|
|
PASCAL JAHOUEL |
Sous-pressionAux éditions LAJOUANIEVisitez leur site |
1395Lectures depuisLe mercredi 24 Janvier 2018
|
Une lecture de |
Une enquête de B H L. Collection Roman policier mais pas que… Parution le 8 décembre 2017. 240 pages. 18,00€. Et en dépression… Construit comme un quatre-quarts littéraire, ce roman est composé de quelques cuillers de San-Antonio, d’une louche d’Auguste Le Breton, de pincées d’Ange Bastiani, et d’une grosse poignée de Francis Carco. Mais pétri avec amour par Pascal Jahouel, toujours à la recherche d’un vocabulaire qui porte et touche, la patte d’un amoureux des mots et des maux. Il triture, tripatouille, patouille, malaxe, concasse, il apporte un liant entre argot ancien, français élaboré et sémantique technicienne. C’est dire si cet ouvrage sort des sentiers battus, même si, pour se conformer à une mode actuelle que je déplore, des anglicismes apparaissent de-ci de-là comme de petits cailloux dans une platée de lentilles. BHL, Bertrand-Hilaire Lejeune, à ne pas confondre avec l’homme à la chemise blanche qui ne se salit jamais, est dans le creux de la vague. Et ce n’est pas qu’une figure de rhétorique puisqu’il est hébergé momentanément chez ses parents au Havre. Il a envoyé sa lettre de démission à son commissaire rouennais, Chassevent, qui l’a mise dans un tiroir, et depuis il déprime. Revenir chez ses parents, c’est bien, mais pour un certain temps seulement, car les frictions ne manquent pas. Nous ne rentrerons pas dans les détails, cela relève du domaine privé, mais il lui faut trouver une porte de sortie. Et celle-ci pourrait très bien être cette disparition en pleine mer du côté du cap d’Antifer. Un plongeur, qui n’est pourtant pas un débutant, a disparu dans les flots gris de la mer de la Manche, tandis que sa copine du moment se prélassait sur son yacht. Le temps était au beau, même chaud pour une fois, et au bout d’un certain temps, voire d’un temps certain, elle s’est inquiétée de ne pas le voir remonter à la surface, ne serait-ce que pour admirer sa plastique superbe. Quoi que ce ne soit pas un artiste, BHL a besoin de cachets pour soigner sa dépression et donc il se rend chez un toubib, le remplaçant du médecin de famille. Le praticien est énervant à s’obstiner à s’adresser à ses patients, heureusement qu’ils le sont, à la troisième personne. Je passe sur rapidement sur les échanges savoureux échangés entre BHL et le médicastre généraliste, mais BHL sort de l’antre avec deux renseignements. Le premier, c’est que le disparu en mer amer, était un ami de longue date du toubib, s’étant fréquentés sur les bancs universitaires médicaux, et la seconde, l’adresse d’une psy, chologue ou chiatre, afin qu’elle lui déverrouille les neurones. Rendez-vous est pris, et malgré la différence d’âge, un peu comme Emmanuel et Brigitte, il s’établit entre la spécialiste de l’essorage du cerveau une avancée dans la prise de contact d’atomes crochus. Et comme dérivatif, BHL se voit confier, voire imposer, par son commissaire rouennais, qui ne ménage pas ses coups de sang comme le canard du même nom, l’enquête sur la disparition bientôt suivie d’un nouveau noyé dans le port, non pas d’Amsterdam mais du Havre. Le tout avec la bénédiction du commissaire havrais qui va mettre à sa disposition un bureau et un équipier, Jean-Baptiste Monlouis-Bonheur, lequel, aimable, affable, et possédant un physique à la Teddy Riner, lui propose de l’héberger dans la demeure de ses parents qui sont absents pour quelques semaines. Donc, et comme évoqué rapidement ci-dessus, un noyé a été retrouvé dans le port, ayant probablement chuté à la baille par suite de tangage éthylique et assommé par les coquilles de noix accrochées aux bites d’amarrage prévues pour empêcher les petits bateaux de naviguer sur l’eau au gré de leur convenance. C’est comme pour les ados, faut les tenir par le licol, sinon ils font n’importe quoi. Donc le noyé, j’y reviens, était également un ami du toubib, et comme si la dose n’était pas atteinte un troisième larron est découvert occis. Mais j’anticipe. BHL se rend chez l’épouse qui est supposée la veuve du disparu (vous suivez ?) et les pistes de l’argent ou d’une vengeance quelconque de sa part, sont à écarter. C’est elle qui ramène le gros du portefeuille et les frasques de son mari l’indifférent. Il y aurait bien un petit sentier à remonter, on ne sait jamais, celui de l’appartenance politique du disparu qui émargeait au PPD, le Parti des Patriotes Debout, catalogué à tribord toute.
Entre joyeusetés et délire organisé sous l’influence de blondes, ambrées, rousses ou brunes, mais pas de blanches, des bières je précise, qu’ingurgite copieusement notre héros, ce roman débute dans la bonne humeur dépressive. Mais bientôt cela sombre dans le sombre, le très sombre même. Car sous une impression de légèreté stylistique, le noir prend le pas et BHL n’hésite pas à se mouiller dans les embruns havrais et les événements qui parsèment son enquête. Et pour le scripteur, c’est une plongée dans son enfance. Du temps où le terminal d’Antifer n’existait pas et qu’il allait voir les paquebots accoster, les grues décharger les bananiers et autres cargos, qu’il remontait la côte de Montivilliers ou les escaliers longeant le funiculaire qui menait à Sanvic, alors commune à part entière sur les hauteurs du Havre, le pain de sucre et les casemates, Sainte-Adresse, Bléville, et combien d’autres images restées gravées. Mais ceci n’est que nostalgie enfantine et donc hors propos. Pascal Jahouel est, d’après le rabat de la quatrième de couverture, architecte dans la vie civile, pourtant ce roman, même s’il est en béton, n’est pas bâti comme les édifices de la reconstruction dus à Auguste Perret qui a laissé son empreinte sur la porte océane, mais serait plutôt à rapprocher d’un autre architecte, amateur celui-ci, qui s’est investi dans le baroque naïf et son fameux palais, le facteur Ferdinand Cheval. |
Autres titres de |