|
|
HERVE SARD |
MorsalineAux éditions KRAKOENVisitez leur site |
2759Lectures depuisLe jeudi 13 Mai 2010
|
Une lecture de |
Le commissaire Czerny et sa fine équipe de la police nantaise sont chargés d’un double meurtre. Surnommée “Morsaline”, la clinique La Bruyère est une maison de repos située à Kerande. Deux patients y ont été assassinés par balle. Le premier, Duclois, a été retrouvé mort sur un banc du parc. C’était le fils dévoyé d’un important homme d’affaires de la région. Arrogant et plutôt détestable, Duclois-fils allait être exclu de la clinique pour avoir eu des relations sexuelles avec une autre patiente, Évelyne Evans. Celle-ci a quitté l’établissement. L’autre victime était un type assez ordinaire. S’il avait eu des ennuis avec la justice, ce Berthomieu apparaissait surtout comme un affabulateur sympathique. Tels sont les premiers éléments recueillis par Czerny et son adjoint Mazurelli, auprès des soignants de la clinique. Faute de meilleur suspect, Chauvin, voisin de chambre de Berthomieu, est considéré comme le coupable. Ce qui chiffonne le policier Mazurelli, c’est la différence de classes sociales entre les deux victimes. Czerny admet qu’on ne tue pas deux individus si éloignés sans qu’il existe un lien entre eux. De son côté, leur collègue Carol Joly enquête sur le meurtre d’un maître chanteur nantais, se faisant appeler de Broglie. Elle espère que la clé USB de la victime lui livrera des noms. Les fichiers sont codés, et d’autres risquent d’être effacés par une mauvaise manipulation. Carol acquiert vite la conviction que le tueur s’est servi d’une arme professionnelle. Czerny rencontre le mari et la fillette d’Évelyne Evans, qui n’est récemment passée qu’en coup de vent chez eux. Son comportement la rend fort suspecte, sauf que la jeune femme n’avait aucun motif d’abattre Berthomieu. Tandis que Czerny subit la pression de sa hiérarchie afin d’épargner le puissant Duclois-père, il charge Mazurelli de retrouver la piste d’Évelyne Evans. Il s’avère que le maître chanteur a été tué avec la même arme que les deux victimes de la clinique. Certes, selon l’autopsie, les horaires concordent de façon très approximative. Czerny demande à Carol Joly d’infiltrer la clinique, en se faisant passer pour une patiente. Grâce à sa voisine de chambre Sévérine, Carol est bien adoptée. Elle observe et écoute, ressentant quand même le climat oppressant des lieux. Par un ex-amant d’Évelyne, le policier Mazurelli obtient une adresse, et tente de prendre la jeune femme en filature. Pas si simple, au point que Mazurelli disparaît brusquement, ce qui inquiète Czerny. Une visite à la propriété de Duclois-père n’apporte guère d’éclaircissements au commissaire. Dans l’ombre, plusieurs personnes suivent de près l’évolution des affaires en question. Même si la police croit avoir identifié le tueur, rien n’est certain… On retrouve ici le singulier commissaire Czerny, qui enquêta dans “La mélodie des cendres” (Krakoen, 2008). Personnage décalé, raisonnant selon sa propre logique à base de cubes, vivant en couple avec un mainate alcoolique, ce drôle d’enquêteur est entouré de collaborateurs non moins originaux. Leurs méthodes sont sans doute un peu bavardes, et leurs suppositions souvent hasardeuses. Ils progressent comme dans le labyrinthe, se heurtant à plus de questions que de réponses. Néanmoins, ils finiront pas démêler l’imbroglio, quitte à ne pas trop insister sur les preuves à fournir. C’est à travers les personnages (quantité d’intervenants dans cette histoire) et l’ambiance (entre autres, le contexte de la clinique “Morsaline”) que l’auteur fait évoluer l’affaire, plutôt qu’en décrivant une enquête classique. Il suffit de se laisser entraîner pour apprécier ce foisonnant roman. La narration enjouée apporte une tonalité très agréable.
