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PETER LEONARD |
Ne Tremble Pas !Aux éditions L ARCHIPEL |
2653Lectures depuisLe jeudi 22 Juin 2012
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Une lecture de |
Owen McCall a été une gloire de la NASCAR, un pro du stock-car, ce qui fit sa fortune. Il était marié à Kate depuis seize ans, avec qui il avait un fils de cet âge, Luke. Blonde aux yeux bleus, son épouse fit aussi preuve d’intrépidité par le passé. Son séjour au Guatemala fut émaillé d’aventures à hauts risques. Sans doute est-ce cette témérité en commun qui en fit un couple solide. À 49 ans, Owen McCall vient de mourir, suite à un accident de chasse. C’est son fils Luke qui a tiré cette maudite flèche mortelle. Depuis, le jeune homme est dépressif, limite suicidaire, conscient qu’il est de sa douloureuse responsabilité. Kate hérite de vingt millions de dollars, jolie somme qui sera gérée par Dick May, l’avocat et ami d’Owen. Elle s’inquiète de la santé morale de son fils, en particulier quand il a des ennuis après une sérieuse alcoolémie. Mais il faudra bien tourner la page. Jack Curran est un repris de justice. Il vient de passer trente-huit mois en prison, dans l’Arizona. Se prétendant assagi grâce à la religion, Jack a bénéficié d’une remise de peine en semi-liberté. Puis il a rejoint sa sœur Jodie à Détroit. Ce n’est pas exactement par hasard que Jack renoue avec Kate McCall, qu’il sait veuve et riche. Si elle reste attirée par son ex-petit ami du temps de leur adolescence, qui lui rendit service pour sortir une amie du Guatemala, Kate est réaliste. Jack est un type sans grande envergure, qui aura toujours la poisse. Celui-ci avait des complices, pour le braquage qui l’a conduit en tôle. Dejuan, un Noir, qui accepte de jouer au tueur à gages. Récemment, un Mormon l’a engagé pour supprimer sa femme. Mais l’épouse payait mieux. Autre complice, Teddy, qui a connu Owen McCall par le passé. Il forme un duo avec Céleste, une Blanche aryenne, pas moins dangereuse que lui. Sa planque ayant été détruite, Jack n’a plus les 257.000 dollars du butin, que lui réclament aujourd’hui ses ex-complices. Mais il leur reste la solution d’approcher Kate McCall et son pactole. La méthode douce étant sans succès, les truands vont probablement devoir passer à la manière forte, entre menaces et violence. C’est ignorer que Luke a besoin de se racheter. Et que Kate dispose d’alliés efficaces, tel cet Indien nommé Johnny Crow. Carnage en perspective… Avec “N’ayez crainte”, son premier titre publié en français, Peter Leonard nous avait déjà largement convaincus. Oui, le fils du mythique Elmore Leonard était à la hauteur. “Ne tremble pas” confirme à merveille son réel talent dans la comédie noire à suspense. Dans ce genre d’histoire, on se doit d’éviter le caricatural ou le théâtral. C’est justement le point fort de ce roman, qui dépeint des personnages certes chargés, pour autant quand même crédibles. Jack est un loser, tout en étant capable de ruse et d’initiative. Luke est dépressif car fautif, mais on sent qu’il peut réagir. Notons de savoureuses scènes, avec le couple Teddy et Céleste, si mal assorti. Quant à Kate, c’est loin d’être une faible femme dont le veuvage ferait une proie facile. On s’amuse beaucoup à la lecture des faits et méfaits de ce groupe de personnes, qui se dirigent vers un dénouement plutôt agité. C’est palpitant à souhaits, on en redemande !
