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MAX OBIONE |
DaisybelleAux éditions DU JASMINVisitez leur site |
3342Lectures depuisLe mardi 13 Mai 2014
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Une lecture de |
Dans quelques semaines les coureurs participants au Tour de France cycliste s'élanceront à l'assaut de l'asphalte. Et ils ne seront pas les seuls à sillonner les belles routes de nos campagnes, puisqu'ils seront précédés de la caravane publicitaire, des norias des voitures des directeurs sportifs, des motos des journalistes et des gendarmes, sans oublier tous ceux qui salueront leurs exploits dans un esprit sportif dénué de tout trucage lié au dopage. En ce début des années soixante, Louis Hortiz se promène en bicyclette sur les chemins et routes du Pays d'Auge, à Villers sur mer. Comme tous les ans, il est arrivé en éclaireur en compagnie de sa sœur Lucette et de sa copine Gisèle. Ils logent à la villa Les Fusains, une location qui se perpétue d'année en année, en attendant le flux touristique. Plus jeune que les adolescentes, qui révisent au calme, Louis est toutefois obligé de participer aux tâches ménagères, un jour sur trois. Faire les courses, cela lui convient, mais débarrasser la table et laver la vaisselle, il s'en passerait bien. Alors qu'il dépose son vélo contre une clôture grillagée, Louis se fait interpeller par le propriétaire, un vieil homme bourru. Toutefois le père Carillon ainsi surnommé pour une plaque émaillée vantant les bienfaits d'un café et clouée sur la porte de la remise, est intéressé par la bécane de Louis, il en connait la marque et surtout celui qui lui a donné son nom. Une ancienne gloire du cyclisme qui aurait abrégé sa carrière en préférant l'alcool à la course cycliste. Le père Carillon invite Louis a visiter sa remise où il parque avec un soin méticuleux sa vieille moto, une TerroT de 1936 dont il connait par cœur la fiche technique. Et surtout le side-car qui lui est accroché comme un bigorneau sur l'un de ses flancs. C'était l'époque bénie du transistor et le père Carillon en possède un qu'il porte à son oreille : c'est l'heure de la retransmission de l'étape du jour du Tour de France qui se déroule dans la région. Il propose même à Louis d'aller le lendemain de suivre l'étape contre la montre qui doit effectuer un parcours dans les environs de Deauville. Ils se rendront sur place avec Daisybelle sa moto. Louis est heureux, fier mais contrarié car il va désobéir en se lançant à l'aventure sans l'accord de ses parents. Il va leur envoyer une lettre et il laissera un mot à Lucette. Entre le vieil homme et l'enfant, s'établit une sorte d'amitié, et ils ne savent pas encore qu'ils vont se trouver confrontés à des hommes dont la morale s'efface devant l'appât du gain. Louis et le père Carillon, se sentent seuls, chacun de leur côté. La compagnie d'amis et des siens manque à Louis, quant au père Carillon, il vit en solitaire, ayant perdu sa femme et sa fille dans des conditions qui ne sont pas évoquées. Et c'est cette solitude et l'attrait pour le vélo, entre autre, qui les rapproche. D'autant que le père n'est pas souvent à la maison pour des raisons professionnelles et Louis le connait à peine.
Sans vraiment situer la date de cette aventure, qui doit se dérouler selon quelques indices au début des années soixante, puisque Lucette écoute à la radio La Famille Duraton et qu'une Renault 4L est stationnée près d'un hôtel, Max Obione joue avec des événements qui se sont réellement déroulés bien des années après. Je me contenterai de signaler juste quelques dates fatidiques qui ont marqué le Tour de France : 1967 et 1998, par exemple, ainsi que des personnages à la réputation sulfureuse et un produit surnommé le Pot belge. Mais il est indéniable que ce roman pour jeunesse nous fera plonger dans la notre, non seulement par les noms des cyclistes qui y sont évoqués comme Robic ou Vietto, par les illustrés pour la jeunesse comme Cœurs Vaillants, mais aussi par les interdits parentaux : Quant à la télévision, les parents de Louis y voyaient le début de la perversion de la famille : Lis au lieu de quémander la télévision ! déclarait le père. La couverture est signée Cécilia Paraire.
