|
|
FREDERIC LENORMAND |
Seules Les Femmes Sont éternellesAux éditions DE LA MARTINIEREVisitez leur site |
1095Lectures depuisLe vendredi 24 Novembre 2017
|
Une lecture de |
En ce début de la guerre de 1914, Paris est envahi de femmes endossant les fonctions des hommes, la plupart de ceux-ci étant parti au combat. Raymond Février n’a pas encore été mobilisé, mais il est conscient que ça ne saurait tarder. D’autant qu’il ne compte pas que des amis parmi ses collègues. Ray est absolument réfractaire à l’idée d’aller se faire tuer sur le Front. Malgré les communiqués officiels optimistes, déjà beaucoup de soldats sont morts ou de retour, hospitalisés dans un sale état. Quand vient l’heure de répondre à sa convocation militaire, Ray trouve refuge son amie chez Léonie. Gouailleuse car issue d’un milieu populaire, le jeune femme est artiste, vivotant surtout en monnayant ses charmes. Léonie est de bon conseil pour aider Ray, qui a eu l’idée de se transformer en femme. Muni de faux-papiers, Ray s’appelle maintenant Louise Chandeleur, dite Loulou. Elle se fait engager dans une agence de détective privés, celle dont Cécily Barnett a hérité de son père, qui s’est engagé dans l’Armée. Pas exactement un métier de femme, mais pourquoi ne remplaceraient-elles pas les hommes absents, là aussi ? Comme il est plutôt urgent de relancer l’activité de l’agence Barnett, Ray-Loulou pense à une cliente potentielle, la baronne Schlésinger. Patriote, celle-ci s’implique dans des œuvres caritatives, auprès des blessés ramenés à Paris. Elle est même pingre envers son personnel, préférant nourrir les hospitalisés, semble-t-il. Son fils Paul n’a pu faire jouer la dérogation qui lui eût permis d’éviter d’être incorporé. Sa baronne de mère subit un chantage à son sujet. Ensemble et séparément, Loulou Chandeleur et Cécily Barnett mènent l’enquête. La mort d’un certain Honorin Trépinet, prêteur dans un cercle de jeux clandestin, a probablement un lien avec cette affaire. Peut-être que le témoignage de l’ex-chauffeur de la baronne, un fringuant Italien envoyé au combat comme les autres, pourra s’avérer utile. C’est sans nul doute Maxime Deschamps qui leur offre la meilleure piste. Ce fonctionnaire planqué au Ministère des Transports publics n’a pu empêcher que son ami Paul parte à la guerre. Mais il sait que le fils Schlésinger s’est, juste avant de devenir soldat, marié en secret. Du moins, sans en aviser sa mère la baronne. Voilà une bonne piste à suivre. L’enquête de l’agence Barnett leur fait rencontrer un concurrent, l’agence de détectives Motus. Là, il n’y a que des mâles qui se croient fins limiers, mais que Ray-Loulou a plus tendance à qualifier de magouilleurs. Par ailleurs, il faut aussi s’occuper du cas du couple Espignol, dont l’épouse a reçu une lettre énigmatique. S’il y a un corbeau pour dénoncer le cocufiage, ça devrait être résolu sans trop de difficultés, Ray restant un professionnel. Les soucis de la baronne Schlésinger sont plus ardus à démêler. Car le maître-chanteur met sa nouvelle menace à exécution, et ce n’est sûrement pas son dernier crime s’il veut arriver à ses fins. L’épouse ouvrière de Paul détiendrait-elle les clés du mystère ?