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JAN THIRION |
MikkoAux éditions KRAKOENVisitez leur site |
3148Lectures depuisLe dimanche 17 Septembre 2006
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Une lecture de |
Ne vous inquiétez pas, « c’est la manie de l’homme moderne, il doit zapper à tout bout de champ, croire qu’il tient les commandes de son destin entre ses doigts. » Mikko n’est ni un cornet glacé, ni le prénom de la jeune personne qui orne la couverture du roman. Mikko est une télécommande. De chez Sony, s’il vous plait. Merci Monsieur Sony pour ce don du ciel, car il faut bien avouer que la vie de Cyril Poisson, professeur de mathématique en mal de vivre, se trouve transformée dès l’instant où la petite chose plate à touches et à piles lui révèle son pouvoir. Dans les pages d’un autre roman ou d’une nouvelle de Jan Thirion, la zappette se serait faite revolver. Mais Mikko n’est pas un polar. Cyril Poisson n’est pas un détective privé, mais un auto-détective intime, pourrait-on dire. Et la petite machine va non seulement lui permettre d’agir sur le présent immédiat, mais aussi de retourner dans le passé, histoire de vérifier, à tout hasard, si les fantômes n’auraient pas quelques remords, parfois, ceci avec l’aide précieuse de l’incroyable zappette. Mikko donne le sourire à la boulangère grincheuse et fait de votre détestable voisin de palier le meilleur ami du monde. Mikko chamboule les humeurs et provoque d’inavouables désirs. Il suffit juste que le sujet se trouve dans la mire de la zappette et le tour est joué. Evidemment, se déplacer sans cesse avec une télécommande à la main n’est pas très discret. Encore que, d’un salon équipé d’un écran 16/9 à une rue piétonne où résonne en permanence la fréquence des téléphones portables, on a vite fait de zapper l’incongruité. La route est donc libre pour Cyril Poisson qui s’empresse de tester l’effet Mikko sur le monde qui l’entoure. Mais la cible essentielle, ce sera l’Ex. L’Ex qui a gardé la maison et la voiture après la séparation, ainsi que l’écran de télévision. L’Ex que Poisson aimerait tant voir s’esquiver des bras de Nono, son successeur. Et puisque Poisson a eu la bonne idée de conserver les clés de la baraque, pourquoi ne pas y retourner et tenter de contrarier le cours des choses, de la vie et des sentiments… L’écriture de Jan thirion est incisive, aiguisée, plantée dans le réel. « Un roman, une fantaisie pour rire, j’espère… » me souffle-t-il. Et nous en rirons particulièrement jaune. Mikko est pénétrant à bien des égards, et s’il choisit d’entrer par la douillette et rassurante porte de l’humour auquel le lecteur se dispose immanquablement, il n’en demeure pas moins capable de débusquer les doutes et de les retourner dans tous les sens comme une lame dans une plaie ou un esprit dans l’embarras. « J’entre chez nous, poussé par un gosse qui veut le passage et oreilles tirées par la chanson-scie d’un chanteur mort, sinon à tuer. Les gens adorent les vieilles rengaines pour faire la fête. » L’écriture nous régale d’une ligne à l’autre, sans trève, et insinue de même un vilain sifflement dans l’oreille. La stéréo bat de l’aile, voyez-vous, même si c’est du Sony dernier cri. Ils « éprouvent le besoin de secouer la momie, n’importe quelle momie, de la faire danser sur un air désuet, histoire de prouver que le temps n’a pas de prise quand on s’amuse. » Et si Mikko n’est pas un polar, ni la zappette une balle de revolver, le roman n’en demeure pas moins redoutable, car il nous laisse en vie. « La cervelle des gens ressemble à la musique qu’ils écoutent, de la mayonnaise en tube. » « Tu sais ce que disent les psys ? Ils disent que la télécommande est une sorte de prothèse virile. » Qui marche à piles. |
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