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ROGER MARTIN |
Il Est Des Morts Qu’il Faut Qu’on TueAux éditions CHERCHE-MIDIVisitez leur site |
1171Lectures depuisLe lundi 22 Fevrier 2016
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Une lecture de |
Les premières pages de ce roman immergent le lecteur au cœur d’une des tranchées meusiennes. La guerre fait rage et en cette année 1915, les morts se comptent chaque jour par dizaines voire par centaines aux jours des offensives décidées par l’état-major. Romain Delorme blessé à la jambe lors de l’un de ses assauts est évacué vers la gare de l’Est. Louis Pergaud (1), l’auteur de « La Guerre des boutons », aura moins de chance, grièvement touché, capturé par les Allemands, il mourra sous les bombes françaises. Le caporal Lévy, n’aura guère plus de chance. Et voilà le lecteur ramené en 1908, sur le parvis du Panthéon, le jour de l’entrée d’Emile Zola dans ce lieu symbolique. L’affrontement entre les dreyfusards et les dreyfusards de tout poil fait rage. Romain Delorme membre des brigades du Tigre extrait des griffes d’une horde d’antisémites une jeune femme, cette même femme qu’il retrouve 7 ans plus tard gare de l’Est et qui lui révèle le secret de sa naissance. Nouvelle analepse : Communards et Versaillais s’affrontent dans les rues de la capitale. Victorieux, les partisans de Thiers fusillent à tout va et déportent ceux que le hasard soustrait à leur furie. Quant aux nouveaux nés, ils les volent. Février 1934. Tous ceux sur qui s’appuie l’extrême-droite tiennent le haut du pavé. La République résistera-t-elle aux coups de boutoir des émeutiers ? L’histoire se répéterait-elle ? 1891 – 1902. En ce temps-là, Romain Delorme, sur ordre de Louis Andrieux (2), infiltrait les milieux de la droite nationaliste et antisémite. Journaliste au « Petit Journal », il intègre le cercle des proches du marquis de Morès (3) qu’il suivra de sa gloire à son déclin, déclin dont il sera en sous-main la cheville ouvrière. Un temps exilé à Marseille, où il rencontre le célèbre chef de la sureté Eugène Baruteau (4), il regagne Paris et se rapproche de Jules Guérin (5) au côté duquel, avec la troupe de ses partisans, il se retranche entre12 août au 20 septembre 1899, dans un immeuble de la rue de Chabrol. Après la condamnation de Guérin, il devient le confident d’Henri Buronfosse (6) et se trouve mêlé, à son corps défendant, à l’étrange mort d’Emile Zola. L’histoire se répéterait-elle ? « ça ne finira donc jamais » Romain Delorme meurt en 1940 au moment de la promulgation par Pétain du décret sur les Juifs et laisse à sa fille l’épais recueil de ses mémoires.
Dans l’avertissement sur lequel s’ouvre ce passionnant ouvrage, l’auteur écrit : « Toute ressemblance avec des faits authentiques et des personnages ayant réellement existé ne serait en rien le fruit de coïncidences. » Tout est vérité historique et en particulier la furie antisémite dans laquelle baigne la droite française, furie qui détient idéologiquement sur la gauche socialiste ou anarchiste. Tout, sauf le narrateur, sauf Romain Delorme. Histoire et fiction se percutent, se nourrissent et s’éclairent l’une l’autre, se donnant à comprendre ou à illustrer. Ainsi, servit par une plume de conteur émérite et une rigueur scientifique, Roger Martin semble faire sienne l’affirmation de Jean-Luc Godard : « De façon générale, le reportage n’a d’intérêt qu’inséré dans la fiction, mais la fiction n’a d’intérêt que si elle se vérifie dans le documentaire » JLG, Cahiers du Cinéma n°138, 1962
Ces références sont à considérer avec prudence, mais elles peuvent éclairer le lecteur curieux.
1- https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_Pergaud
2- https://fr.wikipedia.org/wiki/Louis_Andrieux
3- https://fr.wikipedia.org/wiki/Marquis_de_Mor%C3%A8s
4- https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Contrucci
5- https://fr.wikipedia.org/wiki/Jules_Gu%C3%A9rin
6- https://fr.wikipedia.org/wiki/Mort_d%27%C3%89mile_Zola
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