un des deniers représentants vivant dans la baie de Gordon, un squale non bagué, ce qui est préjudiciable dans leur entreprise. Montgomery est blessé, et a eu la chance de ne perdre aucun membre, mais une enquête policière est en cours. Alice peut à loisir s’intéresser au paysage, aux agissements de leur voisin, propriétaire d’un hôtel de grand standing, Le Beach Palace. Et ce qu’elle aperçoit ne le rend pas franchement sympathique. Il se rend coupable d’agissements racistes envers une gamine vivant dans l’un des bidonvilles de la ville, le township de Khayelitsha. Deux hommes portant une bâche qu’ils ont prise dans le coffre d’un 4X4 s’entretiennent avec l’hôtelier et dans l’imagination d’Alice aussitôt s’élabore l’idée d’un trafic pas très catholique. Imagination débordante ou réalité ? Alice a-t-elle mis le bras dans un engrenage qui pourrait lui être fatal ? Caryl Ferey propose une histoire simple, émouvante, captivante qui s’inscrit par petites touches dans un humanisme fondamental dénué du ton moralisateur généralement utilisé pour l’édification des jeunes lecteurs. Il expose des faits, place ses personnages devant des situations périlleuses, sans outrance, sans manichéisme, presque avec désinvolture, ce qui renforce le tableau qu’il livre, celui de la description d’un bidonville mais aussi des agissements de personnages peu scrupuleux, pour qui tout est profit. Et comme Caryl Ferey est un grand voyageur, ce qu’il décrit, il le connait. L’intrigue devient le support de la peinture d’une Afrique du Sud actuelle. Ce qui n’empêche de petits traits d’humour d’émailler le récit : C’est affreux de se faire dévorer par un requin ! Pas tellement plus que d’être électrocuter par un grille-pain.
Collection Souris Noire
PAUL MAUGENDRE |
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