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GUY RECHENMANN |
Même Le Scorpion PleureAux éditions CAIRNVisitez leur site |
555Lectures depuisLe mercredi 2 Mai 2018
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Une lecture de |
Collection Polar Cairn. Parution le 27 février 20180. 232 pages. 16,00€. Et ce ne sont pas des larmes de crocodiles ! C’était un p’tit gars, qui s’appelait Anselme, l’avait pas d’papa, l’avait pas d’maman… Être né sous X, c’est un handicap, et Anselme Viloc, quadragénaire et inspecteur de police, ne s’y résout pas. Mais avoir été déclaré à l’état-civil être né sous X, pas de maman connue, et sous Y, pas de papa non plus, cela lui pollue de plus en plus l’esprit. Des réminiscences qui s’accentuent lorsque son ami Augustin, pêcheur pendant soixante ans, soixante-seize ans au compteur, décède brusquement d’une rupture d’anévrisme. Une fin de non recevoir sur terre qui intrigue Anselme, car selon toutes vraisemblances Augustin était en excellente santé, et qu’il venait de vendre sa maison en viager. C’est donc qu’il supposait en récolter les fruits durant encore un nombre respectable d’années. Et ce qui indispose Anselme, ce n’est pas la présence du débit-rentier lors de l’inhumation, mais ce petit air de satisfaction qui éclaire sa face, ce petit sourire ironique qu’il arbore. Raphaël Tournebise, qu’il se nomme le faquin. Anselme se souvient avoir prêté à Augustin quelques CD, notamment un de Didier Lockwood auquel il tient, aussi il se rend chez Augustin. Il en profite pour regarder les aîtres, et se rend compte que la pièce à vivre est quelque peu chamboulée. Augustin avait pour habitude de se reposer dans son fauteuil, près de la cheminée, Pompom, le chat rouquin confortablement installé sur ses genoux, et regarder la forêt non loin et la mer. Surgit alors le gominé, alias Raphaël. Il en parle à son amie, la petite Lily, toujours de bon conseil, puis un dimanche soir, il va se restaurer à l’Escale, avec Sylvia sa compagne et Noémie, leur fille. C’est alors que David, le restaurateur, lui fait part qu’une mamie, trois mois auparavant, est décédée dans les mêmes conditions qu’Augustin. Rupture d’anévrisme peu après avoir mis sa maison en viager. Des viagers, ce n’est guère courant, et des morts similaires non plus. Anselme est en vacances, il en profite pour enquêter sur ces décès suspects à ses yeux et en parle à son ami et collègue Jérémy ainsi qu’à son patron du commissariat de Castéja. L’heureux débirentier est un trentenaire, tout comme Tournebise et lorsqu’Anselme se rend sur place, il est fort étonné de voir que la bâtisse va être transformée. Par un architecte de la région parisienne, accoquiné avec un notaire de Neuilly. Puis c’est un troisième décès qui lui est signalé. Son patron est d’accord pour lancer une procédure officielle, mais peu après le juge préfère classer l’affaire sans suite. Pas assez de preuves probantes. Que des coïncidences, selon lui. Pour autant Anselme est toujours tourneboulé par son problème de recherche parentale et pour se vider l’esprit, il rencontre un thérapeute qui l’oblige à fouiller sa mémoire vive, à remonter le temps, à fouiller dans son passé, jusqu’à son enfance et même avant. Il rencontre également un sourcier qui le branche sur un radiesthésiste et un astrologue qui lui détaille son thème astral. Scorpion ascendant Gémeau. Pour Anselme ce serait plutôt j’ai mal. Un j’ai mal, des gémeaux. Et le Scorpion est en contradiction avec le Gémeau. L’un est bénéfique tandis que l’autre broie du noir.
Nouvelle enquête pour Anselme Viloc, le flic de papier comme il a été surnommé par son patron de commissaire, enquête dans le milieu des viagers, une pratique peu courante mise surtout en valeur par le film de Pierre Tchernia, Le viager justement, et par l’exemple de Jeanne Calment qui vendit à son notaire, lequel décéda bien avant la brave centenaire. Et des imbrications mettent en cause quelques hauts personnages, dont un, ami du notaire de Neuilly, qui est à l’époque des faits, 1993, député-maire de cette ville siamoise au XVIe arrondissement parisien. Pas de nom, peut-être n’est-ce qu’une coïncidence. Et l’enquête policière d’Anselme l’amène à rencontrer des personnages, tels que le sourcier, le radiesthésiste ou un géobiologue, lesquels vont lui inculquer les notions d’ondes positives ou négatives, de leur influence, des courants qui passent dans le sol, et bien d’autres choses encore, dont je n‘ai retenu que peu de choses, mais qu’il est préférable, par exemple, de mettre la tête de son lit dans le sens nord-sud, et que des points noirs existent dans certaines parties d’une maison qu’il ne faut pas construire en dépit du bons sens. Parallèlement, d’ailleurs les parallèles font parties de cette notion d’ondes, parallèlement, on suit les problèmes personnels et familiaux d’Anselme, et surtout l’acharnement de Sylvia, sa femme, à suivre des cours d’ostréicultrice afin de pouvoir garder leur cabanon situé sur la baie d’Arcachon. Cabanon promis à la démolition si cette bâtisse n’est plus affectée à l’ostréiculture. Le fisc et autres étant de plus en plus restrictifs sur les biens personnels et leur utilisation. Lily, la gamine de douze ans, véritable Pic de la Mirandole, va aider consciemment Anselme dans ses diverses recherches, et, plus étonnant, les chats, de préférence rouquins, vont également se trouver au cœur du problème. Pas uniquement Gédéon, le chat à trois pattes d’Anselme, mais d’autres, qui contrairement aux chiens, savent se débrouiller seuls et possèdent des esprits supérieurs. Mais ça, on le sait, la présence d’un chat dans une maison permet de se débarrasser d’entités malveillantes.
Roman de terroir sortant des sentiers battus, Même le scorpion pleure aborde des thèmes peu utilisés dans un roman policier ou même de littérature dite générale. L’influence des ondes magnétiques souterraines, bénéfiques ou non, les sourciers dont la capacité de découvrir des sources d’eau ou autres relevait autrefois de la sorcellerie et qui maintenant est une spécificité plus ou moins reconnue puisque la géobiologie possède même une école, de même que la recherche du thème astral, étudié scientifiquement bien sûr, procurent un souffle nouveau sur le roman dit policier tendance ésotérique. Quant au commissaire Plaziat, c’est un hédoniste littéraire, aimant à placer dans ses conversations, ses observations, ses conseils vis-à-vis de ses interlocuteurs, des citations empruntées principalement à Victor Hugo mais aussi aux philosophes grecs de préférence.
Si le métier de flic était un couteau suisse, observation et patience seraient, à mon sens, les deux lames indispensables.
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