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FREDERIC PAULIN |
La Peste Soit Des Mangeurs De ViandeAux éditions LA MANUFACTURE DE LIVRESVisitez leur site |
317Lectures depuisLe mardi 19 Decembre 2017
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Une lecture de |
Âgé de cinquante-cinq ans, Étienne Barzac est policier à l’IGPN, à Paris. Sans états d’âme, il a fait tomber certains grands flics corrompus. D’autres, tel le capitaine Mauer, échappent encore à son tableau de chasse. Côté privé, il fait l’impasse sur le cancer terminal de son ex-épouse Livia, faute d’avoir la moindre solution. Étienne Barzac est assisté par la lieutenant Salima Belloumi, âgée d’une trentaine d’années. Elle n’éprouve pas un grand respect pour son supérieur. Salima est mariée à Marc, qui s’est converti depuis quelques temps à un Islam de plus en plus radical. Comme la jeune femme refuse de se voir imposer les principes rigoristes de cette religion, son mari la frappe très régulièrement. Salima s’efforce de ne pas montrer qu’elle, policière, est une femme battue. Le capitaine Pierre Luchaire a été retrouvé assassiné dans un abattoir d’Île-de-France. Il faisait partie de la DDIPP, chargée du contrôle sanitaire des produits alimentaires, service moins glorieux que ceux traquant la criminalité. Consultant son épais dossier, Étienne Barzac s’aperçoit que Luchaire a été impliqué dans de sérieuses altercations, depuis plusieurs années. Bagarres autour de la fermeture d’un abattoir, agression d’un activiste anti-consommation de viandes, incident chez un éleveur sarthois de poulets, affaires qui ne paraissent sans doute pas gravissimes. Mais Luchaire semblait sortir de sa fonction. On note dans ces dossiers le nom de Gwenaëlle Martin, vingt-cinq ans environ, militante de l’association "La mort est dans le pré". Ceux-ci s’opposent à l’agro-bizness. Tandis que les problèmes privés des deux policiers empirent, Barzac et Salima Belloumi se rendent en Bretagne. Ils espèrent des éclaircissements de la part des gendarmes et des syndicalistes concernant le rôle de Luchaire, mais les pistes locales resteront vaines. Un élément nouveau, toutefois : Damien Ganz a été assassiné chez lui à Rennes, l’exécuteur bousculant Barzac pour s’enfuir. La victime est cet activiste que chahuta Luchaire, partisan de théories sur les droits des animaux à viandes, végétarien forcené et combattant toute élimination de bétail en abattoir. Pour lui, les associations comme L214 ou même "La mort est dans le pré" son trop timorées. Miguel Ibanez, un proche de Damien Ganz, est récemment mort de façon très suspecte, ne suscitant qu’une vague enquête. De retour à Paris, Barzac comprend que sa hiérarchie préfère une version simplifiée : le capitaine Luchaire, flic en perdition, a été victime d’une guéguerre entre branquignols de mouvements associatifs nébuleux. Peu de chances que Barzac puisse interroger René-Jacques Dumond, un des plus hauts responsables de l’agro-alimentaire ; ni qu’il situe le nommé Personne, au service de Dumond. Pourtant, il faudrait s’intéresser également au parcours de Gwenaëlle Martin. Elle fut rapidement séduite par Damien Ganz, et par ses théories contre la consommation de viande… (Extrait) “Sa cage thoracique se resserre et son cœur bat à tout rompre, deux mouvements antinomiques qui l’empêchent de bouger. Il ne connaît pas beaucoup de flics capables de garder leur sang-froid lorsque ça tire. Il a cette idée incongrue dans la situation que l’unique flic qu’il croit capable de rester calme quand ça canarde, c’est ce salopard de Mauer. Un pourri de son espèce est le seul à ne pas faire dans son froc quand les balles sifflent. La porte s’ouvre en grand. Il tente de lever son arme vers la silhouette qui déboule sur lui à une vitesse hallucinante. Mais la silhouette est plus rapide, elle lui envoie un coup de canon de son flingue – un automatique de couleur argentée – sur la tempe. Barzac voit un feu d’artifice exploser devant ses yeux. Il réussit à s’accrocher au manteau de l’homme…” Depuis quelques années, se sont développés des groupuscules agissant au nom du bien-être animal. Certains obtiennent gain de cause, en interdisant par exemple que les cirques montrent des spectacles avec des animaux dressés — c’est ainsi que disparaîtra l’esprit même du cirque. D’autres associations alertent sur les pratiques de quelques abattoirs, non-conformes aux règles sanitaires, et sur la maltraitance du bétail avant d’être abattu. Et puis, il y a les jusqu’au-boutistes d’un combat soi-disant en faveur de la protection des animaux à viandes. Leurs actions sont supposées pacifiques, s’attaquant au système qui exploite la consommation. Toutefois, des mésententes se produisent sûrement entre ces activistes, comme dans tout groupe, leurs idéaux rebelles étant de divers niveaux. Il y a fort à parier que l’industrie agro-alimentaire s’inquiète peu de ces mouvements dont la représentativité reste ultra-marginale. On fermera un abattoir incriminé ? Tant pis ou tant mieux, car il y a trop d’unités de production, trop d’usines à remettre aux normes. On reclassera les ouvriers ou on les fera patienter jusqu’à la retraite, voilà tout. Le cynisme est de règle dans ce secteur, l’actualité nous l’a prouvé maintes fois. Il s’agit d’un "modèle économique" qui ne changera pas de sitôt, écrasant toujours les productions alternatives. C’est entre cette industrie et ses opposants que se place la toile de fond de cette histoire. L’auteur n’oublie pas que les enquêteurs sont aussi des êtres humains, dans leur époque avec ses dysfonctionnements, en proie à des problèmes personnels. Même si un policier ne lâche pas vite prise dans une affaire, son vécu privé l’accompagne au quotidien. On suit ici les investigations du duo de flics, jusqu’à un point précis. Puis, la narration opère un retour sur le déroulement des faits, et sur les protagonistes. Il n’y a pas strictement de leçons à tirer, du genre "s’engager ou pas". C’est plutôt un constat, une illustration d’un sujet de société actuel. Dans la bonne tradition du roman noir… |
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