|
|
KATE SUMMERSCALE |
L'affaire De Road Hill HouseAux éditions CHRISTIAN BOURGOISVisitez leur site |
1688Lectures depuisLe mardi 2 Juillet 2008
|
Une lecture de |
Le crime a lieu dans la nuit du 30 juin 1860 à Road Hill House, propriété située aux confins du Wiltshire et du Somerset. Le petit Saville Kent, à peine quatre ans, fils du maître des lieux, Mr Kent, a disparu. Élizabeth Gough, sa nurse, donne un peu tardivement l’alerte, croyant l’enfant dans la chambre de sa mère. On découvre bientôt le cadavre de Saville dans des latrines proches. Il a été égorgé et mutilé. Si une fenêtre du salon a été entrouverte, il est possible mais improbable que le meurtrier soit venu de l’extérieur. Soupçonnant vivement la nurse, les enquêteurs locaux voient d’un mauvais œil l’arrivée d’un détective de la police londonienne. Âgé de 45 ans, Jonathan “Jack” Whicher est un détective confirmé, appartenant à l’élite de la police. Observateur attentif ne manquant ni de sagacité, ni d’instinct, Jack Whicher ne tarde pas à reconstituer l’évidence des faits. L’hypothèse impliquant Élizabeth Gough ne repose sur rien de tangible. Par contre, l’organisation familiale est ici particulière. Après le décès de sa première épouse, Mr Kent s’est remarié avec leur ancienne gouvernante. Whicher remarque que les enfants du second mariage sont mieux traités que les aînés, du premier. Si le jeune William Kent est très affecté par le meurtre de son demi-frère, sa sœur Constance parait bien moins touchée. À 16 ans, Constance Kent possède un caractère indifférent, et même durement volontaire. De précédents incidents le démontrent. Elle ne s’est jamais attaquée publiquement au petit Saville, mais l’aimait peu. Whicher s’intéresse à une chemise de nuit manquante, celle de Constance, qui a pu être tachée de sang. Des amies de la jeune fille témoignent qu’elle aurait la force de tuer. Mais, faute de preuve, et grâce au plaidoyer d’un excellent avocat, Constance est libérée sous caution. C’est un fiasco pour Whicher. L’hostilité des policiers locaux, les rumeurs visant la nurse et Mr Kent, les campagnes de presse de plusieurs journaux favorables à Constance, sont cause de cet échec. L’affaire enflamme le pays. Malgré tant de cas avérés d’infanticides, le public pense Constance innocente. On préfère penser que la nurse avait un amant, Mr Kent ou un voisin, formant avec un couple de meurtriers. De retour à Londres, Whicher et ses collègues reçoivent quantité de lettres, exposant des hypothèses variées, rarement sérieuses. Le détective reste convaincu de ses conclusions... Je partage totalement l’enthousiasme de l’écrivain Hervé Jaouen, qui m’a conseillé ce livre. Il s’agit d’une histoire criminelle bien réelle, retracée avec une magnifique précision par Kate Summerscale. On comprend que toute la Grande-Bretagne fut captivée par ce cas, ce qui entraîna quelques vives polémiques. Le rôle des détectives de la police fut contesté. On rappela l’inviolabilité du foyer anglais, fondement de la société victorienne. On développa les positions psychologiques de l’époque. Mais, surtout, cette affaire inspira les plus brillants romanciers, tels Wilkie Collins ou Mary Élizabeth Braddon. Même Charles Dickens fut troublé par ce dossier, admirant les détectives tout en défendant l’accusée. Si ce n’est pas exactement un roman, cette reconstitution soigneuse est vraiment remarquable, à tous points de vue passionnante, tant sur le plan historique que judiciaire. Un ouvrage de qualité supérieure ! |