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PHILIP LE ROY |
Le Neuvième NaufragéAux éditions DU ROCHERVisitez leur site |
1071Lectures depuisLe mardi 10 Avril 2018
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Une lecture de |
Jeune veuve d’un skipper mort noyé un an plus tôt, Eva Velasquez est une criminologue à la silhouette flamboyante, dont la compétence ne fait pas de doute. Elle est confrontée à une mission imprévue, qu’elle devra mener dans des conditions précaires. Les naufragés du voilier Spanish Queen ont trouvé refuge sur un îlot volcanique méditerranéen au large de Gibraltar. Ce sont les autorités espagnoles qui interviennent, même si d’autres pays ont autant de droits sur cette petite île. Eva prend connaissance du dossier. Neuf personnes qui se sont connues via Internet ont embarqué sur le ketch, pour une petite croisière. Il y avait quatre hommes et cinq femmes de nationalités différentes, avec peu de points communs, sauf la passion des voyages, et plusieurs ayant une formation juridique. Ils partirent à neuf, un dixième passager ayant renoncé. Mais il n’y a que huit rescapés, un d’eux ayant disparu autour du naufrage : Dorian Panzer-Vaugel, photographe, fils d’un haut-diplomate français en poste à Madrid. Il s’avéra bien vite que le seul qui soit capable de naviguer, de barrer le voilier, c’était Dorian. À l’écoute des témoignages, Eva cerne le portrait du disparu. Outre ses qualités de marin, c’était surtout un obsédé sexuel jouant de son physique et de son charisme. La plupart des jeunes femmes présentes ne firent rien pour résister à son fascinant attrait. Dans un groupe comme le leur, la promiscuité ne pouvait qu’entraîner des tensions. D’autant que l’autoritarisme nerveux de Dorian, maître à bord, plus mâle que certains de ses amis, irritait fatalement les autres. Au sixième jour de la croisière, un trou dans la coque causa le naufrage. Heureusement, le voilier put aborder l’îlot. Comme on a découvert deux petits paquets de drogue sur l’île, on peut imaginer que Dorian rentabilisait le voyage ainsi. Ce n’est pas le sentiment d’Eva. Si ses interrogatoires se passent dans l’inconfort, elle peut néanmoins compter sur le caporal Cortés. Cet Espagnol est aussi serviable qu’efficace pour dénicher des infos. En particulier sur une sale affaire de mœurs impliquant naguère Dorian, qui s’en sortit grâce à son père. Un corps va être retrouvé sur l’île. Les versions des huit rescapés sont complémentaires et concordantes quant au déroulement des faits. Au moment du naufrage, tous admettent avoir agi en plein accord, se rebellant contre Dorian. Malgré tout, Eva n’est pas totalement satisfaite du scénario qui se dessine. L’arrivée sur l’île de M.Panzer-Vaugel, le père de Dorian, risque encore de compliquer sa tâche. Dès qu’elle le pourra, Eva devra affiner le rôle de chacun. Et se méfier des apparences… (Extrait) “— Vous êtes pile-poil sur la bouche de l’enfer. Eva se figea par réflexe et regarda ses pieds. Cortés esquissa un sourire. — La légende raconte que les pêcheurs locaux entendaient jadis des hurlements dans la mer. Un jour, l’un de leurs filets ramena le corps d’un homme en train de se noyer. Une fois sauvé, le rescapé avoua qu’il était un meurtrier. Pour remercier les pêcheurs de l’avoir arraché du trépas, il leur décrivit le purgatoire où il avait été envoyé après sa sentence : un cratère en fusion noyé sous les eaux ! Ainsi, celui qui avait été condamné à mort par les hommes, ne l’avait pas été par la justice divine, sauf à errer entre les flammes et l’écume, en attendant que son âme connaisse un sort définitif. Le destin voulut que les hommes lui donnent une deuxième chance. — Quelle étrange légende ! — Elle illustre la justice selon les lois des hommes, de Dieu et de la nature.” Écrivant depuis une vingtaine d’années, Philip Le Roy figure parmi les auteurs confirmés. Il fut récompensé en 2005 par le Grand Prix de Littérature Policière pour “Le Dernier Testament”. Avec “Le neuvième naufragé”, qui s’inscrit dans la meilleure tradition des intrigues énigmatiques, il démontre une fois encore son sens du suspense solide. Bien sûr, une île avec une brochette de suspects, c’est un évident clin d’œil aux “Dix petits nègres” d’Agatha Christie (1939). Philip Le Roy n’est pas moins astucieux qu’elle. Il convient de souligner aussi la souplesse narrative du récit, entre progression de l’enquête, scènes d’avant le naufrage, et questionnements de la criminologue. Celle-ci se dirige vers une conclusion quelque peu bancale, elle le sent. Le dénouement sera, lui, à la hauteur. Lorsqu’un groupe de protagonistes est présenté, on peut craindre de les confondre, de s’y perdre un peu. Ce n’est pas le cas ici car, entre une Québécoise décomplexée, un écrivain Irlandais probablement gay, un Brésilien à l’allure sportive, et toute la bande, les équipiers du Spanish Queen possèdent des caractéristiques diverses. Et puis, c’est le personnage de Dorian, avec son cynisme de séducteur opposé à son sérieux de navigateur, qui capte en grande partie l’attention. Voilà un suspense construit et raconté avec une belle maestria, pour le plus grand plaisir des lecteurs. |
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