Au début des années 1960, le jeune Louis Hortiz passe ses vacances en juillet sur la côte normande, comme chaque année. Surnommé Loulou, il est accompagné de sa sœur aînée Lucette qui, avec son amie Gisèle, préparent hypokhâgne. Occupés, leurs parents ne les rejoindront qu'un peu plus tard. Jusqu'à présent, Loulou n'avait pas porté attention à un vieux monsieur, qu'il ne tarde pas à appeler le Père Carillon. Ce dernier connaît de vue la famille du gamin. En réalité, son vrai nom est Raymond Radaigue. Ayant perdu sa femme Edwige et leur fille, le père Carillon est un ancien policier. Il possède un side-car, une moto avec baquet sur le côté. C'est une Terrot VA 750 de 1936 ayant appartenu à son père, un engin puissant pour son temps qu'il bichonne avec le plus grand soin. Raymond Radaigue a une autre grande passion dans la vie, le cyclisme. En particulier, le Tour de France. D'Antonin Magne à l'exceptionnel René Vietto, en passant par Jean Robic, les champions d'antan n'ont pas de secrets pour le père Carillon. La génération actuelle de bons coureurs français est représentée par Bernard Mulot. Il brille dans cette édition du Tour, qui va passer près de là avec arrivée à Deauville. Le père Carillon propose à Loulou de suivre la course de plus près en embarquant avec lui sur sa moto Daisybelle. Voilà qui est drôlement tentant, mais il y a Lucette et Gisèle. Tant pis, Loulou laisse un message à sa sœur et adresse une lettre assez mensongère à ses parents pour n'inquiéter personne. Et c'est ainsi que début l'expédition du duo, au cœur du Tour de France. Loulou apprécie l'ambiance qui règne parmi les spectateurs le lon de la route. À l'arrivée de l'étape, Raymond Radaigue retrouve par hasard un de ses vieux amis, Albert Galipot, dit Bébert. Celui-ci est technicien dans l'équipe de Bernard Mulot, qui devrait être le meilleur dans le contre-la-montre du lendemain. Le milieu du cyclisme professionnel ne sent pas toujours bon, et les rumeurs de dopage ne sont pas fausses. “Il y a les braves types, les bosseurs, les soutiers au service des as et des leaders qui ne seraient rien sans les forçats du peloton. Et il y a les truqueurs, comme partout” relativise Bébert. Après un succulent repas de moules, Loulou et le Père Carillon sont autorisés à rouler derrière Mulot durant son contre-le-montre. C'est là que l'affaire va tourner au tragique... Au sujet des grands champions cyclistes, à chacun sa génération. Roger Lapébie fit frémir les admirateurs d'avant-guerre, Fausto Coppi et Charly Gaul ceux des années cinquante, puis ce fut le cas de Jacques Anquetil, d'Eddy Merckx, de Bernard Hinault, jusqu'aux coureurs d'aujourd'hui. Un univers d'autant plus fascinant qu'il est populaire. Du critérium local au Tour de France, c'est toujours la fête du vélo avec ses flonflons tonitruants, ses pronostics aléatoires dans le public, et son indispensable caravane publicitaire. Pourtant, pour “les forçats de la route”, expression datant de l'entre-deux-guerres, la pénibilité de la course est une réalité. Entraînement, massages quotidiens et repas aux pâtes ne sauraient suffire pour gagner. Alors, dans ce sport comme dans d'autres, on continue à banaliser le dopage. Les décès de plusieurs coureurs n'ont jamais servi de leçon. Bien sûr, s'agissant d'un roman destiné à la jeunesse, c'est avant tout l'expérience que va vivre Loulou qui importe. “[Les frites] trempées dans le jus de moules, c'était un bonheur gustatif inouï. De cet épisode, je conserve pour les moules marinières un goût immodéré. Marcel Proust avait sa madeleine, moi j'ai les moules pour me renvoyer dans le passé heureux de mes vacances.” Gamin sage comme on l'était en ce temps-là, collectionneur de cailloux rares, le voilà plongé dans une aventure originale. En partie racontée par lui-même un demi siècle plus tard, l'histoire de Loulou bénéficie d'une belle fluidité. On prend un réel plaisir à suivre les péripéties traversées par ce sympathique duo. Un suspense à mettre entre toutes les mains, pour enfants et adultes. |
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