The Main, c’est l’artère principale de ce quartier de Montréal dans les années soixante-dix. Chaque jour, chaque nuit, le lieutenant LaPointe l’arpente. L’homme connait toutes les prostitués, tous les dealers. Il surveille d’un œil en coin les hippies qui trainent, déserteurs américains fuyant la guerre du Vietnam. Il ne laisse passer ni une provocation, ni une insulte, et quand il présume qu’aucune sanction juridique ne fera suite à un petit délit, il préfère exercer sa propre justice. Trente ans déjà qu’il use ses semelles sur le boulevard. Le soir, il rentre dans un appartement vide depuis que sa femme est morte. Les mardis et les jeudis, il va jouer aux cartes avec deux vieux commerçants juifs et le curé de la paroisse. LaPointe est infiniment las. Il voit « the main » changer, disparaitre. Le policier se sent épuisé, lui, le ciment qui fait encore tenir ensemble les morceaux du quartier à l’équilibre fragile. Le jour où un corps est retrouvé dans « son « secteur, LaPointe en fait son affaire personnelle. Le jeune stagiaire qu’on lui adjoint, d’abord affecté à rattraper la paperasserie en retard, va progressivement assimiler la « méthode LaPointe ». Cela ne se fait pas sans carambolage épineux entre le diplômé et l’homme de terrain. Le personnage de flic humaniste, son introspection rigoureuse, son mal de vivre cantonné aux rêves de la vie qu’il aurait pu avoir, sont infiniment émouvants. Savoureux, le langage truffé de parler joual, comme ces «« robineux », clochards qui fuient le froid de l’hiver canadien. Avec Trevanian, les personnages secondaires sont essentiels, libérant peu à peu les informations qui éclairent progressivement le personnage du flic. Après les aventures de Jonathan Hemlock esquissées à grands traits d’un pinceau vigoureux dans « L’Expert », Trevanian offre dans « The Main » un dessin minutieux à la plume. Un bonheur à ne pas se refuser, qui chante avec l’accent joual.
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