peines perdues de Emmanuelle PESLERBE


Peines Perdues PESLERBE36

EMMANUELLE PESLERBE

Peines Perdues


Aux éditions DU ROUERGUE


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Le mardi 30 Avril 2008

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Emmanuelle PESLERBE




Une lecture de
CLAUDE LE NOCHER

CLAUDE LE NOCHER  
 Une petite ville de province, en 1982. Atteint de la maladie d’Alzheimer, Georges Boudard est mort. Assassiné. Il avait 75 ans, vivait chez sa fille Ghislaine, célibataire, maniaque de la propreté. Elle l’enfermait pour la journée. À part elle, seule l’auxiliaire de vie avait une clé de l’appartement. Quinquagénaire, le commissaire Jean Brossin enquête. Un duo d’inspecteurs relève de maigres indices chez Ghislaine, de rares empreintes et des billes plastique. Normal chez une forcenée du ménage. Néanmoins, certains détails intriguent Brossin, qui interroge les proches de la victime

D’abord, les deux filles du défunt : “Brossin trouve que Liliane est plus avenante que Ghislaine. Un brin salope, avec une dominante tête à claques.” La distante Liliane ne voyait plus son père depuis longtemps, dit-elle. Mariée à un patron de garage fier de lui-même, sa conception de la vie est fort éloignée de celle se sa sœur. Le cas de Robert, routier qui fut un temps d’ami de Ghislaine, ne pose pas vraiment de problème. La version de l’auxiliaire de vie est plus discutable. Ni courageuse, ni aimable, elle ne s’est pas occupée de M.Boudard le jour de sa mort. Sa collègue qui devait la remplacer, non plus. Peut-être Liliane est-elle passée ce jour-là, rien de sûr.

Georges Boudard avait eu un frère cadet, Jacky. Il est décédé douze ans plus tôt dans un curieux accident de voiture. Probable suicide. Un vieil ami des deux frères témoigne. Le seul à regretter ses copains, sans doute. Une erreur sur l’heure du crime amène le policier à interroger de nouveau les proches. Le mensonge éhonté de Liliane déroute l’enquêteur. Quant à Ghislaine, elle explique sa rage de propreté : son père “salissait son espace”. Liliane prétend que leur père était un monstre. Sa sœur refuse d’évoquer son enfance. Indécis, le policier place Ghislaine en garde à vue. Reconstituer la journée du meurtre, c’est pour le commissaire le moyen de comprendre l’infantile Ghislaine, le long désaccord entre le père et sa fille...

À l’opposé des noirs polars purs et durs, ce roman (assez court) est une vraie réussite. À travers les secrets d’une relation familiale, on nous présente des portraits d’une belle justesse, dans le quotidien et le vécu de ces personnages. Le policier lui-même se souvient de ses rapports avec son père, depuis longtemps disparu. Bienveillant, il cherche la vérité, sans accabler quiconque. Le manque d’indice est, en soi, une indication. La narration enjouée est d’une fluidité très agréable, entre ironie taquine et moments plus denses. L’auteur évite de dramatiser, de durcir le récit. Cet extrait exprime un peu la tonalité : “Le suicide est une trinité, il rassemble en un seul corps la victime, la justice et le coupable. Il s’agit bien d’un meurtre, le coupable se fait toujours prendre et écope toujours de la peine de mort.” Un roman entraînant, attachant. À découvrir !

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