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PIERRE LEPERE |
Les Roses Noires De La Seine-et-marneAux éditions LA DIFFERENCEVisitez leur site |
280Lectures depuisLe jeudi 19 Mars 2015
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Une lecture de |
Crayencourt est une petite ville résidentielle d'Île-de-France. Proche de la retraite, marié à Carole qui exerce dans le domaine médical, le commandant Sylvain Barral est le chef de la police municipale de cette commune. Juste et bienveillant, il essaie de régler en douceur certains problèmes. Comme dans le cas de Fatima Raffi, promise à un mariage forcé, et de son frère Rachid, qui causa un incident dans un bus. Quand un esclandre se produit au conseil municipal, entre le maire André Joubert et son adjoint Julien Varennes, Barral fait en sorte de garder sa neutralité. Si Crayencourt a été équipée de vidéo-surveillance, c'est à l'initiative de Varennes, qui dirige la société Ibis Sécurité, ce qui constitua une décision discutable. Et si le Club Minos, rendez-vous des fêtards du secteur, doit être racheté par le mafieux russe en exil Vassili Derjavine, Varennes est également concerné par l'affaire. Au sein de la police municipale, existent de petites rivalités entre Barral et ses hommes. Le capitaine Sambart vise le poste de son supérieur. Le jeune lieutenant Angelo Gallocchio, venu de Corse, se range plutôt du côté de Sambart. Voisin du couple Barral, Sambart est marié avec Léa, ex-entraîneuse au Club Minos. Encore que, contrairement aux Barral, ces deux-là n'aient jamais, depuis dix ans, trouvé la plénitude espérée. Un soir où il est seul à la maison, étudiant le dossier du rachat du Club Minos, Sylvain Barral est mortellement poignardé, lardé de multiples coups de couteau. À son retour, sa femme Carole est sous le choc, et restera traumatisée. Également proche de la retraite, la commissaire de police Annie Pasture est combative, au risque de déplaire parfois. Elle avait beaucoup d'estime pour Barral. C'est elle qui hérite de l'enquête, qui s'annonce sans indice probant. Journaliste pour "Le Messager", Jérôme Sernet conserve une indépendance qui ne plaît pas toujours aux dirigeants de cette ville droitière. Un de ses articles s'interroge sur le rachat du Club Minos. Ami d'Annie Pasture, il suit de près les investigations policières. Julien Varennes vient de renouer avec un copain de lycée, Marc Paradine. Ce fut un rebelle au temps de leurs études. Varennes l'engage comme "consultant spécial". En réalité, Marc Paradine est ici en mission pour un organisme secret. Sans doute a-t-il ses raisons pour s'intéresser de près à la collection d'armes du père de Julien Varennes. La commissaire Annie Pasture ne dispose sûrement pas des bonnes cartes pour démêler l'affaire Barral que, côté municipalité, l'on n'est pas fâchés de voir bientôt s'enliser. Quand un cycliste est victime d'un supposé accident de la route, ce n'est pas si naturel. Peu après, c'est une noyade encore présumée accidentelle, qui mérite qu'on se pose quelques questions. Quant au Club Minos, c'est probablement Ivan, le second de Vassili Derjavine, qui finalisera la transaction avec la bénédiction de Varennes. Si l'exécuteur de Sylvain Barral est décédé, il a laissé des aveux qui ne laissent aucune chance au vrai coupable… Partout en France, les communes s'affichent comme des “villes où il fait bon vivre”. On les imagine mal, en effet, affirmant à l'inverse que la population ne serait pas heureuse dans ces endroits. L'argument de la sécurité est le plus prisé : rebaptisée “vidéo-protection”, la surveillance par caméra reste du flicage pas si inoffensif, même pour les honnêtes gens. Il n'est pas interdit de penser que la tranquillité, tant vantée par lesdites villes, entraîne de discrets arrangements et d'éventuelles malversations. Choyées par les mairies, les polices municipales sont-elles si exemplaires ? Quiconque possède une infime parcelle de pouvoir risque d'en abuser, même si ces flics locaux exercent généralement bien leur métier. Voilà, entre autres, ce qu'illustre Pierre Lepère dans cette histoire, à travers la chronique d'une ville francilienne pas aussi paisible qu'on pourrait le croire. Si le contexte est important, une fiction devient crédible grâce à ses personnages. L'auteur soigne tout particulièrement les portraits de ceux-ci. Nous n'ignorons rien du parcours de ce mafieux russe écarté par la nouvelle nomenklatura, du jeune lieutenant qui fut attaché à sa mère, de ce couple fusionnel formé par Sylvain et Carole Barral, de cette policière à laquelle on met dans bâtons dans les roues, de ces élus en bisbille bien qu'étant du même camp. Autant de comportements humains ressemblant de très près à la réalité. L'intrigue criminelle inclut une part d'enquête, mais c'est à travers l'ambiance que progresse le récit, avec une belle fluidité. Écrivain confirmé, Pierre Lepère nous a concocté un noir polar de fort belle qualité. |