|
|
NATSUO KIRINO |
Le Vrai MondeAux éditions SEUILVisitez leur site |
2016Lectures depuisLe jeudi 25 Fevrier 2010
|
Une lecture de |
Dans la banlieue de Tokyo, vivent quatre copines lycéennes d’environ dix-sept ans, de caractères fort différents. Bien qu’appartenant à une famille équilibrée, Toshiko trouve le monde actuel agressif. En ce mois d’août caniculaire, elle suit les cours intensifs de “l’institut de gavage”. Ce jour-là, on lui a volé son vélo, et elle a perdu son portable. Rentrant chez elle, Toshiko apprend que leur voisine a été assassinée. Le fils de la victime, que ses copines et elle nomment le Lombric, est le probable coupable. Toshiko a compris que c’est lui le voleur du vélo et du portable, mais n’en dit rien aux policiers. Elle contacte ses amies Yuzan, Kirarin et Terauchi, pour leur raconter ce qui s’est passé. Elles ne sont pas surprises quand le Lombric leur téléphone, grâce au répertoire du portable. Yuzan est la plus marginale du groupe. Peu féminine, elle se pense lesbienne, et fréquente des amies assez spéciales. À traîner dans des quartiers mal famés, elle a fini par être sévèrement agressée. Son avenir lui apparaît incertain. Ce qui rapproche Yuzan du Lombric, c’est que sa mère est aussi décédée, mais de maladie. Elle lui fournit un vélo et un autre portable, pour qu’il poursuive sa cavale. Ryo, dit le Lombric, ne regrette pas son geste. Élève moyen, il subissait la pression d’une mère croyant bien faire. Le Lombric se voit comme “l’héritier d’un péquenaud et d’une pouffiasse. Et n’était-ce pas elle qui m’avait large dans un endroit où il n’y a pas la moindre fille. Pourtant, voilà qu’elle me demandait si je tombais des nanas ! Elle me demandait ça parce qu’elle avait conscience que ses méthodes d’éducation étaient un échec.” Sa version de la “normalité” irritait le jeune Ryo. Les conflits étaient permanents, jusqu’au jour fatidique. La plus allumeuse des quatre copines, c’est Kirarin. Elle participe à une autre bande de filles, les Joyeuses Drilles, qui aguichent les garçons. Seuls ses amours d’adolescente sont au cœur de ses préoccupations. Excitée par le cas du Lombric matricide, elle le rejoint bientôt. Bien qu’il ne soit guère à son goût, elle retient son côté “héros”. Pour dormir, le couple se réfugie dans un Love Hotel. L’esprit du Lombric dérape, il s’imagine en militaire, envisage de retourner chez lui pour tuer son père. “Qui sait, peut-être que je suis un génie, après tout ? Le problème, c’est que personne n’est au courrant […] J’aurais dû dire au monde quel génie j’étais, mais j’ai merdé en oubliant de laisser une lettre dans ma chambre.” Il téléphone à Terauchi, pour qu’elle rédige à sa place son message, son manifeste. Intelligente, la jeune fille a des idées compliquées sur la vie. Elle n’éprouve aucune pitié pour le Lombric, dont la cavale semble vouée à l’échec… L’auteur fait dire au jeune fuyard : “Les romans sont proches de la vraie vie, c’est comme s’ils montraient le monde après en avoir épluché une couche, une réalité qu’on ne pourrait pas voir autrement. Ce que je veux dire, c’est qu’ils ne sont pas superficiels.” En effet, les portraits de ces adolescentes nous présentent une facette éloignée de cette perfection japonaise tant vantée. Il est naturel que des jeunes cherchent leur voie, leur équilibre, ce que la culture de ce pays n’admet peut-être pas. Ces jeunes filles aident le Lombric pour des raisons différentes, mais toujours par méfiance pour le monde adulte. Elles vivent une sorte d’expérience qui exprime un besoin de “hors norme”. En les comparant à des funambules sur un fil, leur jeu débute de façon quasi-ludique, mais pourrait finir par une série de brutales chutes. Il s’agit de ce qu’on qualifie aujourd’hui de “roman choral”, à plusieurs voix. Ce qui permet d’approcher au plus près du vécu de ces personnages, de leurs sentiments face à une situation périlleuse. Par la justesse de sa tonalité et de son ambiance, une histoire très convaincante, vraiment passionnante. |
Autres titres de |