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ALEXIS RAGOUGNEAU |
La Madone De Notre-dameAux éditions VIVIANE HAMYVisitez leur site |
1423Lectures depuisLe vendredi 17 Janvier 2014
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Une lecture de |
Lundi 16 août. À Notre-Dame-de-Paris, la journée précédente a été très chargée, avec la procession traditionnelle de l'Assomption. Ce matin, on ne peut que remarquer cette jeune femme en blanc, court vêtue, priant sur le banc de la chapelle de Notre-Dame-des-Sept-Douleurs. On s'aperçoit bientôt qu'elle est morte, probablement depuis plusieurs heures. Le dossier est immédiatement confié à la magistrate blonde Claire Kauffmann. “Mignonne, froide comme une lame et raide comme la Justice” dit d'elle le commandant Landard, flic depuis vingt-deux ans. Venu du tout proche Quai des Orfèvres, c'est lui qui est chargé de l'enquête. Il est assisté par le jeune lieutenant Gombrowicz. Le légiste leur apprend que le vagin de la victime a été scellé avec la cire d’un cierge. On peut se demander si Mourad, un des surveillants, a bien fait sa dernière ronde avant de boucler la cathédrale. Il certifie que ce fut le cas. Cette jeune fille excitante fut à l'origine d'un incident, la veille. Elle suivait de trop près la procession de la Vierge, selon un jeune homme blond qui est intervenu, la bousculant avant qu'on le maîtrise. Étant sûr qu'il reviendra vite à Notre-Dame, les flics montent une souricière et ne tardent pas à l'alpaguer alors qu'il vient de se confesser. Il se prénomme Thibault. Claire Kauffmann et Landard tiennent leur coupable. C'est peu dire qu'il idolâtre la Vierge Marie. Une perquisition est menée dans l'étouffante maison de la mère de Thibault. La chambre du jeune homme est un singulier musée dédié à la Vierge, mais les dessins qu'il lui a consacré sont nettement moins chastes. Quand Landard pense avoir défini le scénario plausible du crime, Thibault commet un acte qui ressemble à un aveu. Ce qui devrait clore l'enquête, au grand soulagement des autorités ecclésiastiques. Disgracié suite à une maladie infantile, souffrant encore le martyre, marqué par la mort de son frère aîné, le père François Kern est compatissant envers les abîmés de la vie. Comme les prisonniers de la centrale de Poissy, dont le lucide Djibril. Mais aussi les égarés qui fréquentent Notre-Dame, où il est en poste chaque été. Il ne croit pas que l'obsessionnel Thibault ait assassiné la jeune Luna Hamache, étudiante en licence d'Histoire, si tentante qu'elle ait été dans sa courte robe blanche. Même si le SDF Kristof s'exprime dans un sabir polonais, le père Kern pense comprendre le message de ce témoin : “Le péché a pénétré entre ces murs. Il n'a pas eu besoin d'entrer par le trou de la serrure. Tout simplement parce qu'il avait la clé.” Lorsqu'il contacte Claire Kauffmann, affirmant que la victime était attendue à Notre-Dame la nuit de sa mort, est-ce suffisant pour relancer l'affaire ? Certes, il serait facile d'imaginer Kern, 1m48 pour 43 kilos, sous les traits de Quasimodo. Bien sûr, Esmeralda pourrait être ici incarnée par la substitut Claire Kauffmann, aussi bien que par la victime, la belle Luna. Oui, d'autres parallèles avec l'œuvre de Victor Hugo sont possibles. Et Landard serait un cousin de Javert ? Contentons-nous de lire un livre à la fois, celui-ci. Même dans un haut-lieu tel que Notre-Dame-de-Paris, une enquête reste un puzzle à reconstituer, un ensemble de pièces qui finissent par s'emboîter. Pour ce faire, il convient de bien observer les personnages, leurs caractères et leurs failles. Il faut avouer qu'au niveau des protagonistes, l'auteur nous a gâtés. Ainsi, l'affaire serait confiée à une magistrate peu expérimentée et au pire flic de Paris ? Même s'il ne s'agit pas de super-limiers, ce n'est pas si exact et on ne les blâmera pas. Claire n'a jamais évacué le secret qu'elle trimballe depuis près de vingt ans. Si le sans-gêne du rustre Landard n'indique pas le policier d'élite, c'est qu'il souhaite expédier au plus vite ce petit crime. Avec son mal-être, le père Kern n'apparaît pas le plus qualifié pour les investigations. Qu'on appelle ça la Foi, ou de l'obstination teintée d'instinct, il discernera bientôt les vérités masquées. L'essentiel atout favorable de ce premier roman d’Alexis Ragougneau, c'est son écriture fluide et même vive. Sans négliger une construction du récit fort bien pensée. Car on verra que certains “seconds rôles” ont également toute leur place. Voilà un nouvel auteur tout-à-fait prometteur, à découvrir dès maintenant.
Au lendemain de l'Assomption, de blanc vêtue, la morte reposait, comme il se doit, sur un banc de la chapelle de Notre-Dame-des-Sept-Douleurs. Et comme il se doit, son vagin avait été cacheté d’une coulée de cire immaculée, tel un hymen à jamais intact. L’affaire était peu simple et risquait à tout moment de déraper dans l’impie. Par bonheur, un coupable idéal fut vite identifié : un fou de Dieu, adorateur d’une Vierge à la féminité troublante. Au grand soulagement de tous, Notre-Dame-de-Paris put ouvrir à nouveau ses portes aux milliers de touristes à la foi chancelante qui depuis la découverte du cadavre de cette dame en blanc se massaient sur le parvis. Homme de peu de foi en la justice des hommes, un homme d’Église ne se satisfit pas de la version officielle et partit à la recherche de la vérité. Sa route le conduisit jusqu’au bord du précipice, là où servit l’empire des sens, là où s’écrit l’Histoire des hommes… ce lieu de mémoire que balafre cette vieille blessure du temps des opérations de police en Algérie.
Alexis Ragougneau laisse aller son talent syntaxique pour ce périple qui emprunte les sentiers de crête entre blasphème et hérésie. Au confluent du sacré et du profane, il semble entonner un psaume : |
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