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MAX OBIONE |
Gaufre RoyaleAux éditions KRAKOENVisitez leur site |
3285Lectures depuisLe lundi 7 Decembre 2009
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Une lecture de |
Suivi de Marcel Bovary ou l’épreuve par neuf
Issu d’un accouplement improbable entre Shrek et Obélix, Abel Salinas après avoir été policier s’est reconverti comme détective privé, spécialisé dans les minables affaires de cocufiage. Bref il végète jusqu’au jour où une enquête qui pourrait se révéler lucrative lui est confiée par un ténor du barreau à la santé déficiente. Maître Beausang ressent une forme de remord car de toutes les nombreux procès qu’il a gagné haut la main et le verbe, un dossier n’a jamais été mené à bon terme. Une tache dans une brillante carrière. Trois ans auparavant, la cour d’assises de Paris a condamné Edo Gradine, d’origine lituanienne, à dix ans de réclusion perpétuelle, pour le meurtre de Berverly Poulot. Or Maître Beausang est convaincu que l’inculpé n’a pas commis ce crime, d’ailleurs aucun cadavre n’ayant été retrouvé. Abel Salinas va donc remonter la filière, de Bully les mines où a vécu la jeune femme dans une famille d’accueil, jusqu’à Cabourg, en passant par Granville et autres lieux de villégiatures de la côte normande, utilisant ses méthodes personnelles, et son flair de chien pataud. La nouvelle qui complète ce volume, bien qu’elle soit placée sous le signe de Gustave Flaubert, serait plutôt à ranger aux côtés des histoires cauchoises dignes de Maupassant. Avec ce cynisme et cet humour noir qui caractérisait ce chantre de la ruralité normande. Max Obione dans Gaufre royale, dans une écriture bourrue, joue avec le lecteur, passant allègrement du Je au Il, le personnage s’adressant tout autant à lui-même qu’à un imaginaire compagnon, à moins que ce soit au lecteur qu’il prend pour témoin en employant aussi la deuxième personne du singulier, une tournure grammaticale particulière pas forcément recommandée par les profs de français dans la rédaction des compos, mais qui se révèle jouissive à la lecture.
Lorsqu’il trempa la madeleine dans sa tasse de thé ce ne furent pas de simples souvenirs qui l’envahirent, mais bien des scènes de son enfance qu’il revécut. Même non loin de chez Swann, le temps perdu ne se rattrape pas… Et Abel Salinas n’échappera pas à l’adage. Alors qu’il fait la queue, dans l’attente de sa gaufre royale, son esprit part en vadrouille, et il revit, tel un Proust revisité par Dashiell Hammett, sa dernière enquête, sa seule enquête, celle qui l’a conduit dans les bras de Georgette. Femme à « la fesse triste » qui n’avait connu qu' « étreintes brutales, sans joie, sans récompense ». Et alors que, dans la queue qui mène à la vendeuse, le temps se fige, les flashbacks s’emboitent, au fil des focalisations, souvent omniscientes, parfois internes, mais toujours en attente de dénouement, jusqu’au coup de couteau... jusqu’à ce que « la douleur t’explose jusqu’à plus. Je bascule dans l’ailleurs, anéanti… Chute. » Max Obione, avec sa « Gaufre royale » nous offre là un remue-méninges qui se révèle, au final, tout aussi efficace qu’une madeleine trempée dans le sang des victimes innocentes, puisque imaginaires. |
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