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PIERRE LEMAITRE |
SacrificesAux éditions ALBIN MICHELVisitez leur site |
3456Lectures depuisLe lundi 6 Novembre 2012
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Une lecture de |
Il faut toujours se méfier des stylos baveurs ! Tandis qu’elle flâne dans le bas des Champs-Elysées, près d’une galerie marchande refuge des commerces de luxes, Anne Forestier, en farfouillant dans son sac à main, se barbouille la main avec l’encre de son stylo qui fuit. Elle avise des toilettes et tombe nez à nez avec deux hommes habillés de combinaisons noires, cagoules baissées et armés de fusils à pompe. Tout le monde est surpris mais l’un des deux individus se sert de son arme pour frapper Anne au visage, pour la molester (les policiers aiment bien ce verbe parait-il), pour la frapper violemment à coups de pieds alors qu’elle gît à terre, puis il traine le corps sur une trentaine de mètres, juste à l’entrée d’une joaillerie avant de s’engouffrer dans la boutique. Les malfrats dévalisent la bijouterie en brutalisant l’employée et la propriétaire. Anne qui était dans les vapes parvient à se trainer péniblement sur le trottoir. Des coups de feu sont échangés, pourtant Anne se relève, titube et marche comme un zombie. Les truands sont récupérés par un troisième homme qui conduit une voiture et s’échappent en arrosant les environs à l’aide de leurs armes à feu. Ce braquage a été enregistré par des caméras de surveillance et Camille Verhœven visionne le film avec stupeur et angoisse. Car la quadragénaire qui a été pris à partie par les voleurs n’est autre qu’Anne Forestier, celle qui partage sa vie depuis quelques mois. Et quoiqu’il fasse partie de la Criminelle et que cette affaire n’est pas de son ressort, il s’en empare en avertissant succinctement la commissaire divisionnaire Michard, qui a remplacé dans le service Le Guen, son ami Le Guen qui vient d’être promu à un poste supérieur. Il argue qu’il ne s’agit pas que d’un banal hold-up mais qu’il y a eu présomption de tentative de meurtre aggravé. Et il invente une histoire invraisemblable d’indic qui pourrait, éventuellement, peut-être, lui donner, lui fournir un début de piste, etc. Il affirme ensuite au juge Pereira que la divisionnaire accepte que l’enquête lui soit confiée et vice versa. Camille va mal. Sa femme Irène, décédée cela fait quelques années mais à laquelle il se réfère toujours, est toujours présente dans ses pensées. Son adjoint et ami Armand vient de mourir d’un cancer et il assiste le jour même à son enterrement. Et maintenant Anne passée à tabac par des voyous. Si Le Guen autorise mollement son implication dans cette affaire, il ne lui dit pas tout, ni à son ami et adjoint Louis. Il leur cache sa liaison avec Anne, on se demande pourquoi. Anne est transportée dans un hôpital et Camille lui rend visite. Elle peut à peine parler et les médecins restent sceptiques sur l’évolution de sa guérison. Camille, et Louis, pensent que ce braquage est lié à ceux qui ont été perpétrés quelques mois auparavant, et pensent à un certain Hafner. Une infirmière aperçoit un homme déambulant dans les couloirs de l’hôpital et croit distinguer sous son vêtement un fusil. Mais elle n’est sûre de rien. Toutefois elle en informe Camille qui prend la menace au sérieux.
Cette histoire se déroule sur trois jours, et peu à peu la tension monte. Si le final est sous pression, il en reste toutefois une impression de préfabriqué. Le machiavélisme, le diabolisme dont avait fait preuve Pierre Lemaitre dans Robe de Marié ou dans Alex sont moins convaincants dans ce roman dont certains passages donnent un sentiment de remplissage. Ce n’est plus de la haute couture comme nous avait habitué l’auteur, ni même du sur-mesure, mais du prêt à porter, ou plutôt du prêt à lire. Plaisant mais sans plus, comme un roman formaté issu d’un atelier d’écriture américain. Mais comme il s’agit du troisième tome d’une trilogie consacrée à Camille Verhœven, peut-être Pierre Lemaitre en le rédigeant pensait à un nouvel opus plus en adéquation avec son style et son inspiration.
Anne se retrouve au mauvais moment, au mauvais endroit. Dans la joaillerie où elle pénètre, des braqueurs s’apprêtent à faire main basse sur les bijoux… Est-ce parce qu’elle aurait entrevu le visage de l’un d’entre eux que la violence se déchaîne presque aussitôt ? Anne est frappée au visage d’un coup de crosse de fusil à pompe qui le lui ouvre de la mâchoire jusqu’à la tempe. Puis son corps est roué de coups de pieds avant d’être de nouveau pilonné de coups de crosse de fusil… Et cette violence brutale, indistincte et sauvage se déploie sous la plume glaciale et méthodique d’un Pierre Lemaitre distant. Là où d’autres auteurs auraient tout fait pour que naisse l’empathie du lecteur envers Anne, Pierre Lemaitre focalise différemment ses intentions. Il ne semble guidé que par la volonté de faire ressentir à son lecteur, jusque dans sa chair, la folle inhumanité des truands. Après cette accroche déstabilisante, le roman poursuit son chemin narratif sur des routes plus coutumières du genre. Afin de pouvoir se charger de l’enquête, le commandant de police Camille Verhoven va omettre de préciser à sa hiérarchie qu’Anne est sa maîtresse ; L’un des braqueurs, après avoir éliminé ses deux complices, va tenter de tuer Anne à plusieurs reprises. La police reconnaîtra dans les méthodes de braquage la signature d’un ancien truand que chacun croyait retiré… Mais pendant ce temps, nous pressentons que sous cette affaire de banal braquage ultra violent se dissimule autre chose. Sinon pourquoi des trois narrateurs, Camille, Anne et le tueur, seul ce dernier s’exprimer à la première personne ? |
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