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ANNE-SOLEN KERBRAT-PERSONNIC |
Un Simple Grain De SableAux éditions DU PALEMONVisitez leur site |
919Lectures depuisLe mercredi 19 Juillet 2017
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Une lecture de |
Série Perrot et Lefèvre N°10. Parution le 8 avril 2017. 368 pages. 10,00€. Mourir dans son sommeil, c'est bien, mais de façon naturelle, c'est mieux ! Bientôt nonagénaire, Gabrielle du Breil vit dans son bel appartement sis dans un immeuble cossu des Sables-d'Olonne. D'ailleurs elle ne se plaint pas. Elle vit seule mais reçoit très souvent la visite de sa jeune amie Cécilia. Plus jeune qu'elle car la "jeune" femme est toutefois quinquagénaire (et non cinquantenaire, ce terme désignant l'anniversaire d'un événement célébré au bout de cinquante ans) et travaille comme négociatrice pour une agence immobilière. Et une femme de ménage, Candida, d'origine portugaise mariée à Luis, et mère d'un petit Pedro, vient tous les jours en début d'après-midi pour faire la poussière. Parfois Rodolphe, un promoteur événementiel, accompagne Cécilia dont il est l'amant. Ils en ont l'âge, ils sont encore beaux, et célibataires, et ceci ne nous regarde pas. Sauf que Rodolphe n'est pas toujours disponible, il ne termine pas ses nuits. Cécilia se lasse et elle trouve en André, un client de l'agence, une épaule compatissante et plus présente. A part ces trois personnes, les visites sont rares, même si une fois, il n'y a guère, un homme a désiré rencontrer Gabrielle mais Candida ne lui a pas laissé la possibilité d'entrer. Ah, j'allais oublier le toubib, un nouveau, l'ancien étant parti vers le Sud, comme la plupart des généralistes. Cécilia promène parfois Gabrielle, afin de lui changer les idées, marchant à petit pas. Mais en ce mois de juillet, le soleil darde abondamment ses rayons sur la cité balnéaire des Sables-d'Olonne, et les sorties sont écourtées. De petits faits insignifiants pourtant s'instaurent dans cette vie quiète. Cécilia se rend compte que la vieille dame, qui n'est pas indigne, perdu un peu la tête. Oh, pas grand chose, mais elle a des oublis. Et puis Gabrielle à une tendance de plus en plus manifeste à ingurgiter de petits verres de Porto. Normal quand on a une "bonne" native de ce pays fournisseur de cette boisson légèrement alcoolisée. Mais n'y voyez aucune relation de cause à effets. Candida est très maniaque, et elle traque les grains de poussière jusque sous les tapis. C'est ainsi qu'elle s'aperçoit que des objets supposés posséder de la valeur ont disparu. Notamment un tableau représentant un visage de face et profil. Un tableau qu'elle n'apprécie guère, mais les goûts et les couleurs, n'est-ce pas... Mais toutes ces personnes, récapitulons, Cécilia, Rodolphe, Candida et Luis son mari, possèdent un point commun. Des difficultés financières. Surtout Luis, maçon-couvreur, qui vient de perdre son emploi à cause des restrictions de personnel opérées par son entreprise.
En ce trois août, Candida découvre sa patronne qui a décédé dans la nuit, et dans son sommeil. A son âge, ce n'est guère étonnant pour la plupart des gens. Seulement, la position inhabituelle de Gabrielle dans son lit lui paraît anormale. Elle n'ose pas dire que la vieille dame, veuve et sans enfants, a été assassinée, mais elle se pose des questions. Et elle cherche une réponse auprès du commissariat des Sables-d'Olonne où officient en renfort le commandant Perrot et son ami le capitaine Lefèvre. Et elle est si convaincante que les deux policiers décident d'ouvrir une enquête. Pourtant le médecin de famille a signé le bon d'inhumation sans barguigner. Et ce qu'ils récoltent, notamment auprès du médecin légiste, confirme les suppositions de Candida. La vieille dame aurait été étouffée par un oreiller et il est peu probable qu'elle se le soit posé sur le visage, ou alors il s'agirait d'un suicide. La piste n'est pas même évoquée. Des interférences médicamenteuses s'inscrivent dans le processus habituel des enquêtes, et voici nos deux policiers à la recherche d'un criminel. Le nombre des présumés coupables est assez restreint, encore faut-il bien cerner cet entourage. Et des faits cachés se trouvent mis au jour comme s'il s'agissait d'un cadavre dans un placard. Une qui pourrait se mordre les doigts, c'est bien Candida dont le mari est toujours sans emploi et comme ils ne roulent pas sur l'or, il devient le candidat idéal.
Après une longue mais intéressante présentation des personnages, le lecteur arrive au point crucial, la page 97, lorsque Candida découvre sa patronne décédée. Ensuite ce sont les déambulations, les recherches, les supputations, les confrontations, de Perrot et Lefèvre qui alimentent l'intrigue avec posé sur une table de nuit un moustique délateur. Un roman policier qui oscille sans violence, sans vulgarité, avec une pointe de suspense, et lorgne vers le roman d'énigme à l'anglaise. Parfois cela m'a fait penser à Ruth Rendell avec ces digressions qui ramènent peu à peu le lecteur dans l'intrigue. Si le passé des principaux intervenants est disséqué, quelquefois après leur mort comme pour Gabrielle, la vie quotidienne des policiers est également évoquée. Perrot soigne sa ligne tandis que Lefèvre est un éternel affamé, ce qui d'ailleurs n'influe pas sur sa surcharge pondérale. Perrot possède sa fracture sentimentale et familiale qui le travaille de temps à autre et il rumine, sa femme et ses enfants lui manquant. Un roman policier simple et pourtant complexe, dans lequel les chausse-trappes sont placées à dessein afin de happer le lecteur friand d'intrigues bien construites, même si le personnage de Cécilia, quinquagénaire rappelé-je, se conduit parfois un peu comme une midinette adolescente.
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