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ELENA PIACENTINI |
Le Dernier HommeAux éditions IN8Visitez leur site |
915Lectures depuisLe mardi 30 Janvier 2018
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Une lecture de |
Ce hameau presque mort, ces quelques maisons vides, ça fait une trentaine d’années que Horace les connaît. Jeune instituteur, il enseigna dans une classe unique qui accueillait une douzaine d’enfants venant des villages environnants. À l’époque, il remarqua deux frères très dissemblables parmi les élèves. Séverin, un gamin taciturne et rêveur, était l’opposé de son cadet de deux ans, Antoine, extraverti et volubile. Les frères Cafani. L’enseignant s’est voulu lucide : “Certains ont déclaré que la vie les avait séparés. Ils ont tout faux, ils confondent l’effet et la cause. À la naissance, les frères étaient antipodes, la logique voulait qu’ils suivent des trajectoires opposées. Antoine a quitté le hameau à sa majorité et a ouvert un bar sur la côte. Séverin est resté. Ce n’était pas un choix par défaut, mais une vocation et une affinité qu’il portait en lui depuis l’enfance. Il était de ce royaume, fait par lui et pour lui. En osmose avec la plus infimes de ses composantes. Ce qui pousse dans la terre, y marche, s’y cache, s’en nourrit. Ce qui dépend du bon vouloir du ciel et de l’horloge des saisons. La vie de Séverin était là. Le bruit, les espaces confinés, les lumières artificielles, il en aurait crevé.” À l’heure de la retraite, Horace est venu s’installer dans une des maisons de ce hameau fantomatique. Le cas de Séverin l’intéressait toujours, trois décennies plus tard, pour son caractère anthropologique. Observer cet endroit moribond, prendre des notes, en restant neutre ? C’est évidemment impossible en un lieu où ne vivent que peu de personnes. Il est indéniable que Horace ait éprouvé une sorte d’empathie pour Séverin, même s’il ne se l’avouait pas. “Oui, je croyais maîtriser mon "sujet" sur le bout des doigts et je n’ai pourtant rien vu venir.” Les hameaux isolés et les vieilles rancœurs sont propices aux plus terribles drames. Le diable a ses raisons… Parmi les auteurs, il y a ceux qui savent très bien raconter une histoire, sur une intrigue sans défaut, offrant aux lecteurs un résultat de belle qualité. Il en est d’autres qui, quel que soit le format du texte, y ajoutent une tonalité particulière. Dans ce cas, une nouvelle ressemble un peu à une confidence en tête-à-tête avec celle ou celui qui va l’écouter. Il se crée une intimité permettant de comprendre la nature profonde des personnages et de leurs actes. Aussi pacifique soit-il, l’être humain est parfois confronté à la violence, et doit y répondre. Ne jugez pas cette affaire avant d’avoir tous les éléments en main, tel semble être le message que nous livre ici Elena Piacentini. Avec huit romans et un scénario écrits en dix ans, cette romancière fait déjà partie des valeurs sûres de la littérature polar. Elle est aussi l’auteure de quelques nouvelles, où son talent apparaît tout autant. “Le dernier homme” en témoigne, confirmant – s’il en était besoin – qu’Elena Piacentini est une reine de l’écriture et du suspense. |
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