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VALERIO VARESI |
La Pension De La Via SaffiAux éditions AGULLO EDITIONSVisitez leur site |
713Lectures depuisLe mardi 19 Septembre 2017
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Une lecture de |
Le commissaire Soneri est en poste à Parme, dans le nord de l’Italie. Voilà quinze ans qu’il est veuf d’Ada, son grand amour. Son amie intime Angela ne la remplace pas, même si le policier et elle partagent beaucoup de choses. À l’approche de Noël, la propriétaire de la pension Tagliavini est retrouvée morte chez elle. C’est sa vieille voisine Fernanda qui vient alerter la police, avant de disparaître. Le décès de Ghitta Tagliavini n’est pas aussi naturel qu’il semblait, une enquête s’impose. "35 via Saffi", c’est une adresse que le commissaire a bien connue : Ada y logea alors qu’elle était étudiante. À l’époque, la pension avait de nombreux jeunes pour locataires. Soneri s’y remémore des souvenirs heureux d’alors. Ghitta Tagliavini était très connue dans ces quartiers de Parme. Ces dernières années, sa pension ressemblait plutôt à un hôtel de passe. Ce que confirme le Pakistanais qui tient un bar en face. Ainsi qu’Elvira Cadoppi, qui loge ici ponctuellement. Elles étaient originaires du même village, Rigoso, vers la montagne. Autrefois, Ghitta y fut rebouteuse, capable de guérir bien des maux. Respectée pour son don, mais généralement détestée, elle fut impliquée dans une affaire d’adultère. Elle vint s’installer à Parme, créant cette pension. Il semble que Ghitta ait été avorteuse clandestine, à une époque. Le commissaire comprend qu’il y avait un certain nombre de côtés sombres dans la vie de la victime. Soneri hante le quartier, qui a bien changé depuis le temps où il y venait pour Ada. Rien d’anormal dans l’appartement de la voisine Fernanda, qui a visiblement programmé son départ. Le policier discute avec quelques rescapés du quartier, tel le clochard Fadiga et le barbier Bettati. Quant au Frère Fiorenzo, c’est à lui qu’on a anonymement transmis l’arme du crime, un couteau spécifique de charcutier. Tenu par le secret de la confession, ce moine ne pourra guère aider le commissaire. C’est lui qui se chargera des obsèques de Ghitta : peu de personnes sont présentes, alors que tant de gens la connaissaient. Ettore, l’amant d’autrefois de Ghitta, révèle que la défunte était bien plus riche qu’on le pensait. Un lien pourrait exister entre ce meurtre et l’affaire Dallacasa. Quelques années plus tôt, un ancien activiste de gauche ultra fut exécuté, probablement par d’ex-amis. Sachant que Fernanda est l’héritière désignée de Ghitta, ça peut constituer aussi une piste à suivre. Néanmoins, Sonari s’intéresse plutôt à Pitti, un dandy efféminé rôdant fréquemment dans le quartier. Ce fut un proche de la défunte, et il paraît en relation avec Elvira Cadoppi. Par ailleurs, Ghitta était en contact avec des investisseurs immobiliers de Parme. Le cas de ces affairistes concerne plus sûrement la brigade financière. Tandis qu’arrive Noël, Sonari continue à fouiller dans les noirs secrets de Ghitta, et peut-être également d’Ada… (Extrait) “Il avait décidé de laisser les choses arriver sans intervenir. Il pressentait que tôt ou tard la situation se déchaînerait sans qu’il y ait besoin de provoquer l’explosion. C’est pourquoi, sans faire de bruit, il redescendit dans la rue et se mit en marche pour rentrer chez lui. Dès qu’il arriva, le clocher du palazzo del Governatore sonna les deux heures. Bien à l’abri dans sa tanière, il éprouva un soulagement immédiat. Enfin détendu, il s’alluma un toscano, se fit bouillir un peu d’eau et se prépara une camomille. Il la but et continua d’observer la nuit silencieuse. C’était l’une des choses qu’il préférait. Il en profita alors pour se repasser en boucle les mystères que ce monde brouillardeux préservait : la disparition de Fernanda, l’assassinat de Ghitta, Pitti qui rôdait toute la nuit comme un animal en chasse, cette Elvira cynique à faire peur, la mort de Dallacasa… Au bout du compte, tout confluait naturellement vers cette pension qui avait tout du pivot bien huilé autour duquel tournait un univers entier.” Le commissaire Sonari est un mélancolique et un contemplatif. Il aime sillonner les rues de sa ville, redécouvrir chaque "borgo", se remémorant des images du passé. Le brouillard qui semble coutumier à Parme lui offre une atmosphère qu’il apprécie. Derrière la fenêtre de la pension, la nuit, il observe les mouvements du quartier. Chez Ghitta, il espère dénicher d’improbables empreintes de ce que fut la vie de la victime. Pendant ce temps, c’est son adjoint Juvara qui s’occupe des quelques détails à préciser. Pour autant, Sonari n’est nullement passif. Bien au contraire, car il y a quantité d’aspects de la personnalité de Ghitta à explorer. Le titre italien de ce roman, “La propriétaire”, s’applique idéalement à la défunte. Le titre français est très évocateur aussi, cette maison étant au centre du sujet. En effet, que se passa-t-il derrière les murs de cet immeuble, une bâtisse fréquentée par beaucoup de monde depuis bien longtemps ? Outre l’ambiance magnifiquement restituée, Valerio Varesi présente une intrigue de qualité supérieure. Sur certains points, ce sont des épisodes de l’histoire italienne qu’il retrace, du militantisme politique de naguère jusqu’aux magouilles gangrenant l’économie du pays depuis tant d’années. Quant au parcours revanchard de Ghitta, il est absolument crédible. Ce qui suppose qu’aussi forte soit-elle, cette dame s’est fait des ennemis. Une enquête qui inclut des questions personnelles, pour le commissaire. Tout est ici maîtrisé avec virtuosité : un roman policier remarquable ! |
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