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JEROME SUBLON |
Corps Rouge Dans Le VercorsAux éditions DU CAIMANVisitez leur site |
153Lectures depuisLe vendredi 23 Novembre 2018
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Une lecture de |
Commissaire de police, Aglaée Boulu est en poste à Grenoble. Elle est chargée d’une enquête dans la région de Villard-de-Lans. Patron d’une grosse scierie et chasseur ayant une réputation de paillard, Anselme Delmare a été découvert mort par son jeune ouvrier Fabien Dourgues. Scène macabre : le corps de la victime a été scié en deux dans l’usine inoccupée ce dimanche-là. Pour Aglaée Boulu, le plus simple consiste à s’installer dans une auberge des environs, où elle sait que les clients sont choyés. Ayant recueilli Choupa, le chien de la victime, la policière annonce le meurtre à Suzie Delmare, désormais veuve du patron de la scierie. Celle-ci ne paraît pas choquée ni émue par ce décès sanglant. Elle prendra bien vite la relève afin que se poursuive l’activité de son mari. Mais la situation de l’entreprise était loin d’être aussi saine qu’il semblait, Delmare étant endetté. Le forestier Simon Campan ayant eu voilà peu un différend commercial avec la victime, il pourrait faire un bon suspect – encore que ce soit improbable. C’est plutôt Marc Vauché qui peut tirer parti de la mort de Delmare. Marié à une amie de Suzie Delmare, il avait prêté une forte somme au défunt, et couvrira la dette en récupérant la scierie. La veuve va tenter le maximum afin que ça ne se produise pas, mais ce sera compliqué. Sans doute le jeune et ambitieux Fabien Dourgues est-il son amant. Toutefois, ce dernier ne pense pas que ce soit par la force qu’ils trouveront une solution. À l’auberge, la commissaire a plus ou moins sympathisé avec le comte Danjou, un aristo local connaissant la région et l’état d’esprit d’ici. C’est alors que Francesco Falcone, commandant de police corse et ami intime d’Aglaée Boulu, fait son retour dans la vie de la policière. Existe-t-il un rapport entre la mort – supposée accidentelle – d’Eugénie Catel, gardienne de troupeau âgée de quatre-vingt-douze ans mais toujours vaillante – et le meurtre d’Anselme Delmare ? Deux morts violentes en moins d’un mois dans ce secteur, c’est assez troublant. En fait, la population a déjà désigné son coupable : François Rébac, instituteur au village, très apprécié des enfants, qui a le défaut d’être d’origine citadine. On n’hésite pas à manifester face au maire et à la commissaire pour l’affirmer. Rumeurs et commérages, plus qu’éléments concrets, à vrai dire. C’est encore le jeune Fabien qui va découvrir la deuxième victime : le forestier Simon Campan a été agressé sur son tracteur alors qu’il travaillait dans son champ, avant d’être assassiné. À l’évidence, il s’agit du même coupable. Ça ressemble davantage à une série de vengeances qu’à autre chose. Tandis que Suzie Delmare s’évertue à garder la scierie – même s’il ne provoque rien, Fabien espère bien que ça lui sera profitable, la commissaire Aglaée Boulu (avec le chien Choupa) et Francesco Falcone poursuivent toutes les pistes crédibles. Les témoignages ne sont que relatifs, et il faut éviter que les habitants s’excitent davantage. C’est plus sûrement un épisode du passé qui justifie ces crimes… (Extrait) “L’homme se mit lui aussi à se mouvoir. Il leva son morceau de bois au ralenti, comme on le fait d’une masse pour cogner un coin planté sur une bûche que l’on veut fendre. Le choc produisit un son mat. Le crâne de Simon s’enfonça dans les brins de blé fauchés. Ce deuxième coup l’avait tétanisé mais il avait conservé sa lucidité. Il assista inerte à la suite. Il vit son agresseur s’accroupir, poser son bâton, leurs regards se croisèrent un temps qui lui semblait sans fin. L’homme prit Simon par les bras et le traîna à la lisière du champ, là où attendait le matériel qui devait faire suite à la moisson…” La littérature policière inclut diverses formes, sociétales ou énigmes pures, mais le roman d’enquête traditionnel est toujours une de ses valeurs sûres. C’est ce que choisit Jérôme Sublon pour nous raconter cette affaire. Après les deux tomes de “Nozze nere” (Éd.du Caïman) dans le décor corse, c’est dans les montagnes du Vercors qu’il situe cette nouvelle affaire. Même dans une France qui s’est beaucoup urbanisée, ces communes rurales ne changent pas tant. "Vox populi" a tôt fait de choisir un responsable, de préférence quand il vient d’ailleurs. Et les sourdes rancœurs peuvent rester vives. Éternel facteur humain ! Aglaée Boulu se montre plutôt flegmatique, observant sans juger, ne précipitant pas des conclusions qui seraient erronées. La narration soigneusement détaillée n’en est pas moins fluide, dans un climat sans lourdeur inutile. On suit donc avec grand plaisir les investigations de cette sympathique policière. |