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UGO PANDOLFI |
La Vendetta De Sherlock HolmesAux éditions ALBIANAVisitez leur site |
2632Lectures depuisLe vendredi 9 Juillet 2010
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Une lecture de |
À la fin du 19e siècle, Ugo Pandolfi est un ingénieur géologue corse réputé. Il fut un proche du défunt Guy de Maupassant, dont il vénère la mémoire. En cet automne 1893, Pandolfi a rendez-vous à Montpellier avec un nommé Sigerson, un Scandinave ayant besoin d’un guide pour visiter la Corse. L’homme dévoile bientôt son identité : c’est le fameux Sherlock Holmes, disparu depuis quelques mois. Il invite Pandolfi à une réunion secrète, regroupant les membres d’un comité qui vise l’élimination du Professeur Moriarty. Tous ces prestigieux experts européens savent que l’ennemi personnel de Holmes ne cesse d’étendre ses activités illégales. Certes, en Corse où le criminel s’est réfugié, le commissaire Le Villard a mis en place un réseau de surveillance autour de Moriarty. Encore faut-il l’approcher, être sûr de ne pas le rater. C’est une mission dangereuse, que seul Holmes peut accomplir. Pandolfi accepte immédiatement de l’assister. Arrivés à Ajaccio, le duo peut essentiellement compter sur deux personnes. Ors’Anto, l’agent local de Le Villard, est un homme de confiance, efficace et discret. Le jeune policier irlandais O’Near dirige l’opération sur l’île. Les rapports qu’il a reçu du mystérieux Reouven l’ont beaucoup aidé, mais cet agent ne donne plus signe de vie. On sait que Moriarty aurait un complice asiatique, un Annamite, dont le rôle reste encore obscur. En outre, les notaires de l’île sont actuellement très actifs, achetant de nombreuses propriétés pour la mafia de Moriarty. Celui-ci réside dans deux endroits, selon les jours, soit à Sartène, soit à Cardo près de Bastia. Toutefois, il se déplacerait bien vite sur les chemins peu commodes entre ces lieux. Comme l’a toujours pensé Sherlock Holmes, il existe certainement deux Moriarty. Pandolfi et le détective se rendent près de Sartène, dans un poste d’observation d’où l’on peut surveiller la maison de Moriarty. Le duo voit effectivement l’Annamite aller et venir. Leur cible se montre peu, sortant brièvement de chez lui. Ayant cherché le meilleur moyen d’approcher, s’abritant derrière un dolmen à la réputation maléfique, Holmes finit par utiliser son fusil spécial contre Moriarty. Ainsi qu’il le craignait, ce n’est qu’une doublure du criminel. Toujours davantage animé par l’esprit de vengeance, guidé par cette haine qu’il éprouve depuis vingt et un ans contre Moriarty, Holmes entraîne Pandolfi à Bastia. C’est depuis une grotte que l’on épie la propriété de Cardo où se trouve l’adversaire. Même s’il parvenait à supprimer Moriarty, il resterait quelques questions mal expliquées. Telle cette hécatombe parmi les brebis à travers toute l’île. Pour Pandolfi et Holmes, c’est évidemment à Londres que se terminera leur aventure. L’ingénieur y découvrira même d’incroyables révélations sur le héros Corse par excellence, Pascal Paoli… Voilà un “polar historique” particulièrement bien documenté. Ce roman fourmille d’une multitude de détails, qu’un simple résumé ne saurait restituer. Soulignons d’abord un bel hommage à Guy de Maupassant, grand amoureux de la Corse. Celui-ci n’aimait guère les ingénieurs et les politiciens : “Nos hommes politiques se querellent plus qu’ils ne délibèrent. Quant aux ingénieurs, le mépris qu’avait pour eux Maupassant n’avait pas de limite (…) [Il] était revenu à Ajaccio en affirmant que ces gens étaient plus dangereux que le choléra. Ce mal, disait-il, ne détruit que les hommes, tandis que les ingénieurs détruisent la nature elle-même, après l’avoir rendue grotesque.” Holmes n’est pas moins cinglant envers les politiciens : “Le seul mot de politique (…) semble être devenu le synonyme de mauvaise foi, d’arbitraire, de perfidie, de ruse et de délation.” Holmes ne mène pas ici une enquête de celles que nous les ont décrites ses hagiographes, le Dr Watson et Conan Doyle. Quand on vient pour se venger, pour la vendetta, le raisonnement passe forcément au second plan. C’est un périple à travers la Corse qu’il va vivre, ce qui est l’occasion de décrire maintes beautés de cette île, d’en rappeler plusieurs éléments historiques. Parmi les moments intéressants, notons la réunion des initiateurs de la criminologie moderne (Bertillon, Lacassagne, Lombroso…). Clin d’œil aux admirateurs du détective, le personnage énigmatique de Reouven, du nom du meilleur continuateur de l’œuvre de Conan Doyle, l’écrivain René Reouven. Précisons, toujours dans l’esprit holmésien, que Ugo Pandolfi est ici sous le charme de la fille du Dr Bell, dont Conan Doyle s’inspira largement. Ce voyage nous permettant d’accompagner Sherlock Holmes en Corse est un vrai plaisir, et une belle manière de découvrir certains aspects de l’île.
