|
|
PHILIPPE WARD |
Le Maître Du NilAux éditions RIVIERE BLANCHEVisitez leur site |
733Lectures depuisLe mercredi 30 Octobre 2019
|
Une lecture de |
Hors Série N°65. Editions Rivière Blanche. Parution 1er septembre 2019. 324 pages. 25,00€. ISBN : 978-1-61227-858-2 Un djinn ni troué, ni déchiré, ni délavé ! En l’an 386 de l’Hégire, Al-Aziz, le calife d’al-Qahira se meurt. Son fils Al-Hakim va prendre la succession mais il n’a que onze ans, aussi c’est Barjawan dit le slave qui assurera la régence. Une décision qui ne plait guère à Ibn Ammar, le chef des Berbères Kutana qui a par le passé rendu service au calife moribond, portant les Fatimides au pouvoir. Avant de décéder, le calife murmure ses derniers conseils à son fils : frapper les Abassides qui sont leurs ennemis, s’emparer de Bagdad et de Byzance, les ennemis de leur peuple Fatimide, et de leur religion. La rivalité entre Barjawan et Ibn Ammar éclate dès le trépas du calife et Amr, un djinn qui surveille la destinée d’Al-Hakim, aide Barjawan, malgré les divergences qui les opposent, à se débarrasser de son adversaire. Barjawan peut donc désormais diriger le pays en tant que vizir, avec le secret espoir de devenir le calife à la place du calife. Sitt, la sœur quelque peu plus âgée d’Al-Hakim, est le fruit des amours du calife défunt avec un djinn femelle, tandis que la mère du garçonnet était chrétienne. Or les djinns ne sont guère appréciés de la population. Malgré tout, Amr poursuit son œuvre, sa mission, auprès d’Al-Hakim qui s’affirme de jour en jour. Enfant, Al-Hakim s’amusait à piéger les oiseaux avec de la glu dans les arbres puis à les égorger. En vieillissant, passant peu à peu à l’adolescence, son instinct sanguinaire ne faiblit pas, au contraire. Il n’apprécie pas être contredit et ceux qui osent le défier ne terminent pas la journée. Si Amr est de bon conseil, il tient parfois à s’effacer, laissant Al-Hakim prendre des initiatives plus ou moins bonnes. Il trouve une alliée de circonstance en Sitt qui protège son petit frère, et en Lamia, la stryge, malgré leur rencontre houleuse. Ils s’apprécient alors qu’au départ elle était vindicative à son encontre. Amr habite dans une des pyramides dressées dans la plaine de Gizeh, et rend souvent visite à l’érudit Pacratis, cherchant à comprendre les mystères de l’Egypte ancienne et son écriture hiéroglyphique. Mais il possède un ennemi en Iblis, le conseiller du calife de Bagdad et éminence grise des Abassides, qui est son propre frère. Iblis tente de tuer à plusieurs reprises Al-Hakim mais à chaque fois Amr le contrecarre dans ses essais. Ils s’affrontent en se transformant selon les épisodes en épervier ou autre animal, ou en khamsin, ce vent de sable qui permet d’évoluer à grande vitesse et d’échapper aux regards. Dans des oasis, des tribus berbères fomentent la révolte contre ce calife despotique et sanguinaire. Ils sont aidés dans leur entreprise par Abou Rakwa qui se proclame le Mahdi et le nouveau prophète dont le poids des mots influe négativement sur ses interlocuteurs ou au contraire leur insuffle un courage de rébellion. Les actes d’Al-Hakim varient en fonction de son humeur. Il prend de nombreux décrets, parfois contradictoires, que rédige Amr, le principal conseiller du calife. Al-Hakim se montre tour à tout caractériel, prétentieux, mégalomane, humble, manipulateur, sensible, orgueilleux, ambitieux, imprégné de la foi musulmane. Il est craint, redouté, ou aimé selon les décisions qu’il prend sur des coups de tête. Il dépense sans compter et bientôt les caisses de l’état sont vides.
Ce roman historico-fantastique s’inscrit dans la période de la fin du premier millénaire et début du second millénaire. Il est placé sous le signe de la dualité. Dualité des personnages, Sitt étant par exemple mi-humaine mi-djinn, Al-Hakim se montrant bipolaire dans ses humeurs, dualité entre Amr et Iblis, les deux frères djinns qui se combattent afin d’élever le règne des califes qu’ils servent mais dont leurs propres ambitions se télescopent, dualité religieuse qui perdure de nos jours entre les chiites et les sunnites. Sans oublier l’ingérence bénéfique entre anciens dieux, la belle Isis en particulier, et les dieux modernes incarnés par Allah et son prophète Mahomet. Dualité enfin entre faits et personnages historiques réels et fiction d’inspiration fantastique. L’on sait que Philippe Ward professe un attrait fortement ancré pour cette région d’Afrique, l’Egypte et la Syrie notamment, puisqu’il l’a déjà explorée en compagnie de Sylvie Miller pour sa sage de Lasser, détective des Dieux. Mais ici, il s’agit d’une œuvre personnelle, son Grand Œuvre, qui pourrait marquer la littérature fantastique, la littérature tout court, par son évocation de cette période, par sa fougue et son entrain, par sa connaissance historique et géographique également. Il est dommage que les documents compulsés ne soient pas répertoriés en fin de volume. Mais un petit truc, oui y’a un truc, qui me gêne. C’est l’apport de Marielle Carosio dans l’édition de ce roman en tout point remarquable. En effet, il est précisé : édition dirigée par Marielle Carosio. Quel est l’apport de cette jeune femme, étudiante en littérature et édition littéraire ? Relecture, remise en forme, conseils d’écriture ? Je ne pense pas que Philippe Ward, qui possède déjà à son actif une trentaine d’ouvrages écrits seul ou en collaboration, qui est lui-même éditeur, ait eu besoin d’un tel apport, d’autant que j’ai relevé quelques anomalies dans le texte. Notamment, au début : Page 22 : Un immense turban blanc autour duquel resplendissait le rubis… Ce ne serait pas plutôt le rubis qui resplendissait dans un immense turban blanc ?
Page 25 : S’engouffra dans un lazzi de ruelles nauséabondes… Lazzi pour lacis ?
|
Autres titres de |