Une lecture de PAUL MAUGENDRE La première occupation de Mehdi, le matin, est de lire les articles glanés dans le journal d’info local. Un rite hérité de son père depuis tout jeune. Le père déjeune en premier, lit les brèves puis passe le canard à son fils qui le dévore en même temps que ses tartines. Et comme il a vaguement l’idée de devenir journaliste, c’est en même temps un excellent entrainement. Par exemple ce jour-là trois articles retiennent son attention : un bande de malfrats, surnommés les Arsène Lupin, vident des maisons en plein jour sans que les voisins interviennent ; les ouvriers de l’usine laitière La Vache Joyeuse manifestent contre un plan social visant quelques soixante-dix emplois et une probable délocalisation ; une jeune fille a disparu en rentrant d’un match de hand-ball. Seulement l’autre information, dont ne sont pas emparés les journaux ou la télévision et la radio, c’est la mauvaise humeur constante depuis quelques jours de sa mère. Et sur le chemin de l’école il en parle à sa jeune grande sœur Loubna qui a elle aussi remarqué ce changement de comportement. D’autres petits faits viennent bientôt confirmer leur inquiétude. A l’école le fils du brocanteur leur demande pourquoi leur mère avait confié des trucs à vendre et qu’elle avait passé beaucoup de temps dans le magasin. Alors que théoriquement leur mère était sensée être au travail. Et dans la boutique Mehdi et Loubna remarquent une armoire mise en vente, un meuble appartenant à leur tante. Des tâches suspectes, brunâtres, maculent un pan de bois. Quant à la porte de la cave, qui d’habitude est ouverte, elle est fermée à clef. D’autres événements, incompréhensibles pour eux, parsèment leurs journées. Pour eux leur mère a fait une bêtise, une grosse bêtise, mais quelle est-elle et comment l’aider. Et certains camarades de classe ne sont pas toujours tendres avec eux. Mehdi et Loubna, plus jeune que lui mais plus grande en taille ce qui complexe un peu le garçon, sont confrontés à des problèmes auxquels ils se doivent de prendre leurs responsabilités. Et ce n’est pas tant le couple que forment leurs parents, le père musulman, la mère chrétienne, que le regard et les interrogations des autres. Mais ils vont découvrir en même temps la dure réalité de la vie, et ses à-côtés. Stéphanie Benson ne délivre pas un message démagogique, tout au plus didactique et pédagogique, envers ses jeunes lecteurs, elle les met en face, via cette histoire subie par deux jeunes adolescents, des problèmes sociaux : le risque de chômage, le racisme, l’argent fourni aux entreprises pour s’installer puis la délocalisation, et le rôle des syndicats, et surtout qu’il ne faut pas toujours extrapoler des idées sans que les faits soient étayés. A méditer : Est-ce que tu crois qu’un bonhomme supérieur là-haut surveille ce que tu fais et qu’à ta mort il décidera si tu mérites le paradis ou non, comme un conseil de classe qui décide si tu passes en classe supérieure ? Pour faire simple, quand t’es à gauche, tu veux que les richesses soient partagées par tout le monde, et quand t’es à droite, tu veux être riche toi-même et ça s’arrête là. Le racisme le préoccupait depuis le jour où il avait compris qu’il ne serait jamais un vrai Français aux yeux de certains, à cause de son nom et des origines de son père.
PAUL MAUGENDRE |
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