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JAN THIRION |
Du Côté Des AbattoirsAux éditions L'ECAILLER |
2718Lectures depuisLe mercredi 28 Juin 2012
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Une lecture de |
« Du côté des abattoirs » est le grand frère, réécrit et développé de « Ego Fatum » -éditions Krakoen 2007- qui, juste après « Mikko » avait marqué l’entrée de Jan Thirion dans le monde littéraire.Cédric Mangata est flic. Il vit depuis quelques mois avec une jeune femme, mère d’une ado. Las, les charmes de la Lolita ne laissent pas Mangata tout à fait indifférent. Ses brèves idées lascives vont se solder par une suite de calamités débutant par la mort accidentelle de la jeune fille, et se terminant dans un tourbillon de folie. Peut-être que rien ne serait arrivé si le policier n’avait eu affaire à un serial killer planqué dans la peau d’un artiste contemporain, et si une grosse araignée poilue n’avait nargué tout le monde en courant sur les murs blancs… La réécriture a subtilement resserré le fil de la narration déjà fort économe de Jan Thirion. Ce texte, du coup, tire son efficacité de sa sobriété d’écriture alors même que le thème courtise le baroque. Constant allers-retours entre le caractère dingo des mésaventures du flic et la sécheresse du style.Voici ce que je disais de la première mouture en 2007 :Ego Fatum mérite le détour. Son flic est une catastrophe ambulante, le genre dont on souhaite surtout ne pas devenir l’ami ou alors, s’il vous connaît, qu’il perde au plus vite notre numéro de téléphone. J’aime beaucoup le style de Thirion, économe d’effet, mais plein d’efficacité. Il vous embarque l’air de rien dans un sacré toboggan et le seul regret c’est quand ça s’arrête. Tout commence et tout finit avec une araignée qui sème la panique. Sans compter la poisse qui a élu domicile sur les épaules d’un flic abruti par les médicaments depuis une agression subie quelques jours auparavant. C’est à hurler de rire, sauf qu’on regarde soigneusement derrière sa porte avant d’éteindre la lumière le soir, des fois qu’une araignée s’y cache …Le remaniement du texte a considérablement noirci cette cascade improbable de calamités, ou alors, j’avais surtout gardé à l’esprit son côté burlesque. Car c’est terrible, et c’est drôle en même temps. A chaque nouvelle rencontre de Cédric Mangata, on sait que le destin, accroché à ses basques, va trancher le fil des Parques d’un de ses contemporains.Unité de lieu : Toulouse. Unité d’action : les conséquences de la rencontre funeste avec une araignée, rendue aussi dévastatrice qu’une bombe atomique en raison des faiblesses bassement humaines du héros. Unité de temps : tout se passe au cours d’une seule et même nuit. C’est en raison de ce classicisme moqueur que je garde une tendresse pour le premier titre « Ego Fatum », même si je salue le travail de Jan Thirion dans cette réédition.En même temps, je me réjouis de la perspicacité des éditeurs de l’Ecailler. Krakoen se veut une fonction de découvreur, et cette réédition souligne le travail initial avec un auteur. A ceux qui n’avaient pas déjà rencontré « Ego Fatum » en raison des tirages limités de la première édition, je ne peux que recommander de se précipiter. Vous rirez, forcément, de ce rire étrange qui se termine dans un rictus de trouille…
Un petit fait insignifiant peut parfois déclencher de grandes catastrophes, c’est bien connu. La rencontre entre Pol R, artiste plasticien complètement givré, et Cédric Mangata, un policier tranquille en apparence, va provoquer une série d’incidents qui vont atteindre un sommet difficilement imaginable. Et pourtant… Pol R, oui comme polaire ou Paul erre, trouve sa voie à huit ans en regardant des poulets congelés. Rien que de plus banal pourtant qu’un gallinacé sans tête dont le corps est mis en bière dans un congélateur. Pourtant c’est en l’examinant que son âme d’artiste s’éveille au monde et il réalise ses premières œuvres en plaçant des insectes dans des bacs à glaçons, au grand dam de ses parents. En grandissant son appétit artistique pour les insectes n’a pas décru, au contraire, il s’est passionné pour des animaux plus imposants et voire même pour des humains. Depuis quelques semaines des cadavres sont retrouvés dans des congélateurs, et l’inspecteur Cédric Mangata est chargé de cette affaire toute chaude. Pour mieux comprendre, il se place la tête dans le compartiment congélation de son frigo, quitte à prendre froid. Or c’est en relevant la tête qu’il aperçoit une affiche concernant une exposition consacrée à l’art de l’âge glaciaire : Un monde gelé. Comme justement ses neurones ne sont pas attaqués par le froid, aussitôt une corrélation s’effectue dans son cerveau et il décide de visiter le musée d’art moderne des Abattoirs, sis à Toulouse, en compagnie de son chef. Une visite pleine d’enseignements. Il convoque alors Pol R à son bureau. Ce qu’il ne sait pas c’est que l’artiste possède un don, celui d’hypnotiser ses victimes. Pol R oblige le policier à exécuter un salto arrière. Une figure impeccablement réalisée mais la chute est dure. Cédric Mangata se réceptionne la tête sur un radiateur et il tombe dans les pommes. Bénéficiant d’un congé maladie, il ne se souvient plus de ce qui lui est arrivé et il se repose tranquillement chez lui. Une impulsion l’oblige à monter l’escalier du duplex où il vit avec sa compagne Delphine afin de s’inquiéter de ce que peut faire Milly seule dans sa chambre. Milly c’est la fille de sa compagne, et sans avoir des idées pédophiles, il est toutefois troublé par cette jeunette. Auparavant il s’arrête aux toilettes afin de procéder à une miction bienfaisante lorsqu’il est interrompu par des cris. Milly se tient sur la mezzanine, apeurée à la vue d’une araignée. Un faux mouvement et l’adolescente passe par-dessus la rambarde. Il descend rapidement l’escalier mais il ne peut rien faire. Milly est décédée. Delphine entre à l’improviste et devant le spectacle qui se présente à elle, elle ne peut maitriser sa fureur : Cédric a remonté le débardeur sur la poitrine de Milly, ce qui prête déjà à confusion. Seulement dans sa précipitation, Cédric à omis de se rebraguetter et son organe reproducteur et urinaire est à l’air. Delphine ne veut pas écouter les quelques explications bafouillées par Cédric et elle s’empare d’une arme à feu. Hélas, en essayant de neutraliser sa compagne en furie, Cédric la tue. Et de deux ! Une cascade de morts vont parsemer cette histoire au cours de laquelle Cédric en devient l’inspirateur malheureux. Jan Thirion, qui nous avait déjà offert des romans déjantés, nous propose cette fois un roman totalement débridé. Je m’explique : la plupart du temps, ses divers protagonistes sont asiatiques et évoluent soit au Vietnam ou dans l’ancienne Indochine ou ont un rapport avec ces pays. Mais ici point de références à l’Extrême Orient. Tout se déroule à Toulouse et nous avons droit à une visite virtuelle du Musée d’art Moderne et Contemporain pour une exposition inédite et forcément temporaire, sujette aux coupures néfastes de courant. Jan Thirion nous ramène aux plus belles heures du Grand Guignol, mariant, références artistiques obligent, le rouge et le noir, couleurs chères à un certain Henri Beyle. Un roman jubilatoire, et l’on se demande avec appréhension, si, si ! comment va se terminer cette histoire et quel sera le sort de Cédric Mangata. Une histoire glaciale ! |
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