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NAUSICA ZABALLOS |
Crimes Et Procès Sensationnels à Los Angeles (1922-1962)Aux éditions EDITE |
1634Lectures depuisLe jeudi 1 Fevrier 2013
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Une lecture de |
Si Hollywood est considérée à juste raison comme La Mecque du cinéma américain, Los Angeles fut le théâtre d’affaires criminelles et judiciaires qui n’eurent rien à envier aux scénaristes appointés par les firmes cinématographiques dès leurs implantations. Nausica Zaballos recense huit drames qui s’échelonnent de 1922 à 1962, ayant souvent des stars montantes ou confirmées du cinéma pour protagonistes. Des affaires moins médiatiques que celle du Dahlia noir par exemple, mais il faut avouer que les écrits et les déclarations de James Ellroy ont focalisé l’attention du public sur ce crime non résolu officiellement. Dans son avant-propos, Nausica Zaballos démontre le rôle pervers et néfaste des journaux qui n’hésitent pas à déformer des infos, à les fausser. L’engouement du public étant alors assujetti à ces médias qui chassaient (chassent encore ?) le sensationnel à tout prix, les recettes dépendant des ventes. Hollywood fascine les jeunes filles de Los Angeles et celles des états les plus reculés de l’Amérique. Les paillettes, la gloire les attirent et bon nombre d’elles vont s’y brûler les ailes. Clara Phillips fait partie de ces adolescentes qui rêvent de se faire un nom au cinéma, mais si elle devient célèbre, ce sera pour un triste fait divers. Elle sera même surnommée la tigresse. Mariée à quatorze ans avec Amour (prénom prédestiné) Lee Phillips, elle est inculpée de meurtre à vingt-trois ans. Son crime ? Avoir assassiné une rivale, Amour étant très volage. L’arme du crime : un marteau. Elle annonce la bonne (pour elle) nouvelle à son mari qui est catastrophé. Il fréquentait assidûment Alberta Meadows, une jeune veuve de vingt ans, il pense surtout à sa situation professionnelle et aux conséquences que la découverte de ce crime pourrait entraîner. Alors il aide Clara à effacer les traces du crime, mais celui-ci a eu un témoin, Peggy Caffee, une amie de sa femme. Si ce meurtre défraya la chronique, c’est surtout l’évasion de Clara Phillips de la prison de Saint Quentin qui enflamma les esprits. Ainsi que sa tentative de suicide. Cette histoire est narrée dans L’échappée belle de la Tigresse, première des affaires relatées. La comptine de l’enfant découpée en morceaux est le titre d’une affaire qui à lui seul plonge le lecteur dans de terribles suppositions. Cela se déroule en 1927/1928, et aborde le sordide. Le jeudi 15 décembre 1927, Marion Parker, 12 ans, est enlevée par un jeune homme qui vient la chercher dans l’établissement scolaire qu’elle fréquente. Il argue que le père de la gamine a été victime d’un accident de voiture. Le ravisseur, qui signe Georges Renard, envoie un télégramme à Perry Parker, banquier, lui demandant de ne rien faire avant de recevoir un autre pli, puis il lui téléphone en lui signifiant de ne pas prévenir la police. La vie de sa fille en dépendant. Mais Perry Parker a déjà prévenu les autorités policières, car son autre fille Marjorie est rentrée de l’école normalement. Une rançon de 1500 dollars, somme énorme pour l’époque, est demandée. Les appels téléphoniques et les missives se suivent. Perry Parker se rend seul au rendez-vous prévu pour remettre la rançon. Il découvre avec effroi sa fille morte, éviscérée. Seuls le torse et la tête ont été déposés. Les policiers commencent alors une enquête de routine qui aboutit à un employé renvoyé par le banquier peu de temps auparavant. Seule ou à peu près, Ayn Rand, philosophe, essayiste, romancière et scénariste, défend Hickman, le ravisseur meurtrier, et le surnomme le Surhomme, établissant des références à Nietzsche et Schopenhauer. Des compositeurs de country music s’empareront de cette affaire pour écrire de nombreuses ballades. Si cette affaire, pour horrible qu’elle soit, n’en est pas moins banale, d’autres histoires mettent en scène des personnages qui fleurissent aux USA, lieu de prédilection de ces protagonistes mais que l’on ne retrouve guère par ailleurs. Il s’agit des évangélisateurs, et l’engouement du public pour les gourous ne se dément pas. Les auteurs de romans policiers d’ailleurs mettent souvent des évangélistes, plus que de véritables religieux, dans des situations scabreuses. C’est