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JEROME LEROY |
La Petite GauloiseAux éditions LA MANUFACTURE DE LIVRESVisitez leur site |
223Lectures depuisLe mercredi 14 Mars 2018
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Une lecture de |
Le terrorisme joue sur l’effet de surprise, frappant là où on ne l’attend pas. Même dans une ville portuaire à deux cent quatre-vingt kilomètres de Paris, on peut trouver quelques radicalisés prêts à passer à l’action. Issus d’un quartier sensible où une population bigarrée s’entasse dans des tours, ces kamikazes n’ont rien de brillants héros. Il suffit de leur fournir des kalachnikovs, et un plan d’attaque approximatif, pour lancer une opération destructrice. Sous l’influence d’un imam, et pensant avoir converti une jeune Française grâce à ses talents sexuels, le Combattant et une poignée de sbires vont commettre un ou plusieurs attentats. Mais un capitaine de la police anti-terroriste possède un contact dans cette ville, qui le prévient de l’imminence de l’affaire. Ayant compris qu’un indic les avait trahis, le Combattant et sa bande causent un carnage dans le bar où le flic devait rencontrer son contact. Bien que le policier ne s’en tire que provisoirement, il a eu le temps d’alerter ses services. Pour le petit groupe d’islamistes, c’est la débandade. Tandis qu’une vaste intervention policière investit le quartier sensible, entraînant une émeute, comme ses comparses, le Combattant se cache lamentablement. L’état-major anti-terroriste peut considérer que, malgré la perte d’un policier d’élite, c’est un succès. Juste une question d’heures pour retrouver et éradiquer les rescapés de la bande du Combattant. Quant à sa complice, la Petite Gauloise, ils n’en ont pas vraiment entendu parler, et elle est trop transparente pour être soupçonnée. Au lycée Charles Tillon, actuellement en travaux, le prof de français Flavien Dubourg a prévu ce jour-là une rencontre avec Alizé Lavaux, auteure-jeunesse. Toujours périlleux, s’agissant d’élèves pour la plupart incapables de lire le moindre livre. La principale raison de cette invitation, c’est que Flavien Dubourg fantasme sur la ravissante Alizé Lavaux. En un mot, il voudrait bien se faire dépuceler par elle. Il ignore que l’auteure, une fumeuse invétérée, est relativement peu motivée par cette animation. À part Stacy Billon, la bonne élève de la classe qui ne posera pas de problèmes, Flavien espère qu’Alizé Lavaux saura amadouer par son charisme les jeunes mâles du troupeau scolaire. Ils ont de la testostérone à revendre, ces grands ados d’origines ethniques diverses. L’essentiel, c’est que la situation soit stabilisée, que les forces anti-terroristes aient réussi à calmer les troubles. Du moins en apparence. Ce ne sont pas le Coran et ses sourates qui dictent sa conduite à la Petite Gauloise. Il y a peu de chance qu’elle renonce à son projet… (Extrait) “Mais cette fois-ci, il s’agit d’un collègue abattu qui a eu le temps d’avertir qu’un sale truc se préparait, de quatre morts dans un bistrot dont deux barbus avec des kalachs et l’indic du collègue. Sans compter, d’après des témoins, une deuxième équipe de deux ou trois tireurs disparus dans la nature. Ça sent mauvais. Alors, dans les 800 et dans le reste de la grande ville portuaire de l’Ouest, en pleine nuit, grâce à l’état d’urgence, on perquisitionne un peu partout, on fait venir une équipe de la SDAT, on arrête préventivement les fichés S, on en profite pour évacuer un squat anarcho-autonome qui empêche un projet immobilier du côté du quartier de Jeanval, mais décidément on ne trouve rien et la nuit avance dangereusement. On défonce portes et crâne, on crie beaucoup, on fait hurler les sirènes, on énerve tout le monde, et assez logiquement on provoque une émeute. Le maintien de l’ordre, c’est un métier, y a pas à dire.” Jérôme Leroy serait sûrement capable d’écrire une volumineuse thèse sociologique sur la France d’aujourd’hui, sur la mixité sociale qui ne fonctionne pas toujours, sur l’ambiance anxiogène entretenue par les théoriciens du Grand Remplacement. Il a bien raison de choisir une tonalité beaucoup plus légère pour évoquer ces questions sociétales, et d’opter pour un roman court, format adéquat. Il y a une bonne dose d’espièglerie dans l’histoire qu’il nous raconte ici. Certes, le terrorisme est une menace à prendre au sérieux. Mais il n’est pas interdit de poser un regard malicieux sur ces faits. C’est même une marque de lucidité, que d’utiliser un humour pouvant s’avérer ironique, grinçant, voire mordant. Vivons-nous dans un monde binaire, où n’existeraient que le Bien et le Mal, sans nuance ? Jérôme Leroy apporte une esquisse de réponse. Et si c’était le nihilisme qui était en train de prendre le pas sur les idéologies, les communautarismes, les schémas habituels ? Les générations actuelles pratiquent l’abstention aux élections, ne se mobilisent guère pour des causes pourtant valables. Et s’il s’agissait, pour une partie d’entre eux, d’une autre forme de radicalisation, d’un rejet définitif ? C’est en l’illustrant avec un sourire enjoué et sur un rythme plein de vivacité, que Jérôme Leroy nous soumet cette suggestion. |
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