Fut-ce la recommandation prononcée par Guillaume Tel à son fils alors qu’il plaçait une pomme destinée à être transpercée par une flèche ? L’art chez l’archer, c’est d’être capable de bander au bon moment et à bon escient. Et Luke McCall n’a pas totalement assimilé les conseils de son père. Il est tétanisé au moment de décocher sa flèche et cet incident va le plonger dans le désarroi et couter la vie à son père. Mais auparavant effectuons un retour de dix-sept ans en arrière. Souvent un couple se forme entre collègues de travail, entre deux personnes qui se rencontrent lors d’une soirée organisée par des amis conjoints ou lors d’un mariage, dans un dancing, ou tout autre événement festif. Entre Owen McCall et Kate, leur rencontre fut consécutif à un accident de chariot dans un supermarché. Normal, Owen est pilote de stock-car et les accrochages entre véhicules, cela le connait. Il leur suffit d’un repas pour sceller leur carambolage et de faire plus amplement connaissance, repas au cours duquel ils échangent leurs adresses, leurs souvenirs d’adolescents, leurs mésaventures professionnelles ou amoureuses, leurs impressions et entamer une complicité qui ne fera plus défaut. Owen a été coureur automobile, construisant ses voitures avec un ami, a eu un accident qui l’a amené à rompre avec sa petite amie, puis il a été blessé à l’épaule par un concurrent vindicatif et atrabilaire, Teddy Hicks, dont depuis il n’a pas eu de nouvelles. Actuellement il dirige une concession automobile. Kate a vécu une jeunesse tranquille, se montrant une joueuse de tennis en devenir jusqu’à ce qu’un genou déclare forfait. L’envie de voyager la tenaillant, elle s’engage dans les Peace Corps et est envoyée au Guatemala afin d’enseigner l’anglais aux gamins. Elle se lie d’amitié avec une autochtone laquelle désire rejoindre son mari aux USA et qui surtout résiste aux avances d’un chef de la police locale. Mais c’est Kate qui va subir les affres du policier et de ses hommes, et elle parviendra à leur fausser compagnie en les abattant avec leurs propres armes. Puis retour au pays rejoindre Jake son fiancé du moment avec lequel depuis elle a rompu. Cinq mois plus tard Owen et Kate concrétisent leur union par un mariage et il ne faut que quatre mois supplémentaires pour que Luke débarque au foyer. Seize ans plus tard, Owen emmène son fils pour une partie de chasse dans un chalet qu’il possède sur la péninsule de Leelanau, en lisière de forêt et du lac Michigan. Ils partent à la recherche d’un grand cerf à queue blanche et lorsqu’Owen parvient à débusquer l’animal, Luke doit armer son arc et tirer. Seulement l’appréhension l’étreint et l’accident est inévitable. Owen décède, Kate perçoit un héritage de deux millions de dollars mais Luke se replie sur lui-même. Il délaisse l’école, s’enferme dans son chagrin, s’adonne à l’alcool et à la drogue. Jake, l’ancien petit ami de Kate sort de prison, ayant purgé une peine pour cambriolage et il doit trouver du travail et fournir une adresse. Alors il décide de revenir à Détroit chez sa sœur qui est technicienne ongulaire (en langage courant manucure) et retrouve ses copains de méfaits. Hicks, celui qui s’est coltiné avec Owen, le monde est petit, Dejuan et son amie Céleste, l’intellectuelle et l’égérie de la bande. Jake rencontre Kate par hasard (qui fait bien les choses) et il espère renouer avec elle. Surtout pour palper l’héritage ? Pas forcément, quoique. Seulement ses compagnons lui démontrent qu’il vaudrait mieux qu’ils s’associent pour empocher l’argent, d’autant qu’il leur est redevable d’une grande part d’un casse précédent. Et bien évidemment les choses vont mal tourner. Peter Leonard a reçu de son père en héritage le sens de la dérision aussi bien dans les descriptions des scènes d’action que dans les dialogues, tout en gardant un sérieux dans la construction de l’intrigue et dans l’ensemble de l’histoire. Les moments forts, durs, noirs, flirtent avec l’humour goguenard. Ainsi lors de la rencontre inopinée entre Kate et Owen, par chariot interposé, l’échange verbal qui s’ensuit donne le ton et ne manque pas de saveur. Je ne vous connais pas, dit Kate. On vient de faire connaissance, non ? Vous pourriez être un violeur. Je pourrais même être républicain. Ce dialogue badin est placé comme une vignette amusante, mais d’autres conversations prennent un tour plus sérieux et même politique, mais toujours exprimé à l’emporte-pièce. Le père de Céleste était un raciste qui avait tenté d’inculquer à sa fille la haine de tous ceux dont le sang n’était pas à cent pour cent aryen. Peine perdue car elle vit avec un Noir. Elle a longtemps fréquenté les Nations aryennes sous l’influence paternelle, mais s’en est détachée et lorsqu’elle essaye d’expliquer ce moment de son adolescence à Teddy, celui-ci est complètement perdu.
Teddy parut troublé.
Lui arrivait-il de piger quoi que ce soit ? Evidemment le lecteur qui lit cet échange au premier degré peut penser à une banale conversation raciste, mais il s’agit bien d’une diatribe envers la résurgence du nazisme aux Etats-Unis tout en mettant l’accent sur la bêtise de Teddy qui personnifie l’Américain moyen. J’ai relevé aussi, dans un autre domaine, un petit papotage qui ne manque pas chez une coiffeuse, mais je ne vous en dis pas plus, préférant vous laisser le plaisir de la découverte. Peter Leonard ne démérite pas en prenant le relais de son père. Même s’il doit effectuer de petits réglages, parfois trop de coïncidences, il se trouve dans la bonne spirale. Evidemment on aurait pu s’attendre à un épilogue spectaculaire, mais la conclusion si elle est banale ou convenue n’en reflète pas moins une réalité à laquelle la vie nous a habitué. Point n’est besoin de forcer dans le superfétatoire pour conclure une histoire bien menée qui engendre la satisfaction de ne pas avoir perdu son temps. |
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