|
|
ALAIN LE GRAND |
Promenade En Zone RougeAux éditions L'ARCHIPELVisitez leur site |
1148Lectures depuisLe mardi 26 Octobre 2010
|
Une lecture de |
Un recueil de nouvelles, c’est comme lorsqu’au dessert, la maîtresse de maison vous propose des petits fours, au lieu du gros gâteau traditionnel et roboratif, genre étouffe-chrétien. Chacun peut puiser dans son assiette ce qu’il préfère, mais comme toutes ces pâtisseries sont excellentes, la fournée y passe sans aucun regret. Vous pouvez ainsi procéder avec le recueil d’Alain Le Grand, les titres remplaçant les emballages et en les déballant vous sentez tout de suite un parfum d’exotisme, pas trop appuyé, un parfum dissimulé, qui malgré tout vous procure comme un goût qui ne vous est pas inconnu. Car ses nouvelles qui se passent en Amérique du Sud, dans un pays qui n’est pas nommé mais que l’on identifie aisément comme la Colombie, ne sont pas typiques à cet état qui est renommé pour ses cartels de la drogue, ses guérilleros, ses bidonvilles. En effet quelques unes pourraient très bien être situées en France, ou ailleurs, comme Un gentil commissaire qui interroge un petit voleur de voitures pris en flagrant délit. Afin de lui faire avouer le nom de son commanditaire, il demande à l’un de ses subordonnés de procédé à un interrogatoire musclé à l’aide d’un annuaire : L’avantage de sa méthode, c’est qu’elle ne laisse pas de traces visibles. C’est un copain flic français qui me l’a apprise, le coup de l’annuaire téléphonique, ils l’utilisent pas mal avec les Arabes. Roses de trottoir est une scène de la vie courante, commune à beaucoup de pays. Une jeune fille vend des roses sur les trottoirs de la ville, afin de pouvoir subsister. Elle en profite pour s’intéresser aux autres marchands ambulants, aux artistes de rues qui gravitent autour d’elle, cherchant eux aussi par des moyens légaux ou non à survivre. Si elle s’y intéresse, c’est plus comme entomologiste de la faune locale que par véritable intérêt. Dans Les visiteurs, une famille de fermier est terrorisée un soir par trois guérilleros qui leur demandent de déguerpir, leur ferme étant considérée comme un lieu stratégique. Jorge le père refuse dans un premier temps mais les trois combattants possèdent des arguments tranchants. La déprime du chef met en scène un camp de guérilleros dans lequel une quinzaine de prisonniers croupissent. Mais le chef s’ennuie et il repense à quelques événements qui sont survenu depuis qu’il est dans la forêt en compagnie de ses hommes. Aux gringos qui lui ont rendu visite afin d’avoir des lopins de terre à cultiver, à sa femme qui est partie s’exiler à Panama, à ses otages. Il possède la télévision satellite, mais il ne s’en sert que pour regarder les informations, celles du pays, celles du monde sur CNN ou la BBC. On ne parle presque jamais du mouvement sur les chaines internationales, sauf pour s’inquiéter du sort de la prisonnière qui intéresse tant les Français. Le chef se laisse parfois aller à un instant de mélancolie, le monde ne s’intéresse plus à nous. Al-Qaïda nous a fait passer de mode. Si cette histoire est inscrite géographiquement, La promenade de Jaime, tout comme Roses de trottoir, est universelle. Jaime, homme financièrement aisé mais abandonné par son épouse, traîne le soir dans les rues, dans les bars, pour fuir sa solitude. Il n’arrive même plus à se montrer à la hauteur avec les jeunes femmes tarifées. Un soir il est abordé par deux adolescents, et contrairement à ce qu’il aurait pu croire, comme si un double avait investi son corps, il résiste à leurs menaces. Dans Le Prof, un cinéaste réalise de petits films très particuliers, et Face à face oppose un soldat à un guérillero blessé. En tout onze petites friandises, d’épaisseur inégale mais à la saveur constante, à déguster sans modération. Ecrivain peu prolifique, Alain Le Grand s’est fait remarquer en obtenant le Prix SNCF du premier polar 2003 pour e-Zone édité par Nicolas Philippe. |