|
|
AGNES NAUDIN |
Affaires De FamilleAux éditions CHERCHE-MIDIVisitez leur site |
357Lectures depuisLe dimanche 7 Octobre 2018
|
Une lecture de |
Née dans un milieu aisé qu’elle ne renie pas, Agnès Naudin est une mère célibataire d’une trentaine d’année. Adepte de la méditation et du yoga, elle a choisi d’entrer dans la police. Au sein de la Police de l’Air et des Frontières, elle a connu ses premières expériences formatrices de ce métier. Agnès Naudin est capitaine à la police territoriale de protection de la famille dans l’Ouest parisien. Elle retrace "à chaud" son année 2017, tant sur le plan professionnel que privé. L’un ne va pas sans l’autre. Elle est longtemps restée marquée par le suicide de son amie Aurore, mais il y a aussi des moments très heureux — tels le mariage de son frère en Normandie, ou des séjours chez des amis à travers la France. Ce que craignait Agnès Naudin a fini par se présenter : la mort suspecte d’un bébé, confié à une nourrice. Nul ne peut y rester insensible. Traditionnelle, l’enquête débute par l’audition des proches : la mère et le père de l’enfant, puis celle de la nourrice. Cette dernière est une personne sérieuse, expérimentée. Assister à l’autopsie du bébé est le moment le plus pénible dans ce genre d’affaires. Sans préjugés, avec une neutralité sans froideur, la policière examine les faits et les témoignages. Le cas suivant s’annonce plus compliqué. Dans une famille d’origine gabonaise, une fillette de onze ans – enceinte – aurait été violée par son beau-père, le mari de sa mère. Il est vrai que cette gamine paraît plus âgée, déjà mûre. Elle-même née d’un viol, elle n’a rejoint sa mère en France que l’année précédente. La situation de Claude Balé, le beau-père soupçonné qui semble d’abord être en fuite, n’est pas claire du tout, c’est sûr. Mais cela fait-il de lui un pervers ? Le témoignage de la mère est précis, exprimé avec beaucoup de mots choisis. La policière la sent "trop comédienne", pas si fiable. Les autres enfants du couple sont également auditionnés. Agnès Naudin ne peut se contenter d’impressions, il faut des éléments concrets – tel l’ADN. À l’automne, c’est un dossier de viol conjugal qui est soumis à la policière. La victime ne souhaite pas vraiment porter plainte, mais avoir la possibilité d’en finir avec un contexte sans doute malsain. D’origine mexicaine, elle n’a jamais été acceptée par la famille de son époux. Depuis quelques temps, ce dernier aurait eu des fantasmes que la victime n’était pas prête à assumer. La sexualité des hommes et des femmes n’est pas la même. Le rapport psychologique confirme la version de cette personne. Malgré tout, le mari n’est apparemment pas un excité, ce dont il est nécessaire de tenir compte. (Extrait) “Tu prends les affaires trop à cœur.” Mais je ne traite pas des "affaires", je traite des "humains". Et pour les comprendre, je ne peux le faire qu’avec le cœur, en laissant mon cerveau procéder à l’analyse. Je ne sais pas comment faire autrement. Et je ne suis pas sûre de vouloir le faire.” Une année dans la vie d’une jeune capitaine de police, comme un "journal de bord" : un témoignage vivant sur le vécu dans une brigade de protection de la famille. C’est avec une belle clarté qu’Agnès Naudin nous livre ce récit-vérité. Nos politiques préfèrent souvent parler de l’efficacité d’une police répressive, vanter son efficacité. Ça existe, et cette forme-là joue son rôle pour notre sécurité. Néanmoins, d’autres aspects sont moins spectaculaires, mais essentiels. La police actuelle doit parfois dénouer des problèmes relevant davantage du social que du banditisme, de la pure criminalité. Bébé secoué, viol sur mineure, sexe imposé dans un couple : trois types d’affaires peut-être plus courantes qu’on se l’imagine. Pour la policière, un équilibre personnel s’avère indispensable – ce qu’elle trouve en grande partie à travers le yoga. Évacuer les frictions entre services et envers des collègues moins sympathiques, ça fait partie des aléas de ce métier – cela ne paraît pas insurmontable à Agnès Naudin. Comprendre, ou tenter de le faire, voilà ce qui importe. Ces policiers font partie des témoins de notre époque, cette sorte de livre permet certainement d’en approcher la sociologie. D’une façon positive dans ce cas, assombrir les réalités ne résolvant rien. Un regard aussi lucide que possible sur aujourd’hui, sur une des facettes de notre société. Incontestablement, Agnès Naudin a écrit là un livre à ne pas manquer. |