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REGIS MESSAC |
Le «detective Novel» Et L'influence De La Pensée ScientifiqueAux éditions ENCRAGEVisitez leur site |
487Lectures depuisLe samedi 29 Octobre 2011
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Une lecture de |
On a écrit quantité d’ouvrages documentaires sur la littérature policière. Mais il en est un qui restait introuvable depuis longtemps, dans son intégralité. Je veux parler de l’étude due à Régis Messac, parue en 1929 : “Le «Detective Novel» et l'influence de la pensée scientifique”. François Guérif l’évoqua il y a trente ans dans “Le cinéma policier français”, aux éditions Henri Veyrier. De rares initiés en possédaient un exemplaire. Sans doute se contenterait-on de citer cette thèse parmi les œuvres perdues à jamais. Ouvrage mythique, puisque son contenu complet nous serait définitivement inconnu. Professeur qui enseigna à Auch, à Glasgow, à l’université McGill de Montréal, à Montpellier et à Coutances, Régis Messac (1893-1945) fut pourtant le premier à démontrer que la littérature policière et scientifique était un genre à part entière. Intellectuel, politiquement impliqué, et vulgarisateur de ces littératures, Messac ne s’adressait pas qu’aux élites. “Un bon roman policier possède des qualités d’harmonie, d’organisation intérieure, d’équilibre, qui répondent à certains besoins de l’esprit” a-t-il écrit. La thèse en question avait pour but de souligner que les intrigues mystérieuses ou criminelles (et leurs explications souvent scientifiques) existent depuis l’Antiquité, traversant l’Histoire. Depuis l’été 2011, il est enfin possible de se procurer “Le «Detective Novel» et l'influence de la pensée scientifique” (éditions Encrage). Que tout ceux qui ont œuvré autour de Pierre Lebedel et Olivier Messac pour sa publication en soient félicités. S’il s’agit bien d’une thèse, utilisant la forme classique, l’auteur a su la rendre absolument passionnante. Rien à voir avec un étalage d’érudition, avec des propos d’expert s’adressant aux seuls spécialistes. Régis Messac parvient à montrer que c’est d’un genre vivant qu’il traite, y compris dans son aspect historique. Que Balzac et Dumas, Edgar Poe et Conan Doyle, Ponson du Terrail et les feuilletonistes ont construit un puissant genre littéraire. Il est évidemment impossible de détailler ici toute la richesse de cette thèse. Il suffit de savoir que l’auteur y consacra de longues années de recherches tous azimuts, pour réaliser que cette étude est la plus complète qui soit (des origines à 1929). Soulignons que la littérature policière et scientifique a toujours été associée à l’actualité réelle d’une époque, à la sociologie de son temps : “La complication de la vie moderne vient au secours du romancier pour lui permettre d’embrouiller plus aisément les fils de son intrigue. Elle lui permet, plus souvent encore, de varier son décor. Qu’il était petit ce coin de Paris, réduit presque exclusivement au faubourg Saint-Germain, dont Rastignac se proposait la conquête ! Les nouveaux aristocrates et les nouveaux riches d’après 1850 s’agitent dans des lieux multiples, plus encombrés, et plus pittoresques, s’ils ont moins de style. Voyageant davantage, et non plus dans leur carrosse, ils fréquentent les grands hôtels; et ces caravansérails, théâtres coutumiers des exploits d’Arsène Lupin et de ses émules, apparaissent dans la littérature aussitôt que dans la vie…” Il était bon qu’une telle thèse soit présentée dans son contexte. Au contraire de certaines préfaces, qui s’avèrent peu utiles, celle de Claude Amoz (romancière et universitaire) situe remarquablement l’auteur et son travail. “Fidèle à la formation qu’il a reçu malgré lui comme à la méthode des détectives qui lui sont chers, Régis Messac procède du proche au lointain, du connu à l’inconnu, du présent au passé en remontant la piste, en remontant le temps […] Régis Messac pourrait s’arrêter là. Mais sa quête est plus exigeante…” En effet, une thèse de 540 pages nécessite non seulement de la compétence, mais une bonne dose de conviction et de ténacité pour aborder l’ensemble du sujet. Il ne faut pas négliger de lire la postface de François Guérif, pour son côté “affectif”. Un ouvrage aussi incontournable que captivant. |