Tout commence en 1999, lorsque le père, malade, du journaliste Jean Pandolfi-Crozier, confie à son fils quelques objets contenus dans une vieille malle. Un étui à violon, deux curieuses pierres et quelques livres. Dans l’étui de l’instrument à cordes, une clé à laquelle est accrochée une étiquette portant comme suscription Serra. Parmi les volumes poussiéreux, quelques aventures du détective britannique Sherlock Holmes datant de la fin du XIXème siècle, quelques exemplaires de la nouvelle de Maupassant Le Horla, ainsi qu’un guide, Richesses géologiques et minières de l’île de Corse, écrit par l’ingénieur et géologue Ugo Pandolfi, un arrière grand-oncle paternel. Quelques mois plus tard, Jean Pandolfi-Crozier hérite d’une maison de village en Corse du Sud. Et en réhabilitant cette bâtisse, l’entrepreneur à qui les travaux ont été confiés découvre un coffre. A l’intérieur quatre carnets ayant été écrits par Ugo Pandolfi, quatre manuscrits dont la teneur est pour le moins surprenante et qu’il nous délivre ici : En novembre 1893, Ugo Pandolfi se trouve à Montpellier suite à une convocation signée Sigerson. Il est intrigué par cette missive qui fait référence à Guy de Maupassant, l’écrivain décédé quelques mois auparavant et ami du géologue. Sous l’alias de Sigerson, se cache le célèbre détective Sherlock Holmes, qui n’est pas décédé lors d’une chute à Reichenbach en Suisse mais depuis se déplace sous un autre pseudonyme. Or si Sherlock Holmes demande l’aide de Pandolfi, c’est bien à cause, ou grâce, à l’amitié commune qui les liait à l’auteur du Horla. Et pour une affaire qui requiert les connaissances insulaires de l’île de Beauté de Pandolfi. Lors d’une réunion à laquelle assistent quelques membres éminents de la criminologie française, Bertillon, Lacassagne et autres, réunion placée sous la houlette du commissaire Le Villard, Pandolfi apprend que Sherlock et les services de police sont sur les traces des frères Moriartini qui sont activement recherchés. Et que l’un d’eux ne serait autre que le célèbre et malfaisant professeur James Moriarty. C’est ainsi que Pandolfi se trouve embringué dans une aventure épique au cours de laquelle il apprend à mieux connaître le détective écossais et à tisser des liens amicaux avec lui. Lors du voyage maritime qui l’emmène du continent vers Ajaccio, Pandolfi a bien du mal à reconnaître Sherlock qui use à nouveau de déguisements sophistiqués. Moriarty a été repéré par des policiers français et britanniques, et il semblerait qu’il soit au cœur d’une entreprise d’escroquerie immobilière. Des notaires se rendent très souvent dans l’une ou l’autre de ses résidences, l’une située au nord de l’île, l’autre au sud. Or Moriarty semble posséder un moyen de locomotion extrêmement rapide, car il se déplace d’un point à un autre sans que les forces de police puissent le suivre. Il apparait puis disparait sans laisser de traces, ce qui est pour le moins étonnant. Sherlock et Pandolfi s’installent, en compagnie de policiers dont Ors’Anto et O’Near chargés de les épauler et les ravitailler, à Cauria où réside l’un des Moriartini. Cachés sous un dolmen préhistorique ils peuvent à loisir surveiller le domaine qui s’apparente à une ferme. Un trafic de moutons semble organisé sous la responsabilité notamment d’un Annamite. Le point culminant, et non point d’orgue comme disent si volontiers quelques journalistes, puisqu’un point d’orgue est une note prolongée, le point culminant de cette affaire se déroulera les 24 et 25 décembre 1893. De nombreux personnages évoluent dans ce roman qui crée un lien entre la disparition de Sherlock Holmes puis sa réapparition officielle, apportant une saveur particulière. Outre les parties de pêche et les balades maritimes de Pandolfi en compagnie de Maupassant, sont évoquées les figures de Zola et de Réouven, tandis que miss Bell, la fille du professeur Bell qui servi à Conan Doyle de référence pour camper son personnage, subjugue Pandolfi. On découvre un Sherlock Holmes gourmet et même gourmand, s’intéressant particulièrement à la gastronomie locale ainsi qu’au travail des apiculteurs. Un homme curieux, désireux de développer ses connaissances mais pas d’un abord aussi froid qu’on pourrait le croire. Les nombreuses notes en bas de pages imbriquant des épisodes concrets qui se sont déroulés, des références littéraires, géographiques ou historiques, avec des explications fournies par le petit-neveu concernant les écrits d’Ugo Pandolfi, et astucieusement délivrées font que ce roman n’est ni une parodie, ni un pastiche, ni un roman apocryphe, mais comme le testament d’une aventure réellement vécue écrite sous forme de journal. Et le lecteur habitué à retrouver les dessins de Jean-Pierre Cagnat dans le Monde, L’Express, VSD et autres magazines, se délectera à ces respirations en noir et blanc. |
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