Deux patients à l’état de cadavres dans une clinique psychiatrique, découverts en à peine 48 heures d’intervalle, cela pourrait passer pour une coïncidence, mais que les deux hommes soient décédés d’une balle de gros calibre dans le cœur, cela ressemble fort à des assassinats. La clinique des Bruyères, appelée aussi Morsaline, a vu décroitre ainsi son nombre de patients, de toute façon une place aussitôt libre, une place aussitôt occupée, mais ce genre de publicité, même gratuite, n’est jamais bonne pour la réputation d’un établissement privé. Le premier cadavre est celui de Duclois, fils de Duclois, important et riche homme d’affaires nantais. Il a été découvert allongé sur un banc, en fin d’après-midi le samedi. L’autre trépassé est Berthomieu, qui a déjà connu les honneurs des fichiers de la police et par voie de conséquence les bienfaits d’une mise hors soleil de façon temporaire. Il gisait sous son lit, l’arme du crime sur sa poitrine. Les deux hommes ne s’étaient pas présentés au repas du samedi soir. Chauvin, son voisin de chambre, dormait comme un bienheureux. Tels sont les premiers renseignements obtenus auprès du directeur de l’établissement et du personnel soignant par le commissaire Czerny et son adjoint Mazurelli, convoyés par Colin le poisson pilote, de Nantes à Kerande. Durant ce temps le lieutenant Carol Joly, surnommée Joss, comme Randall, planche sur une autre affaire. Alors qu’elle se rend chez De Broglie, de son vrai nom Broc, elle a été devancée par des flics qui eux-mêmes ont été précédés par un tueur. L’homme était un maître-chanteur notoire et parmi les détritus gisant dans la poubelle, Joss trouve une clé USB, ce petit truc qui emmagasine plus dans ses entrailles que dans l’Encyclopaedia-Britannica. Elle confie le petit bijou à Pastèque, le rat de laboratoire local qui se déplace à l’aide d’une trottinette à cardan, ce qui n’est pas sans dommage pour la moquette neuve tachée du café expulsé des gobelets lors de son passage. Et que font pendant ce temps les autres membres de la brigade ? Ils sont à la recherche d’un tueur de petites vieilles qui dépose un doigt coupé, sans fondement, dans une ouverture non pas destinée à ingérer des aliments, mais plutôt à les expulser. L’analyse balistique de l’arme et des douilles retrouvées démontre que le revolver a servi à perpétrer les trois meurtres, je récapitule : Duclois, Berthomieu et de Broglie. Sans aucun doute existe-t-il une corrélation, mais laquelle ? Et les empreintes digitales de Chauvin figurent sur l’arme. Il semblerait que les deux internés, qui bénéficiaient toutefois de bons de sortie, et l’escroc ne se connaissaient pas. Une autre piste à explorer, celle d’une femme qui aurait eu des rapports plus qu’aimables avec Duclois. Elle a disparu et son mari ainsi que sa fille sont inquiets. Mazurelli pense l’avoir repérée mais elle lui file entre les doigts. Czerny est en colère, non pas à cause des défaillances de ses subordonnés, mais parce que son supérieur, Lapeyre et un seul suffit, lui demande de mettre la pédale douce, Duclois père ayant des accointances haut placées. Ce roman ne manque pas de situations cocasses et les personnages représentant la force publique dans toute sa grandeur sont dissemblables au possible. Si Mazurelli est la réplique vivante d’un rocker des années 50, se déplaçant à l’aide d’une Harley, arborant sa banane comme un trophée, Czerny lui est nostalgique des années 60, roulant toujours en Solex, un cycle qu’il a appelé Galet, et possède un mainate, Willie, qui enfile tous les soirs trois verres à dé de Martini, avec une paille, et se goinfre d’une soucoupe de cacahouètes. De plus Czerny est handicapé à cause d’une mauvaise chute ce qui lui a occasionné une fracture du péroné, et depuis il ne peut se passer de ses béquilles. Pour les âmes sensibles je préciserai que Galet n’est atteint d’aucune blessure. Colin lui est affligé de difficulté d’élocution et pour se faire comprendre intelligiblement, il doit éructer des « Nom d’un chien » afin de recouvrer une élocution verbale normale. Les pensionnaires de la clinique ne sont pas présentés caricaturalement mais avec une certaine sympathie. Il s’agit de névrosés et d’alcooliques en repentance, dont les neurones s’enfoncent dans un passage qui s’avère un sens unique se terminant en cul-de-sac. Parfois ces neurones trouvent une échappatoire et alors les patients se conduisent comme monsieur Tout le monde, pour les hommes, et pour les femmes comme Madame… A signaler toutefois une toute petite erreur, une coquille probablement, Charles Martel n’a pas arrêté les Sarrazins à Poitiers en 932 mais en 732. C’était la minute offerte pas l’Education Nationale. A méditer : « On ne risque rien, quand on rêve. Tout au plus, on peut tomber de son lit ». |
Autres titres de |