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EMMANUEL VARLE |
Le Cirque S'invite Au 36Aux éditions LES PRESSES LITTERAIRESVisitez leur site |
894Lectures depuisLe dimanche 19 Octobre 2014
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Une lecture de |
Collection Crimes et Châtiments N°52. Parution le 8 juillet 2014. 356 pages. 13,00€. Entrez Mesdames et messieurs, le spectacle va commencer... Les fauves ne sont pas tous en cage ! Un romancier devrait agir comme un jardinier : ne pas hésiter à supprimer des rejets afin que la plante soit plus belle, enlevez les stolons du fraisier pour que celui-ci ne s'étiole pas... Et pour cela il ne doit pas hésiter à supprimer les digressions, les radicelles n'ayant rien à voir avec l'intrigue, les phrases en trop, afin de privilégier l'essentiel au détriment de l'accessoire. Ces morceaux superflus qu'il jugeait intéressants et bien écrits, il pourra les réutiliser plus tard, dans un autre roman et ce à bon escient. D'ailleurs l'auteur s'en rend peut-être compte car il prête cette pensée à Enzo : Il avait hâte de connaître ce que la vieille avait à lui dire car il détestait, depuis sa prime jeunesse, que son interlocuteur tourne trop longtemps autour du pot. Vieux truand sur le retour, René Bozzoni, plus communément appelé Jo, est toujours sur le qui-vive. Et lorsque l'on sonne à sa porte vers 21h00, une heure indue pour une visite non programmée, il se pose des questions, prend ses précautions et muni d'une arme à feu, il ouvre la porte vigoureusement, mais personne ne se tient sur le palier. Il regarde par sa fenêtre donnant sur la rue, mais le désert règne. Le lendemain il trouve devant sa porte un programme de cirque, un vieux fascicule sur lequel il apparait, silhouette entourée de rouge, prêt à intervenir en cas de besoin aux abords de la cage aux lions. C'était il y a quarante deux ans, et ce n'est pas son incartade de l'époque qui lui vaut ce retour dans le passé. A moins que le vol et la vente d'un bébé tigre à une autre famille de circassiens soit restés en travers de la gorge d'un des ses anciens patrons. Depuis Jo est perturbé, inquiet, oubliant souvent de sortir son chien. Et un soir quelqu'un l'aborde et lui tire dessus. Les policiers arrivent rapidement de même que les hommes de la Scientifique afin de relever les premiers indices. Mais ils ne se rendent pas compte qu'un gamin ramasse à terre la figurine d'un lion. Et pendant ce temps là, son chien se morfond chez lui. Un père et son fils, partis pêcher dans un lac situé dans un bois limitrophe de la ceinture parisienne aperçoivent une forme blanchâtre qui flotte sur l'étang et il ne s'agit pas d'un poisson. D'ailleurs il n'y en a plus guère dans ces eaux polluées. Le lieutenant Enzo et ses adjoints, Stéphane et Corentin, constatent immédiatement les dégâts des eaux et les deux pêcheurs sont invités à passer au 36 Quai des Orfèvres pour effectuer leur déposition. Le gamin qui a récupéré une figurine de lion omet de signaler sa découverte. Le cadavre porte sur le bras le tatouage d'un tigre. Le commandant Boussinet qui dirige le groupe 4, composé d'Enzo et ses collègues, hérite de l'affaire. Il est tarabusté par le commissaire Mingus (lequel ne se prénomme pas Charlie) qui exige des résultats rapides. Le noyé était un ancien petit voyou, et un lien se profile rapidement entre Jo et le dénommé André Récamier : tous deux ont travaillé plus ou moins longtemps dans un cirque. Mais de nombreuses années se sont écoulées depuis. Alors qu'ils pataugent dans leur enquête ils apprennent à la faveur de la lecture d'un entrefilet journalistique qu'un patron de cirque vient d'être abattu en Normandie. Aussitôt ils récupèrent l'enquête et il ne leur reste plus qu'à lier le tout pour découvrir les coupables qui selon toutes probabilités ne seraient qu'un, l'arme ayant servi à ces trois meurtres étant la même. Les enquêtes dites de proximité permettent de cibler quelques suspects potentiels. Un forain notamment qui magouille, des à-côtés qui lui permettent de nourrir ses animaux. Un individu qui bizarrement a habité près de chez Jo puis de Récamier. Un autre qui touche de près à Enzo puisqu'ils se sont fréquentés (c'est un bien grand mot) sur les bancs de l'école et qui est devenu libraire. Ils s'étaient perdus de vue, ce qui n'affligeait pas particulièrement Enzo, et c'est grâce à un réseau supposé social que le dit condisciple l'a contacté. Enfin un quatrième personnage, théoriquement repérable avec ses dreadlocks mais qui a disparu de la circulation depuis quelques temps et qui refuse de donner de ses nouvelles. Un point commun relie les deux derniers quidams puisqu'ils officient dans des associations de défense des animaux. L'enquête traîne en longueur au grand dam de Mingus et des renforts sont mis à disposition de Boussinet and Co. Et c'est au bout de plus de six mois que tout se dénouera grâce à un coup de pouce du destin.
L'univers du cirque n'a guère servi comme thème dans un roman policier, et pour l'auteur c'est un moyen de montrer la vie des animaux en cage. Mais également les débordements de certaines associations en faveur de la faune. Certes des pratiques inavouables ont eu et sont peut-être encore mis en œuvre pour "dresser" ces petites bestioles qui n'ont rien demandé et surtout pas à travailler sans bénéficier de la Sécurité Sociale. Mais dans le même sens, il ne faut pas non plus exagérer. Où alors, s'il faut absolument prendre la défense des animaux, il ne faut pas oublier que d'autres secteurs traumatisent les animaux : les personnes par exemple qui ont un chien mais l'attachent à longueur de journée à un bout de corde de deux mètres d'envergure et encore heureux quand le canidé peut se réfugier dans une niche lors des intempéries. Sans parler des agriculteurs qui tapaient sur leurs ânes, chevaux ou bœufs pour les faire avancer. Divagations aussi venant de la part de ceux qui déplorent et manifestent contre le dressage de chiens d'aveugles. Emmanuel Varle, s'il met en avant les pratiques de dressage parfois désastreuses dans certains cirques, ne condamne pas systématiquement et fait la part des choses. Il se contente de décrire certaines situations. De même qu'il ne s'attarde pas trop sur les penchants homosexuels de Stéphane, préférant mettre en avant Boussinet et ses envies de sorties dans des boîtes de nuit spécialisées dans l'échangisme, invitant Enzo, lequel n'est pas trop enclin pour participer à ses marivaudages. Enzo est plus occupé à remonter le passé de son grand-père qu'il n'a pas connu et dont il découvre avec stupeur et intérêt son appartenance au monde du cirque et son passé de dresseur aux côtés du célèbre Alfred Court. Emmanuel Varle, lui-même commandant de la Police Nationale, pratique le corporatisme, peut-être façon inconsciente, griffant au passage ses collègues de la Gendarmerie Nationale : Elle [la Gendarmerie] a été dessaisie très rapidement et c'est tant mieux pour nous, vu la façon dont bossent généralement les cruchots, au profit du SRPJ de Rouen. Et ce terme de cruchot revient par deux fois, constatant avec amertume que les gendarmes bénéficient d'avantages en nature et de promotions plus rapides que les policiers. Mais ceci est un débat qui ne nous concerne pas !
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