… (Extrait) “Entre le rhum, la cassonade et le citron, il apprit que les intrus avaient usé d’une carte de police qui semblait en bonne et due forme pour autant qu’elle pouvait en juger (…) Une visite conduite en dehors de tout cadre légal avait autant de chances d’être l’œuvre de vrais policiers que de vrais bandits. Ray se demanda s’il n’avait pas risqué d’être la victime d’un règlement de comptes plutôt que d’un rapt au bénéfice de la commission des enrôlements. L’autre visite du jour avait consisté en deux dames qui s’étaient présentées comme les héritières de Monsieur Trépinet, deux sœurs qu’il avait à Rouen, avaient-elles dit sans exhiber le moindre papier pour appuyer leurs prétentions, si bien que Ray se jugea décidément bien scrupuleux, il s’était compliqué la vie pour rien. Les dames de Rouen souhaitaient mettre sous clé en toute hâte les valeurs de leur frère par peur d’un pillage, puisque son identité avait été révélée par la presse à propos du "dramatique accident". Il fallait sauver la fortune familiale, les potirons et les navets étaient en grand péril.” Frédéric Lenormand est un romancier chevronné, auteur de multiples polars historiques. Il a redonné vie au Juge Ti, d’après le personnage créé par Robert van Gulik, et il a mis en scène Voltaire dans une autre série d’enquêtes. Sans compter plusieurs romans destinés à la jeunesse et quelques intriques se référant à l’Histoire. En la matière, c’est sans conteste un grand connaisseur. Cette fois, c’est dans les débuts de la Première Guerre Mondiale qu’il situe les décors de cette aventure. Un policier, estimant qu’il a mieux à faire que de combattre, se déguise en femme. Ainsi, il poursuit son activité d’enquêteur, sous un autre aspect. On le suit avec plaisir dans ses investigations, afin d’élucider certaines énigmes. Il s’agit donc d’un fort sympathique roman d’enquête, doté d’une belle fluidité narrative. Une autre approche est également amusante. Au fil du récit, on notera des allusions à la culture populaire, à la tradition littéraire policière. L’Agence Barnett n’est pas inconnue des lecteurs de Maurice Leblanc, n’est-ce pas ? Encore que le prénom Cécily puisse rappeler le Chéri-Bibi de Gaston Leroux, d’ailleurs. L’adresse du bureau des détectives fera sourire les amis du patron de l’agence Fiat-Lux. On pourra décoder d’autres sous-entendus. Même le numéro de téléphone exigé par le héros ne manque pas d’à-propos. Bien que l’époque évoquée soit plus que sombre, cela n’interdit pas une part d’humour. Loulou Chandeleur est la bienvenue dans la galerie des détectives privés. On espère bientôt lire la suite de ses tribulations.
Ray Février, policier de son état et bien décidé d’échapper à la boucherie du front, trouve refuge chez Léonie, une charmante jeune femme qui vit de cela. De bon conseil, celle-ci aide Ray dans sa métamorphose féminine, seul moyen d’esquiver l’appel. Devenu-e Louise Chandeleur, Ray se présente à l’agence de détectives privés que dirige Cécily Barnett depuis que son père est parti à la guerre. Avec dans ses bagages quelque affaire dont il était en charge du temps pas si lointain où il-elle officiait au 36.
Il est des écrivains qui prétendent révolutionner la littérature. Il en est qui y parviennent, il en est qui se fracassent le stylo. Il est des écrivains qui ne prétendent qu’à écrire, à conter des histoires à leurs lecteurs. Il en est qui se fracassent le stylo, il en est qui y parviennent, il en est même qui captivent leurs lecteurs et qui ainsi rejoignent, peut-être, les premiers. Dans quelle catégorie convient-il de verser Frédéric Lenormand ? Pour le moins dans cette dernière, avec ce petit plus, qu’il serait dommageable de négliger : Frédéric Lenormand s’amuse avec les mots qu’il percute les uns aux autres, créant des sons qui charment les lecteurs. Après avoir ressuscité Juge Ti, transformé Voltaire en enquêteur, découvert un parent du grand Arsène, il braque son regard sur la Grande Guerre… Et comme à chaque fois, grâce à son style, à son écriture caméléon, il immerge les lecteurs au cœur des temps qu’il explore et rend présent ce lointain passé. |
Autres titres de |