Mais que se passe-t-il ? Dans un avion de ligne qui relie Osaka à Tokyo, un passager sortant des toilettes découvre qu’il n’y plus de passagers dans la carlingue et que la cabine de pilotage est vide de tout occupant. Maria, technicienne de surface chez Biometrics, une société qui stocke et gère les empreintes génétiques des criminels pour le gouvernement fédéral américain, est toute surprise de ne rencontrer aucune âme qui vive dans le hall alors que d’habitude c’est l’affluence autour de la machine à café. D’autres événements similaires se produisent de par le monde. Korta, chercheur à la Biometrics, misanthrope, qui ne vit que pour ses recherches, « emprunte » au petit matin un camion en sortant de son laboratoire, puis s’amuse à percuter des voitures, à traverser un square démolissant les jeux pour enfants, à défoncer la vitrine d’un magasin de farces et attrapes, la boutique explosant, et laisse son véhicule sur place, tout en chronométrant sa virée. Lorsqu’il entre chez celui avec qui il avait rendez-vous, il regarde par la fenêtre, tout est intact dans la rue, comme rien ne s’était passé. Vincent, avocat de sans abris et de sans papiers à Londres se voit prendre l’empreinte de son iris comme bon nombre de personnes, subit lui aussi le même genre de désagrément et s’en ouvre à April, chercheuse scientifique elle aussi dans la capitale britannique. April dont elle n’est pas sûre du renouvellement des subventions lui permettant de s’investir dans son travail, communique régulièrement avec Korta ses résultats sur les recherches de la génétique contenue dans l’iris humain. Mais une autre découverte inquiète April tandis que Korta lui au contraire s’en délecte. Il s’agit d’un calque dans le temps, qui pourrait être utilisé à des fins non avouables, avec la participation involontaire de 99 personnes durant 9999 secondes. Cette galerie de personnages plus ou moins farfelus ou dangereux comporte également un psychanalyste qui ressent une pulsion quasiment incontrôlable, l’envie de lécher des vitres, le cuir de ses fauteuils et autres objets afin de s’assurer qu’ils existent bien. Ou encore ce dentiste qui collectionne les dentures et mâchoires d’hommes célèbres, la dernière en date étant celle de Staline, ou encore un magicien, un tueur à gages. Placé sous le patronage de Shakespeare et de sa pièce Timon d’Athènes, ce roman mi thriller mi science fiction, est ponctué de courts chapitres dans lesquels évoluent tous ces protagonistes. L’écriture est comme sculptée au scalpel. L’on est en droit de se demander jusqu’où la recherche scientifique et médicale pourra aller et quels seront les effets pervers qui en découleront. Les savants fous sont légion dans le roman dit populaire, mais dans la réalité aussi. Et notre quotidien est ponctué par l’annonce d’avancées médicales qui parfois font froid dans le dos. Et sans vouloir m’amuser à effectuer un mauvais jeu de mot, je pourrais dire qu’il faut garder un œil sur Hadrien Klent.
|
|
