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Le mercredi 17 Mai 2012

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P.g. WODEHOUSE




Une lecture de
PAUL MAUGENDRE

PAUL MAUGENDRE  

Comprend : Mr Mulliner raconte ; Baronnets et bar honnêtes ; Tous cambrioleurs ; Bravo, oncle Fred ; Oncle Dynamite ; Le plus beau cochon du monde.

Préface d’Hubert Prolongeau; Postface de François Rivière. Défense de P.G. Wodehouse, un article de George Orwell.

Il est de notoriété publique (et même laïque) que l’humour anglais comporte de fortes doses d’absurde et de non sens. Et parmi les littérateurs britanniques les plus représentatifs Jérôme K. Jérôme (Trois hommes dans un bateau, son titre le plus connu) et Pelham Grenville Wodehouse. De P.G. Wodehouse le lecteur curieux s’est délecté des nombreuses aventures qu’il a consacrées à Jeeves, le butler (majordome) de Bertie Wooster, jeune homme riche, légèrement imbu de sa personne, oisif (occupation très prenante) toujours prêt à s’occuper des amours de sa nombreuse parentèle. Mais c’est oublier que Wodehouse a mis en scène bien d’autres personnages hauts en couleurs, souvent aisés (pour ne pas dire riches), et dont les aventures (et mésaventures) sont toujours désopilantes pour le lecteur.

L’humour est tout autant niché dans la description des personnages, des lieux, des événements, des scènes d’actions (et d’amour, mais l’amour est déjà une action… des sentiments) que dans les dialogues. Des dialogues qui par ailleurs sont parfois ce que l’on nomme aujourd’hui des brèves de comptoir, mais étaient au temps de Wodehouse des brèves de pub. Petit exemple par l’absurde :

Je me souviens encore de l’époque, dit Gin-Bière-Blonde-au-Gingembre, où une fille sur deux faisait environ six pieds deux pouces en souliers de bal, avec des courbes comme des montagnes russes. Maintenant, elles ne font pas plus de cinq pieds, et de profil vous ne les voyez plus. Pourquoi en est-il ainsi ?

La Bière-Brune-Pression secoua la tête.

Personne ne peut le dire. C’est pareil pour les chiens. A un certain moment, le monde est rempli de carlins à perte de vue ; l’instant d’après, on ne voit plus un seul carlin : rien que des pékinois et des chiens-loups. Bizarre !

C’est à ce moment propice qu’intervient Mr Mulliner, le personnage principal des court-lettrages composant Mr Mulliner raconte, pour apporter son point de vue et ses éclaircissements dans ce débat fondamental. Car, la scène se passe dans l’arrière-salle du Repos du pêcheur, Mr Mulliner est un homme qui aime apporter ses points de vue et narrer des anecdotes concernant ses neveux, nièces, cousins proches et éloignés, afin d’édifier ses interlocuteurs plus ou moins consentants. Et si ceux-ci se retranchent derrière un supposé rendez-vous ou autre, afin d’échapper à la logorrhée de Mr Mulliner, celui-ci trouve la parade en leur proposant une nouvelle tournée de consommations. C’est ainsi qu’au cours des neuf historiettes qui composent ce premier recueil, nous voyons évoluer des personnages qui afin de déclarer leur flamme à une belle, se débrouillent pour effectuer tout le contraire de ce qu’ils devraient faire ou dire, entrainant en cela des situations cocasses. Cocasses pour le lecteur mais pas toujours pour ceux et celles qui les subissent, et qui relèvent parfois du vaudeville.

Je vous aurais bien entretenu de L’homme qui avait cessé de fumer, mais comme le fait de fumer est de plus en plus répréhensible (quoique l’état est quelque peu hypocrite dans cette affaire puisqu’il est content de percevoir les taxes afférentes lors de la vente de ce produit, taxes soi-disant destinées à renflouer la sécurité sociale, mais comme les fumeurs sont de moins en moins nombreux l’état est obligé d’augmenter le prix des cigarettes, spirale infernale, et d’ailleurs qui nous dit que les taxes sont reversées à l’organisme auquel elles sont destinées… Mais je m’éloigne du sujet !), je vais m’abstenir. Pourtant, à la lecture, on s’aperçoit que le comportement et la vision du monde et des personnes qui nous entourent peuvent changer du tout au tout lorsqu’on l’on est obligé de supprimer un menu plaisir. Et que dire de cette ambivalence dans la personnalité des deux héros qui ne sont plus eux-mêmes à cause du maléfice supposé ou réel d’un lieu comme dans Incidents fâcheux à Budleigh Court. Souvent deux hommes, même trois parfois, quand on aime on ne compte pas, se chamaillent, en viennent même aux mains pour conquérir le cœur d’une belle. Péril sur le tee serait l’exemple même du contraire car deux joueurs de golf tentent tout pour échapper aux griffes d’une jeune fille dont le rire ressemble à s’y méprendre à une corne de brume alors qu’un troisième larron est tellement jaloux qu’il est persuadé qu’ils veulent lui ravir celle qu’il aime.

Je m’en voudrais de tout vous détailler, tout vous dévoiler les historiettes ou romans qui composent ce volume, mais je me permettrai néanmoins, avec votre accord, de m’attarder sur Oncle Dynamite.

Oncle Dynamite, c’est oncle Fred, Lord Ickenham, un homme qui adore les facéties mais également aider dans leurs entreprises les personnes qu’il aime. Aussi il se dépense sans compter pour former des couples, dessiller les yeux des amoureux, et leur démontrer que le ou la partenaire élu par eux n’est pas forcément le bon choix. Il s’immisce avec délectation dans les affaires d’autrui, pensant, avec juste raison parfois, que ses congénères manquent d’envergure pour régler au mieux leurs problèmes. Il ne manque jamais de ressources. Homme d’esprit, prompt à la répartie et à la dialectique impitoyable, il n’est pas dépourvu d’humour et c’est ce qui en fait son charme. Comme le souligne un des personnages du livre : Il n’épargne jamais sa peine s’il a le sentiment de répandre la joie et la lumière.

J’ai relevé deux citations qui ne peuvent que faire chaud au cœur du modeste chroniqueur que je suis, réfutant le terme de critique : D’abord Dans les moments de désarroi, il n’y a rien de tel qu’un bon roman policier pour chasser les idées noires. Je signale que ce roman a été édité en 1948, et donc que le roman policier vivait ses plus belles heures, tandis que le roman noir n’avait pas encore pris la place prépondérante et parfois stressante qu’il occupe aujourd’hui. Car dans ce cas je doute que P.G. Wodehouse eut écrit cette ligne, ou émis cette sentence.

Autre citation : Les articles élogieux répandus dans la presse aux frais de l’éditeur n’ont pratiquement aucun résultat et la seule publicité efficace est ce que l’on pourrait appeler la publicité faite de vive voix.

Une allusion à peine voilée et un hommage rendu à tous ceux qui tentent comme moi de promouvoir l’amour de la lecture et des livres par blogs interposés. Et même si ce n’est pas tout à fait ce qu’il voulait écrire, gardons quand même les compliments.

Je m’en voudrais de terminer sans évoquer Le plus beau cochon du monde. L’Impératrice de Blandings est une grassouillette, pour ne pas dire carrément grasse, représentante dodue de la race porcine. Elle a été lauréate à deux reprises du comice agricole, un salon de l’agriculture en réduction, et est en concurrence avec l’Orgueil de Matchingham lors d’un nouveau concours. Et, bien évidemment, cela entraine des jalousies et des coups fourrés. Mais que voulez-vous Lard est sacré !

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