Breton d’origine, Roch Le Stang est un commissaire divisionnaire âgé de quarante-six ans, en poste depuis quatre ans à Bordeaux. Sa carrière de policier à été exemplaire, quitte à nuire à sa vie privée. Quand Le Stang est convoqué à Paris, une surprise l’attend. Il est affecté dans un bref délai à l’IGPN, avec le grade de contrôleur général. Belle promotion, mais fort déstabilisante pour lui qui se voit plutôt en homme d’action. L’IGPN reste plutôt un placard, à son goût. Son supérieur Keller, ami et mentor, affirme avoir été "contourné". Il ne comprend pas non plus la logique de cette mutation, aussi flatteuse soit-elle. Quant à Le Stang, il ne voit pas parmi les récentes enquêtes qu’il a menées de cas sensibles, qui expliqueraient cette décision de sa hiérarchie. Une jeune femme de vingt ans vient d’être assassinée à Paris. C’était une toxico fichée, du nom de Rochelle Verdon. Immédiatement, Le Stang réalise qu’il s’agit de la fille de Claire, son amour de jeunesse au temps où il était jeune flic. Certains indices laissent supposer que la victime était la fille de Le Stang. Claire ne se manifestant pas, hormis dans les pensées du policier, il tente d’obtenir des infos à l’ancienne adresse de son amie. C’est en sortant de cet immeuble que Le Stang est la cible de tirs, sans qu’il soit blessé. Il se sent au cœur d’une énigme, dont il ne maîtrise absolument pas les éléments. Keller lui dégote une confortable et discrète planque non loin de Montparnasse, et lui adjoint un policier efficace, Castelli. Ce dernier ne tardera pas à trouver une piste. Entre-temps, Le Stang fait un rapide retour à Bordeaux, après avoir une nouvelle fois étudié les enquêtes en cours pouvant avoir un lien avec ses problèmes. Sur place, seul le cas de Valenti, un patron de club racketté, apparaît sérieux. Son équipe locale s’en occupe. Quand il revient à Paris, Castelli a progressé. La voiture ayant servi au tireur appartient à une strip-teaseuse, qui essaie de "balader" un peu les policiers avec une fausse version. En réalité, elle prête son véhicule à son compagnon, un ancien flic des Stups, employé désormais aux Archives du Ministère de l’Intérieur. Clairement, il a le profil d’un exécutant. Il semble avoir été engagé par un sous-fifre du cabinet ministériel, intermédiaire pour le véritable donneur d’ordres. La suite sera sanglante, ce qui va causer quelques remous dans les hautes sphères. Jusqu’à ce que Claire dévoile les arcanes de l’affaire… (Extrait) “Au claquement sec, si caractéristique, il reconnut aussitôt un calibre 38. La voiture venait d’accélérer en trombe et avait arraché, dans sa fuite, le pare-choc d’une camionnette en stationnement. Le Stang eut juste le temps de bondir et de reconnaître l’arrière d’une BMW bleu nuit conduite par un homme, comme le laissait supposer sa carrure. Deux secondes après, elle avait déjà bifurqué dans la rue Petit. Il n’avait même pas eu le temps de saisir son propre calibre, un Sig-Sauer SP 2022, qu’il portait en permanence sous sa veste. Compte tenu de la vitesse de la scène, ça n’eût d’ailleurs servi à rien. Encore sous le choc, il se tâta, incrédule. Non rien, il n’avait rien. Il était passé à deux doigts du pire. De cela, au moins, il était sûr.” De même qu’il existe des romans noirs et d’autres privilégiant l’enquête, certains auteurs développent le “polar d’ambiance”, comme c’est le cas ici. L’affaire tourne autour d’un flic chevronné, de ceux qui possèdent "l’esprit maison" et mènent une brillante carrière. Il ne paraît donc pas y avoir la moindre raison à ses déboires du moment. Certes, c’est une part de son passé qui resurgit brutalement. Qui, dans l’ombre, tire les ficelles et pourquoi, voilà ce qu’il devra déterminer. Il suffit d’entrer dans l’univers de ce personnage, et de le suivre durant plusieurs jours dans son quotidien quelque peu bousculé. Tel est l’objectif narratif de l’auteur, tout en sachant que le fond de l’intrigue ne manque pas de noirceur. Un roman policier fort sympathique.
