Laure est mourante, c'est du moins ce que lui ont pronostiqué les médecins. Elle se rend à sa séance de chimio quand, dans les vitres transportées par un camion, elle voit le reflet d'un bras de femme en train d'égorger un homme, avec un couteau à pain. En rentrant de sa séance, elle s'arrête dans la pharmacie qui se trouve en face de la scène qu'elle a entraperçu, et, alors qu'elle se repose en attendant ses médicaments, une femme rentre, coupée, ensanglantée. Quand la pharmacienne lui demande comment elle s'est coupée, Laure ne peut s'empêcher de dire : « avec un couteau à pain ».
Très beau texte, très sombre, qui plonge le lecteur dans cet univers entre cauchemar et réalité de cette femme qui souffre, obtient de temps en temps quelques moments de rémission, pour replonger dans l'épuisement, la douleur, et la fuite d'une vie devenue trop dure. Cet état superbement rendu est en accord avec le personnage en permanence à la limite de la folie de Djamila, qui pour d'autres raisons, fuit elle aussi la réalité. François Salvaing mat très bien en scène la complicité qui naît entre ces deux femmes blessées, nous en laisse à peine entrevoir le côté malsain, fait presque croire à un retour à la normalité, avant d'enfoncer définitivement ses deux personnages et le lecteur, dans un final qui laisse sans voix.
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