Le Masque, 318 pages, mars 2005, 8€ Voilà un livre qui va faire de la peine à notre nouveau pape. Je soupçonne son auteur, Jean-Louis Vissière, professeur émérite de l'Université de Provence, grand spécialiste du Siècle des Lumières, de l'avoir écrit avec un petit sourire voltairien aux lèvres. En effet, il raconte vingt-trois affaires criminelles dans chacune desquelles un ou plusieurs ecclésiastiques sont impliqués. L'auteur n'a pour autant rien inventé. C'est en parcourant les recueils de Causes célèbres, où magistrats et avocats racontaient les affaires les plus propres à attirer le chaland friand d'histoires croustillantes ou scabreuses qui n'avaient pas leur équivalent dans les romans de l'époque (sauf ceux de Sade, bien sûr !) que Jean-Louis Vissière s'est rendu compte que les mots prêtre (ou religieuse) et criminel n'étaient pas incompatibles.A la lecture de ces Petits crimes en soutane - c'est le titre - on prend conscience que le tristement célèbre curé d'Uruffe, Guy Desnoyers, condamné en 1958 à la perpétuité pour avoir éventré sa maîtresse enceinte de huit mois de ses œuvres et tué l'enfant (non sans l'avoir au préalable baptisé !) avait eu derrière les hauts-murs des couvents ou dans l'ombre des sacristies, des prédécesseurs mémorables. Tel ce Père Girard, à Aix, confesseur lubrique incapable de résister à la tentation devant les stigmates que lui présente une belle pénitente, ou ce jeune prêtre, Félicien Monzay accusé d'avoir commis un inceste spirituel qui malgré son qualificatif a été consommé charnellement. Parfois l'aventure prend des allures de vaudeville avec ces bonnes sœurs fugueuses, ce curé bavarois qui procède à son propre mariage secret avec ses concubines successives, ou ces escrocs en soutane qui font du trafic de messes ou jouent les Arsène Lupin avant l'heure, tel le fameux Collet attiré à part égale par les habits ecclésiastiques et militaires sous lesquels il gruge son prochain. Mais ailleurs, il s'agit de meurtres au couvent longuement mitonnés dans la promiscuité et la solitude morale, où l'on se sert de salade à l'arsenic ou bien on se pousse dans l'escalier en laissant croire à un accident. Parfois cela va plus loin : viol, pédophilie, manœuvre abortives conduites dans l'affolement et même... accusation de cannibalisme ! ( par Fouquier-Tinville, il est vrai...).
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