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JEROME LEROY |
Le BlocAux éditions SERIE NOIREVisitez leur site |
641Lectures depuisLe mercredi 23 Novembre 2011
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Une lecture de |
Unité de temps, mais ni d’action, ni de lieu pour ce long flash back. Deux hommes vivent une bien longue nuit, qui, pour des raisons profondément opposées, les conduit à revivre leur passé. Le premier, homme de lettres, est « devenu fasciste pour un sexe de fille ». Pas n’importe quelle fille. Antoine est marié à « la fille » de l’ex patron du Bloc. Dans cette nuit, en raison d’émeutes que ce parti à tout fait pour entretenir, un gouvernement d’urgence est en train de naitre dans lequel vont entrer dix ministres d’extrême-droite. Pour « rassurer » la population… Antoine revoit sa vie, de petit fils de résistant communiste à futur secrétaire d’état de la pire droite qui soit. Adolescent violent, tenté par les extrêmes, mettant son intelligence hors norme au service d’une droite minoritaire, il est devenu cet idéologue blasé habitué aux insultes sur les plateaux de télévision. L’autre homme est entré au Bloc comme on va se réchauffer à la cuisine en hiver. Violent, marqué par une enfance en milieu ouvrier ravagé par le chômage, un passage chez les paras, le crâne rasé. Amoureux de la violence pour elle-même, il a mis celle-ci au service de son racisme et de son antisémitisme. Son amitié avec le premier repose sur le partage du plaisir de l’affrontement, de la « casse »… Pourtant, il risque d’être sacrifié, l’acceptant même comme une inévitable fin. Le premier va-t-il sauver le second ? On le sait au terme de cette longue nuit d’attente, permettant aux deux hommes de se remémorer leur passé, profondément marqué par leur appartenance au « Bloc ». Bien sur, tout ça est d’une transparence totale. Le patron manchot est borgne dans la vraie vie. Le « Bloc » a le front bas… On ne doute pas de l’organisation de son service d’ordre comparable à une milice privée. On ne doute pas que certains de ses théoriciens soient des hommes sensibles et cultivés, mais mutilés de l’âme. On ne doute pas que ses casseurs aient été des enfants sacrifiés. On ne doute pas qu’un père puisse aimer sa fille, ni sa fille être femme dans l’intimité. Ce livre m’a mise profondément mal à l’aise Au point de ne savoir véritablement quoi lui reprocher. Pas le style, soigné, pas la construction, intelligente. Pas le procédé de base, empruntant aux tragédies classiques. Sans doute mon interrogation porte-t-elle sur la nécessité d’humaniser ainsi les protagonistes d’une sinistre fiction ? Quel but se fixait Leroy ? Faire peur ? Réveiller les consciences ? Interroger chacun sur sa tiédeur, rappelant que tout peut arriver, le système permettant tout à qui manque de scrupules ? J’ai envie de dire que le livre est trop réussi, et que cette fiction, si elle avait pour but d’alerter sur la montée du fascisme en France, aura peut-être l’effet inverse, encourageant certains bas du front à s’identifier au personnage de soldat perdu ou certains amoureux de la belle langue à celui du lecteur de Brasillach… Non, sans doute, ce roman n’aura pas ce pouvoir, mais je continue à m’interroger sur le message qu’il ne peut manquer de porter et que je découvre, soudain troublée, brouillé par le talent de Jérôme Leroy. 296 pages, 17€50, |
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