Une autre lecture duPrintemps Acidede PAUL MAUGENDRE |
|
Collection Marge Noire. Parution le 19 avril 2018. ISBN : 978-2812923470 Une affaire pas très Claire ! A quarante six ans et quelques broquilles, le commissaire divisionnaire Le Stang Roch, responsable du DIPJ de Bordeaux, peut s’estimer satisfait de sa carrière dans les forces de l’ordre. Côté marital, c’est un peu moins bien car il est divorcé, mais on ne réussit pas tout dans la vie. Aussi la nomination comme contrôleur général, signification émanant des instances supérieures sans passer par la voie hiérarchique, le gêne aux entournures. Il ressent cette promotion comme une mise au placard. Une même impression ressentie par son ancien patron Keller, lorsqu’il lui fait part de cette décision. Roch est monté à Paris afin de lui en parler et il prend une chambre à l’hôtel, dans le quartier de Montparnasse-Bienvenüe. Et dans le métro, alors que sa rame est à l’arrêt, il remarque dans le wagon qui lui fait face une femme aux yeux cernés, pas par la police, qui écrit sur la vitre son prénom et SOS. Cette femme lui dit vaguement quelque chose, comme un souvenir enfoui dans les limbes de sa mémoire. C’est le soir, alors qu’il cherche à s’endormir, qu’il se remémore un épisode amoureux qui s’est déroulé vingt ans environ auparavant. Claire ! C’est Claire, qu’il a fréquenté durant quelques semaines et qu’il avait perdu de vue lorsqu’il avait été muté en province. Il n’avait pas répondu à ses lettres, et la vie avait fait qu’il s’était marié avec Marie et depuis divorcé. Son séjour va être mouvementé, riche, si l’on peut dire, en événements troublants, car outre cette nomination surprise qu’il n’accepte pas de bon cœur, son passé ressurgit apportant son lot de stupéfactions. Cinq jours dans la vie d’un homme, c’est court, et c’est long. Cela dépend de ce qu’il se passe, et Le Stang les trouvera très longs ces jours qui défilent pourtant à toute vitesse, ponctués d’incidents en tous genres, dont une tentative de meurtre par balle à laquelle il échappera. Et les questions fusent encore plus. Surtout lorsqu’une affaire bordelaise dont il s’est occupé quelques mois auparavant ressurgit inopinément, établissant un lien ténu avec ce qu’il lui arrive. Mais par quel bout prendre ce lien. Comme c’est un membre bien placé dans la Grande maison, et qu’il sera secondé activement par des collègues, aussi bien à Bordeaux qu’à Paris, il peut fouiner dans les archives, établir des écoutes téléphoniques, accéder à certains dossiers, tous privilèges dont ne bénéficie pas le commun des mortels. Breton pure souche, Roch Le Stang s’érige comme un roc, un menhir, ne laissant que peu de place aux émotions. Pourtant au cours de ces cinq journées, il passera par de nombreux sentiments qui l’amèneront à réfléchir et à étaler des troubles qui lui étaient inconnus, ou enfouis au plus profond de lui-même. Patrick Tudoret décrit avec réalisme les tenants et aboutissants de la maison Poulaga comme aimait à décrire San-Antonio la fonction policière, mais en haut de l’échelle. Et comme il ne peut y avoir une histoire sans méchants, sans flic pourri, il en met un en scène, mais ce n’est pas le principal. Tout tourne autour du ministère de l’Intérieur et des différents organismes qui régissent le système policier. Et comme apparemment il connait bien la boutique de l’intérieur, il ne peut s’empêcher de dénigrer les séries et fictions policières françaises, les jugeant peu réalistes, voire peu crédibles. Là-dessus, je n’émettrai aucun jugement, n’étant pas téléphage. Mais les séries américaines sont-elles tout autant crédibles ? Il faut du sensationnel pour attirer le téléspectateur, et moi, je n’adhère pas du tout. Je préfère les bons vieux flics à la Maigret, c’est plus reposant, mais ceci n’est qu’une question de sensibilité. Et l’on sait que ce qui est peu crédible approche souvent de la réalité que l’on ne veut pas voir ou nous montrer.
|
|