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ROGER MARTIN |
Des Ombres Dans La NuitAux éditions OSKAR |
2418Lectures depuisLe lundi 29 Juillet 2013
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Une lecture de |
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Ce 17 octobre 2010 est un grand jour pour le jeune Jim. Il va se rendre en compagnie de ses parents jusqu’à Washington en avion. L’avion, il l’a déjà pris deux ou trois fois, alors ce n’est pas pour ça qu’il rêve éveillé. Ce n’est pas non plus sa dernière lecture, Les aventures de Huckleberry Finn et de son copain Tom Sawyer, les deux amis ont partagé tellement d’aventures dangereuses, qui l’inquiète, mais bien parce qu’il va vivre un moment historique. Arrivés à l’aéroport, Jim et ses parents sont pris en charge par deux agents auxquels le père de Jim présente son invitation, puis encadrés comme s’ils étaient des malandrins, ils sont emmenés jusqu’à la Maison Blanche. L’étonnement de Jim est à son comble. Il est en compagnie d’une trentaine de personnes dans le bureau ovale. Et lorsque le Président en personne pénètre dans la pièce accompagné de sa femme, Jim n’en croit pas ses yeux. Son grand-père, William Caldwell, est l’homme de la soirée. Il reçoit des mains du Président la Médaille d’Honneur en récompense de son dévouement inaltérable à la cause des droits civiques et de son courage exemplaire… Jim ne rentre pas à Atlanta avec ses parents mais obtient la permission de passer quelques jours en Louisiane, au bord du bayou Teche. Dans ce coin tranquille grand-père Billy narre quelques épisodes de son enfance dans le Mississipi, en 1953. Son père l’a élevé seul, car sa femme est décédée alors que le jeune Billy avait à peine deux ans. Lors de l’épisode qu’il décrit, il a dix ans, et son père est journaliste photographe et imprimeur du Clairon, le journal local de Centreville dans le Mississipi. Il débute son récit en racontant leur départ précipité en voiture avec quelques malles contenant leurs effets, sous la huée et les jets de pierre des habitants Blancs de Centreville. Billy va à l’école comme tous les gamins de son âge, possède deux amis, Herb et Jerry, et une copine, une fiancée selon les autres gamins, Charlotte. Et c’est en jouant dans la grange de l’oncle d’Herb que les trois garçons font une découverte surprenante. Dans une armoire ils trouvent une sorte de robe blanche ainsi qu’une cagoule. Herb enfile les vêtements et c’est tout honteux qu’il se déshabille rapidement lorsque son oncle le trouve ainsi attifé. L’homme se contente de sourire et de déclarer : Cette tenue, les enfants, c’est la plus belle qu’un Blanc puisse jamais porter. Mais elle est réservée à des circonstances particulières, et personne ne doit savoir qui se trouve dessous, sauf les initiés. Cette tenue est celle du Ku Klux Klan, et Billy va bientôt savoir à quoi sert cet accoutrement. Un soir, désobéissant à son père, Billy se rend en compagnie d’Herb et Jerry dans une localité voisine où se déroule une fête. Une fête foraine un peu spéciale toutefois. Charlotte joue au chamboule-tout mais les boîtes de conserve qu’elle doit dégommer sont décorées de têtes de Noirs, distordues, caricaturées, effrayantes. Puis peu après apparait un étrange cortège. Un Noir est attaché aux poignets par deux cordes reliées aux pommeaux des selles de deux cavaliers encagoulés. Les Klavaliers du Ku Klux Klan. Puis Billy assiste à une scène qui l’horrifie. C’est le début d’un long cauchemar qui se terminera par le départ précipité de Billy et son père. Un roman qui prend aux tripes même si l’on connait, par les écrits, les reportages, quelques-uns des événements qui se sont déroulés par le passé. Mais les tabassages de Noirs par des policiers, qui se retranchent derrière leur fonction, font encore la une de l’actualité sporadiquement. Selon des théoriciens du Klan, les Noirs sont des créatures préadamiques, c'est-à-dire que leur existence date d’avant Adam. Or, d’après la Bible, Adam est le premier homme, et donc tout être vivant apparu avant lui ne peut appartenir qu’à un règne végétal ou au règne animal. On peut se demander si ces hommes et femmes qui se cachent sous les cagoules du Ku Klux Klan sont véritablement des êtres humains, eux qui se référant à la religion chrétienne torturent et tuent impunément d’autres êtres humains dont la seule différence réside en leur couleur de peau. Roger Martin est fasciné et passionné par l’histoire des Etats-Unis, mais il n’en est pas l’apologue. Au contraire, depuis des décennies, il s’attache à comprendre cette ségrégation raciale, à tenter de l’expliquer, à en décrire minutieusement l’histoire, à retrouver des témoignages, à démontrer que si le Ku Klux Klan est officiellement banni, qu’il existe des résurgences et qu’il réapparait sous d’autres noms. Mais le KKK n’est pas seul en cause, des sectes néonazies sont constituées, et ouvertement ou non encouragées par des hommes (et femmes) politiques qui élaborent des programmes dont les objectifs sont l’expulsion des étrangers, et leurs ennemis sont les partisans de l’avortement ou les homosexuels. Je suis sûr que quelques noms vous viendront immédiatement à l’esprit, ne serait-ce que celui d’une ancienne candidate à la Maison Blanche. Ce livre est composé d’un roman, poignant, et d’un dossier illustré sur les cent cinquante ans du Ku Klux Klan. Parmi ce dossier, outre l’histoire du KKK, Roger Martin a inclus une filmographie, une discographie et une bibliographie ainsi que les paroles françaises de deux chansons : Strange Fruit, qui fut interprétée par Billie Holiday et quelques autres, et Only a Pawn in their Game de Bob Dylan, ainsi qu’un poème de Roger Martin dédié à Rosa Parks. Si cet ouvrage est conseillé à partir de l’âge de onze ans, il s’adresse à tous, car tout un chacun doit se sentir concerné par cette dénonciation du racisme et de la ségrégation et l’approuver.
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