La page de garde vous instruit tout de suite. COOL est la préquelle (antépisode si vous préférez) de Savages paru en 2011.La fin tonitruante et attristante de ce dernier opus rendait l’astuce « préquellien » (à néologisme, néologisme et demi…) obligatoire pour ramener à la vie le sympathique et déjanté trio constitué de Ben (l’altermondialiste doté d’une conscience aigue), de Chon (l’ex Seal-Navy hyper entraîné) et de la charmante, fragile et amoureuse (des deux qui précèdent) O – pour Ophélia.Si vous vous perdez déjà dans mon introduction, vous n’avez aucune, mais alors, aucune chance de pénétrer les méandres foutraques et réjouissantes de ce « Cool »… Chon et Ben, Ben et Chon… ne seraient rien sans l’amitié fraternelle qui les lie, amenant l’un comme l’autre à prendre en cachette des risques détestables pour se protéger mutuellement. Et leur vie ne serait que tristesse sans la présence rafraichissante de O, présente dans leur vie depuis… toujours ? L’histoire de COOL prend ses racines dans le passé de Laguna Beach, Californie, au début des années quatre-vingts quand les hippies et les surfeurs ont fermé boutique pour laisser la place aux entrepreneurs et aux agents immobiliers. Enfin, il y a toujours des surfeurs, mais leur mode de vie n’est plus chanté par grand monde. Le mythe est passé du côté des traders…Les hippies ont quitté les grottes qu’ils habitaient, et leurs descendants ont parfaitement assimilé le concept de marché. En 2005, ce sont les enfants des désabusés du flower power qui négocient la came avec les Mexicains. Ben et Chon auraient bien voulu installer leur négoce d’herbe qui rend heureux en toute quiétude, mais leur réussite indispose… autant les flics de la DEA que les narco-investisseurs locaux.http://bibliobs.nouvelobs.com/polar/20120926.OBS3544/don-winslow-les-etats-unis-sont-un-narco-etat.htmlL’analyse que fait Don Winslow dans un article récemment paru dans l’Obs des Livres a de quoi attrister. Mais comment la réfuter ? Ce sont les Etats-Unis –pour lui un narco état- qui ont créé la situation ultra violente de « guerre de la drogue ». Cela recoupe par ailleurs les informations un tant soit peu sérieuses concernant la perte de contrôle du pouvoir au Mexique. Winslow le sait. Il pourrait en crever de rage et pontifier. Il pourrait manifester, poser des bombes… ou fumer des pétards ?Il écrit.Avez-vous remarqué comme il est rare de se dire, au bout de quelques lignes d’un auteur, et avec un soupir de contentement : il n’y a que lui pour…Pour caramboler des dialogues obscurs illuminant pourtant les relations,Pour jouer des listes et des allusions culturelles américaines comme d’autres de la bombarde, vibration soutenue et rythme allitératif,Pour rendre crédible le plus fou des personnages,Pour embrouiller et affoler son lecteur dans un long récit hallucinatoire comme de l’herbe trop forte en THC,Pour chahuter la ponctuation, la mise en page, le cours du récit, l’ordonnancement de son récit… et vous garder accroché comme un mollusque ?Et tout cela à des lieues des récupérations cinématographiques convenues telle ce décevant « Savages » de Oliver Stone. Car le style est tout, mais n’est pas donné…Porté par la rage de l’impuissance, mais sans doute aussi par un amour de la vie chevillé au corps, la puissance déjantée de COOL réjouira les amateurs de style, et tout en présentant avec « Savages » de subtiles différences, ne pourra que réjouir ceux qui l’avaient aimé.
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