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RUTH RENDELL |
Un Rossignol Sans JardinAux éditions DES DEUX-TERRESVisitez leur site |
1570Lectures depuisLe dimanche 9 Novembre 2014
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Une lecture de |
No man's nightingale - 2013. Tradction de Johan-Frédérik Hel Guedj. Parution le 8 octobre 2014. 304 pages. 21,50€. Cd'est ecomme un sifflet sans son... Lorsque Maxine ne parle pas, elle monologue. Elle ne peut s'empêcher de raconter les potins qu'elle récolte lors de ménages effectués chez les uns et les autres, ou de déblatérer sur untel, de raconter ce qu'il se passe dans sa famille, notamment avec son garçon Jason. Un vrai moulin à paroles qui indispose la plupart du temps ses employeurs. Ce joue là, elle a de quoi raconter à l'ex-inspecteur Wexford, qui essaie de se reposer tout en lisant Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain d'Edward Gibbon. Après avoir longtemps glosé sur son fils Jason, de son emploi de gérant dans une supérette, de sa future belle-fille Nicky et de leur fillette Isabella, elle aborde le sujet de la découverte du corps de Sarah Hussain qui officiait en temps que pasteur dans la paroisse de Saint-Peter à Kingsmarkham. Juste au même moment Mike Burden, son ancien adjoint qui a pris la place responsable de la police de la cité après son départ en retraite, lui demande au téléphone s'il veut le rejoindre au presbytère de la petit église. Peu de témoins, pour ne pas dire aucun pour donner quelques précisions sur cette femme qui vivait seule avec sa fille Clarissa, laquelle n'aura dix-huit ans que dans quelques semaines. Sarah, qui a été étranglée, n'était guère estimée de ses paroissiens, et des autres, pour diverses raisons, qui n'étaient pas forcément de son fait mais de l'aigreur et de l'ostracisme de ses ouailles. Parmi les personnes susceptibles d'avoir commis cet acte, vengeance ou autre, il faut lister Crisp, un vieil homme qui depuis quelques semaines entretenait le jardin du domaine contigu au presbytère; Cuthbert, le bedeau qui accusait presque d'hérésie Sarah Hussain, laquelle désirait changer les façons de procéder durant la liturgie, usant d'un livre de messe pourtant en vigueur depuis des décennies mais qu'il n'avait jamais accepté; Georgina Bray la seule amie connue de Sarah, mais dans ce cas, pour quel motif ?; des inconnus dont un jeune homme tatoué mais à l'identité ignorée, enfin ceux qui trouvaient qu'il n'était pas de bon aloi qu'une femme soit à la tête de la paroisse. En fouillant en compagnie de Burden les pièces du presbytère, Wexford avise une lettre qui sert de marque-page. Il préfère en lire le contenu avant d'en parler à son ami. Cette missive provient de Thora Kilmartin, demeurant à Reading, et dans laquelle l'expéditrice affirme être contente d'avoir retrouvé la trace de Sarah. Les deux femmes avaient fréquenté la même école durant un certain temps, puis Sarah s'était mariée mais son époux était décédé dans un accident de voiture. Peu après Sarah se retrouvait enceinte mais de qui, telle est la question. Elle ne s'était jamais remariée et sa vie privée était restée secrète pour tous, même pour sa fille qui ne devait connaitre le nom de son père que le jour de ses dix-huit ans, soit vers la fin janvier. A cette enquête il faut ajouter les démêlés de Jason et de sa petite famille avec son bailleur, cela eut été trop simple et peut-être trop monotone sinon. Si Burden privilégie la piste Crisp, Wexford ne se focalise pas sur une seule piste, mais tente de débrouiller les omissions, les mensonges, les inventions qui relèvent de la mythomanie. Et cela prend quand même quelques semaines.
Ce roman permet à Ruth Rendell de jeter un regard acéré sur des faits de société et de prôner la tolérance. Ainsi elle décrit soigneusement l'aversion des femmes, mais également des hommes, contre le statut de prêtre de Sarah Hussain, animosité exacerbée par le fait qu'elle possédait des origines indiennes par son père. Pensez donc, un prêtre féminin et qui plus est de couleur... Un racisme qui ne dit pas son nom. D'ailleurs selon un des protagonistes il ne faut pas dire Indien mais Asiatique. Alors certains trouvent inconvenant qu'elle puisse baptiser des enfants, et dans ce cas le moindre petit défaut est monté en épingle, notamment sa propension à prononcer quelques vulgarité ou ce, qu'ils jugent en tant que tel, ou de vouloir inviter un groupe de rock pour animer une messe. De même le mariage entre personnes du même sexe ne lui semblait pas incompatible, ce qui horrifie les âmes bien pensantes. Un roman qui nous ramène à des préoccupations actuelles et aux manifestations qui secouent sporadiquement la société. Les sermons de Sarah Hussain étaient controversés et elle soutenait par exemple les parents célibataires, et prenait la défense des mariages gays. C'était un principe central du christianisme, disait-elle. "Petits enfants, aimez-vous les uns les autres" ce qui vient évidemment du Nouveau Testament, où l'on ne trouve rien sur les homosexuels qui s'aiment les uns les autres. Si l'Eglise s'en tenait à ses principes-là, disait-elle, l'Eglise et les ecclésiastiques, il ne serait jamais question d'interdire aux hommes d'épouser d'autres hommes et aux femmes, d'autres femmes, pourvu qu'ils s'aiment. Ainsi s'exprime Dora, la femme de Wexford, qui analyse les propos de Sarah Hussain et elle est une des rares paroissiennes à comprendre ce qui la motivait à s'exprimer ainsi et surtout à ne pas lui jeter l'opprobre. Mais bien sûr il y a interprétation et interprétation, et comme il est dit, beaucoup voient la paille qui est dans l'œil du voisin, ne voyant pas la poutre qui est dans le sien. Mais pour autant il ne faut pas croire que Ruth Rendell fasse du prosélytisme, mais simplement preuve de bon sens et de tolérance.
Curiosa : A rapprocher le nom d'un des inspecteurs, Barry Vine, à un pseudonyme utilisé par Ruth Rendell, Barbara Vine. |
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