David Hook, 45 ans, fermier aisé de l’Illinois et personnage déjà tourmenté, secoué par la mort de sa femme il y a quelques années, vient d’apprendre de décès de son fils aîné par suicide, en Californie, à Santa Barbara ; son sang ne fait qu’un tour. Persuadé qu’il s’agit de tout autre chose, il part enquêter sur la côte Ouest. Nous sommes au début des années 70 et c’est l’affrontement de deux mondes, celui de la vie facile et pailletée des hippies contre l’austérité rigoriste d’ Américains bien sous tout rapport que propose le roman. En apparence…
En apparence seulement : car Thornburg ne se contente pas de détailler la quête opiniâtre de David, débarqué dans un univers qu’il rejette de toutes ses tripes avant même d’y accoster. Le romancier nous livre des portraits fouillés de caractères certes cent fois rencontrés dans les romans noirs de l’époque (le livre nous arrive en France 33 ans après sa parution aux E.U.): politicien à la mode démocrate, surfant sur la vague bien fartée déjà par le clan Kennedy, jeune femme séduisante et mélancolique qu’on dirait sortie du film Vertigo déjà toute armée de détresse et de mystère, dans une ambiance qui rappelle les familles déboussolées des polars de Ross Mc Donald, sur cette même côte Ouest. Surtout, la traque de notre héros lui confirme une Amérique de la désillusion, un monde désormais sans mythe, sinon ceux crées de toutes pièces par les feuilletons télévisés qu’il voit dans les motels, ou bien celui du profit maximum engendré par l’or noir recherché au large des côtes du Pacifique. De cette mortelle randonnée, Hook ne sort pas vainqueur mais épuisé, et c’est tout le talent du romancier que de nous faire saisir la force sans cesse agissante des ténèbres qui l’enserrent.
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