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RUTH RENDELL |
La Maison Aux EscaliersAux éditions CALMANN-LEVY SUSPENSEVisitez leur site |
1119Lectures depuisLe mercredi 14 Juin 2017
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Une lecture de |
The house of stairs - 1988. Traduction de Isabelle Rosselin-Bobulesco. Parution 1990. Hommage à Ruth Rendell, décédée le 2 mai 2015. Une silhouette de femme entrevue dans la foule, et pour Elizabeth, c’est tout un passé d’angoisse qui remonte à la surface. Cette silhouette c’est celle de Bell, une jeune femme qui a énormément compté dans la jeunesse d’Elizabeth, et plus particulièrement pendant les années vécues dans la Maison aux Escaliers. Une maison toute en hauteur, cinq étages, cent six marches. Une maison achetée par Cosette, drôle de nom pour une riche veuve, et qui sert de refuge à de nombreux parasites, hommes et femmes marginalisés. S’établissent une période de liberté, de sexualité active, une atmosphère de débauche. L’amitié et la camaraderie comptent autant, ou plus, que l’amour sentiment. Cosette a bien eu quelques soupirants mais elle entretient l’obsession d’un amant selon ses critères. Un amant qui se fait attendre. Les jours passent, s’étirent. Un jour, Elizabeth fait la connaissance de Bell. Bell est une énigme vivante, ressemblant étrangement à un portrait peint par Bronzino au seizième siècle et à une héroïne de Henry James décrite dans son roman Les ailes de la colombe. Entre Cosette, la cinquantaine décrépite, récente veuve à la recherche de l’amant insaisissable, Elizabeth traumatisée par une maladie héréditaire, la chorée de Huntington, et Bell, affabulatrice, peut-être responsable de la mort de son mari, peintre raté adepte de la roulette russe, s’établissent des relations plus qu’amicales. Mais un ver ronge le beau fruit. Bell vit maintenant à demeure dans la Maison aux Escaliers. Elle leur présente comme son frère, Mark, un jeune homme qui lui ressemble étrangement. Mark est un acteur, jouant un rôle dans un feuilleton radiophonique. Pour Cosette, c’est le coup de foudre. Et Mark tombe sous son charme vieillissant. Situation qui provoque un effet inverse entre Bell et Elizabeth, leurs relations saphiques s’estompant. Cosette, déjà riche, se retrouve soudain en possession d’une forte somme d’argent quand Mark perd son emploi, son petit rôle dans le feuilleton, seule activité qui le reliait au monde du théâtre. Il informe Elizabeth que Cosette et lui ont décidé de déménager, de vivre ensemble et de vendre la Maison. En aucun cas Bell ne doit être au courant, enfin pas dans l’immédiat. Et puis elle aura une compensation, un petit appartement que lui offrira Cosette. Un soir, alors que Mark, Cosette, Elizabeth. Bell et quelques autres sont conviés au restaurant par un couple d’amis, surgit une femme, Sheila Henryson, qui se présente comme la belle-sœur de Mark. Le pavé dans la mare. Consternation à la tablée. Mark et Bell ne sont pas frère et sœur, mais amants. Ou étaient. A l’origine une méprise de la part d’Elizabeth et que Bell a su exploiter. Mais Mark avoue à Cosette que, de plus en plus, il était réticent à jouer dans cette mise en scène ignoble.
Ecrit à la première personne, ce roman est narré par Elizabeth qui revit ses souvenirs, ses amours, ses amitiés, ce drame également au contact de Bell. Des mémoires où le passé se mêle au présent et où, peu à peu, les zones d’ombre s’évanouissent au fur et à mesure des révélations de Bell : l’assassinat de Silas, son mari, camouflé en accident, ses années de prison, etc. Mais pour Elizabeth, c’est également la révélation ou la confirmation de sa responsabilité directe et indirecte dans ce drame. Ruth Rendell, spécialiste des romans d’énigme dans lesquels la psychologie joue un grand rôle, n’est jamais allée aussi loin dans l’introspection de ses personnages. Des personnages ambigus déchaînant des passions qui se traduisent par des violences morales et une angoisse latente. Cependant, ce roman est un peu comme un anachronisme dans son œuvre. L’étude de caractère de ses personnages pervers, névrosés, psychopathes est comme à l’habitude extrêmement fouillée mais la façon de les décrire présente comme un décalage par rapport à ses autres romans et s’érige en marge. Par certains côtés, La maison aux escaliers est un livre dense, poignant, violent ; par d’autres il se révèle décevant. Trop d’introspection, de calculs, pas assez de réalisme. Un roman qui oscille entre l’écriture, le romantisme fin du dix-neuvième siècle et la liberté de mœurs des années soixante-dix. Reste qu’un palier de plus est franchi par cette grande dame qui nous réserve bien d’autres surprises sous le pseudonyme de Barbara Vine.
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