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MARK SAFRANKO |
Travaux ForcésAux éditions 13E NOTE |
1199Lectures depuisLe jeudi 4 Janvier 2013
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Une lecture de |
Né fin 1950 à Trenton (New Jersey), Max Zajack ne tient nullement à aller faire la guerre au Vietnam, en ce début des années 1970. Par contre, Max s’imagine futur écrivain célèbre, bien qu’il n’ait encore rien écrit de concret. Pour l’heure, il doit se contenter de jobs médiocres pour survivre. Ayant été viré de la fabrique de bière qui l’employait, Max opère un repli stratégique chez ses parents, Jake et Bash, à Trenton. Pas de tendresse à attendre de leur part, vu qu’ils voient leur fils comme un pur raté. Ne sortant ni d’Harvard, ni de Princeton, issu d’une famille d’ouvriers d’une ville industrielle sordide, n’ayant aucune relation dans les milieux littéraires, Max s’entête malgré tout à croire en son avenir d’écrivain. Ses lectures multiples sont ses bouées de sauvetage, surtout l’œuvre d’Henry Miller. Pour le reste, Max enchaîne les boulots les moins passionnants du monde. Après avoir fait du démarchage téléphonique sans espoir, c’est dans une banque qu’il décroche formation rémunérée. La vérification comptable ne risque pas de le mettre en transes. Traînant un peu trop avec ses copains, il est de plus en plus souvent en retard. Guère assidu, Max en profite pour lire en cachette. On ne va pas le garder à la banque, d’autant qu’un incident sans rapport avec lui l’oppose aux vigiles de l’établissement. Tant d’écrivains ont commencé par le journalisme. Max postule donc dans un quotidien, où il s’occupera des sports. On lui trouve un autre journal pour l’employer, à Philadelphie. Aucune chance de sympathiser avec son supérieur, exigeant et même caractériel. Rétrogradé aux infos générales, il ne va pas vraiment briller. Des incendies, la mort d’une marginale sexy, l’interview d’une voyante, pas de quoi calmer son chef. Qui le virera sous un prétexte. Côté relations féminines et sexuelles, Max subit un certain blocage. Si sa chaude collègue Lindsay finit par de désinhiber, il fait ensuite un flop en tentant de plaire à la belle Babette. Août 1974, Richard Nixon démissionne après le Watergate, et la menace d’être envoyé au Vietnam s’estompe pour Max. Un job vite abandonné dans un fast-food, un autre de livreur d’annuaires où il est impossible de tenir le rythme, ça ne s’arrange pas. Avec des potes, ils vont monter un groupe musical, les Fat Paycheck, pour lequel Max écrit quelques chansons. Se produisant dans les bars glauques, entre bagarres et coups de feux, impossible d’espérer devenir des rock stars. Un manager sévère leur donne le coup de grâce, ne leur trouvant pas le moindre talent. Les galères ne sont pas près de cesser pour Max, qu’il s’agisse d’emplois ou de femmes… Nul doute que le héros Max Zajack soit l’alter ego de l’auteur, qui nous raconte ainsi les tribulations erratiques de ses jeunes années. C’est le quatrième titre de Mark SaFranko retraçant le parcours de cet anti-conformiste, dans une Amérique qui lui correspond si peu. Un pays puissant, malgré le cuisant échec du Vietnam et les déboires de son président, où gagner sa vie n’a rien de facile pour un type sous-qualifié comme ce rêveur. La tonalité pourrait être terriblement sombre. Se faire virer, pour lui, c’est le plaisir de retrouver la liberté. On aura compris que le récit baigne dans l’autodérision, Max persévérant dans ses impasses. L’écriture d’une admirable souplesse et des chapitres courts, voilà qui donne envie au lecteur de suivre le narrateur dans ses mésaventures. On ne peut classer ce livre parmi les polars et les romans noirs, encore qu’on se rapproche de ces derniers. Néanmoins, outre les références livresques de Max, il nous narre un épisode qui met en scène la ténébreuse Patricia Highsmith, bel hommage. Mark SaFranko, un excellent écrivain digne de figurer dans la liste des auteurs actuels à retenir. |