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AUGUSTE LE BRETON

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Auguste LE BRETON




Une lecture de
PAUL MAUGENDRE

PAUL MAUGENDRE  

Parution avril 1991. 364 pages.

Hommage à Auguste Le Breton né le 18 février 1913.

Deux jeunes filles interprétant sur le trottoir de vieilles chansons d’avant-guerre, il n’en faut pas plus pour qu’Auguste Le Breton, assis à la terrasse d’un café de la place Blanche se plonge avec nostalgie dans son passé.

A dix-huit ans, les jeunes de cette époque étaient déjà largement émancipés, surtout ceux qui comme Le Breton avaient vécu une enfance difficile, pauvre, sans père ni mère pour les épauler, les choyer, les réconforter. Evadé de l’orphelinat, Le Breton se retrouve sur les pavés parisiens, arpentant les rues d’un trapèze montmartrois haut en couleurs : square des Epinettes, place Clichy, Pigalle, porte de Clignancourt. Cette partie Ouest du XVIIIe arrondissement de la capitale était le repaire des petites frappes et des caïds, nés à Paris ou en province.

A dix-huit ans, Auguste Le Breton navigue dans les eaux troubles de la petite délinquance en compagnie de son ami Dédé-la-Glace. Pour subsister, il effectue de petits boulots, tour-à-tour terrassier, docker, couvreur-zingueur, et même ouvrier dans une société d’ascenseurs. Un emploi qu’il ne garde pas longtemps, viré parce qu’il faisait équipe avec un syndicaliste ayant fomenté une grève. Plus souvent au chômage, il connaît le froid, la faim, la misère, heureux de pouvoir coucher de temps en temps dans de minables chambres d’hôtel.

Souvent il se réfugie au bas des marches du métro, coincé contre les grilles, recherchant un minimum de chaleur. Il organise des parties de bonneteau, jeu de trois cartes qui demande une extrême habileté manuelle et dans lesquelles se font plumer les gogos. Cela ne l’empêche pas de fréquenter les bals de quartier dans lesquels les jeunettes perdaient leur pucelage et se retrouvaient sur le trottoir par amour pour leurs barbeaux. Il y côtoie les maquereaux, les petits et grands truands, un pied de chaque côté de la frontière séparant le légal de l’illégal, au mieux avec Milo Jaquot, caïd légendaire de Saint-Ouen, et bien d’autres.

Les orchestres font florès et les accordéonistes, Gus Viseur en tête, connaissent leurs heures de gloire. C’est ainsi qu’il paie un sandwich à Edith Piaf, alors âgée de seize ans, qui poussait encore sa goualante dans les rues et les bastringues de quartier. Il suit de loin sa carrière, ses déboires, ses avatars amoureux, et sa perdition dans la drogue et l’alcool. Mais c’est surtout au Petit Jardin qu’il fait la rencontre de sa vie : Poulbot, une jeune fille promise elle aussi à un bel avenir de chanteuse mais qui sabre sa carrière par amour pour Le Breton. Un coup de foudre partagé sur l’air du Dénicheur. Et c’est la seule fois qu’il ne partage pas sa bonne fortune avec son ami Dédé-la-Glace. Tandis qu’Auguste Le Breton tente de sortir de l’ornière, Dédé lui s’y fera un trou.

Le Breton goûte également aux joies de la chasse dans les plaines de la Beauce avec ses potes Panafieu, Trintignon, Jo-la-Feuille, Dédé-la-Frotte, Adrien-le-Bique. Le Breton passe rapidement sur la période de la Seconde Guerre mondiale, avouant, presqu’à contrecœur, avoir fabriqué des faux papiers permettant ainsi à quelques juifs d’échapper aux nombreuse rafles de l’époque. Après c’est sa période sud-américaine, parcourant l’Argentine, la Colombie, le Venezuela, côtoyant de près ou de loin truands locaux et immigrés européens : l’ancien champion cycliste José Beyaert, vainqueur du premier tour de Colombie en 1951 ; Lincoln Montero, célèbre pour son Escadron de la Mort brésilien ; le Dr Joseph Mengele, bourreau d’Auschwitz ; Auguste Ricord, considéré comme le caïd de la « French Connection » ; et bien d’autres. Des voyages qui assouvissent sa soif d’aventures et lui fournissent des sujets pour ses romans. Poulbot est toujours présente, mais en pointillés.

Ses mémoires affluent un peu dans le désordre, pêle-mêle, surgissant au gré d’une ritournelle ou d’un souvenir évoqué par Didi, un ancien ami qu’il retrouve place Blanche. C’est également l’occasion pour évoquer Tino Rossi, chanteur débutant encouragé et soutenu par ses compatriotes corses ; Yves Montand échappant de peu aux balles d’un gestapiste français ; Jacques Prévert, l’éternel mégot coincé entre les lèvres. Des mémoires sur lesquelles plane la nostalgie.

Le Breton se fait fort de défendre ses amis les voyous, les truands qui respectaient un code de l’honneur qui n’existe plus aujourd’hui. Il cite volontiers ses livres autobiographiques, Les pégriots, Pour deux sous d’amour, Fortifs, La môme Piaf, Les hauts murs, etc., rappelant qu’il est le coauteur de certains mots comme « rififi » ou « valseur » — arrière-train féminin — …

Un encart central photographique complète cette biographie écrite un peu en l’honneur de la truanderie d’avant guerre.

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