ainsi que Nausica Zaballos nous narre La disparition de Sœur Aimée, une affaire qui tint en haleine la Californie et bon nombre d’autres états en 1926. Le cas de Sœur Aimée, Aimée Semple McPherson dans le « civil », dirige depuis 1918 une église évangélique de grande envergure, l’Angus Temple, pouvant accueillir jusqu’à cinq mille personnes. Le 23 mai 1926 des milliers de personnes se tiennent sur la plage de Venice. L’endroit où la prêtresse a été vue pour la dernière fois. Sa vocation, elle la doit probablement à Robert Semple, lui-même missionnaire pentecôtiste, qu’elle épouse à l’âge de 17 ans et qui devient son mentor. Fascinée par la glossolalie elle ne tarde pas à enflammer les foules. Elle perd son mari en 1912, deux ans après leur installation en Chine, et revient avec sa fille née peu auparavant. Elle se remarie rapidement avec McPherson, un employé d’épicerie, et l’entraîne sur la côte Est des Etats-Unis puis sur la côte Ouest. Afin d’accroitre sa popularité ses prêches sont diffusés à la radio, et elle lançe sa propre station le 6 février 1922. Elle soigne son apparence et de matrone corpulente et robuste elle se mue en « prêcheuse sexy ». Mais on peut diffuser la bonne parole à des ouailles tout acquises et s’adonner au péché de chair. Dans le même registre, en 1939 une nouvelle affaire d’évangéliste secoue la sphère religieuse. Elle est contée dans Le pasteur lubrique autoproclamé Messie, un titre qui à lui seul donne le ton. Enfin, dernière affaire que je vais évoquer, ne désirant pas trop en dire afin de garder votre curiosité intacte, Mourir à Pacific Palisades. Thelma Todd, à l’inverse des « héroïnes » des précédentes affaires, ne se destinait pas au cinéma mais désirait devenir institutrice. C’est par sa mère qu’elle met un pied dans l’engrenage qui deviendra fatal. Elue Miss Massachusetts, elle est remarquée par des agents et se voit confier de petits rôles au cinéma. Après avoir suivi des cours d’art dramatique, payés par la Paramount, elle apparait dans Le bel âge, en 1926. Elle va tourner ensuite avec Gary Cooper, William Powell, les Marx Brothers et le duo Laurel et Hardy. Le passage du muet au parlant n’est pas fatal à sa carrière et elle devient rapidement une star adulée pour sa beauté. Elle est d’ailleurs rapidement surnommée Hot Toddy ou encore Ice-Cream-Blonde. Mais elle est retrouvée morte le 16 décembre 1935 dans sa voiture enfermée dans le garage de l'ex-actrice Jewel Carmen, également ex-épouse du compagnon et associé de Thelma, Roland West. La maison de Jewell Carmen est située non loin du restaurant de Thelma. La cause de la mort est déclarée due à un empoisonnement au monoxyde de carbone. Meurtre, suicide, accident, les témoignages divergent, sont contradictoires et peuvent être interprétés dans un sens ou un autre. Pourtant certains faits démontrent qu’elle n’aurait pu grimper les quelques deux cents marches qui menaient à son garage sans laisser de traces. L’affaire ne sera jamais véritablement résolue. Nausica Zaballos ne se contente pas de relater les faits, mais propose de s’immiscer dans l’instruction des enquêtes qui sont effectuées lors de chacune des affaires présentées dans l’ouvrage. Elle reprend les différents articles journalistiques qui ont couvert les procès, citant ses sources dans les notes figurant à la fin de chaque chapitre, et rend le récit vivant (si l’on peut parler ainsi lorsqu’il s’agit de meurtres ou de décès inexpliqués) sans l’alourdir ou l’affadir. Chaque chapitre est précédé d’une sorte de fiche signalétique qui tout de suite accroche le lecteur, tout comme les titres d’ailleurs. Ainsi pour La disparition de Sœur Aimée, peut-on lire : Faux Kidnapping Inculpée : L’Evangéliste de L’Angelus Temple Mobile : Dissimuler une relation adultère ( ?) Victimes : Des milliers de fidèles, le bureau du Procureur Asa Keyes. Complices : Sa mère, un ingénieur du son, le Sosie d’Aimée.
La très riche iconographie apporte un attrait supplémentaire non négligeable à ce document remarquable par son professionnalisme et son esprit de recherche. On ne peut que penser, pour les plus anciens, aux bandes dessinées verticales parues dans les années 50/60 qui avaient pour nom Le crime ne paie pas et Les amours célèbres signées Paul Gordeaux, relatant des affaires avec empathie, vivacité, honnêteté, respect du lecteur et de la vérité. |
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