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HALLGRIMUR HELGASON |
La Femme à 1000Aux éditions PRESSES DE LA CITEVisitez leur site |
2038Lectures depuisLe dimanche 22 Septembre 2013
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Une lecture de |
Traduction de Jean-Christophe Salaün De son vrai nom elle s'appelle Herbjörg Maria Björnsson, mais toute petite elle avait été surnommée Hera puis c'est devenu Herra, Monsieur en islandais, car la bonne originaire du Jutland avait des difficultés de prononciation. Nous nous en tiendrons donc à ce surnom, plus facile à écrire, et à retenir. Herra, octogénaire, vit dans un garage ne quittant son lit d'hôpital, péniblement, que pour procéder à des besoins dictés par ses sphincters et sa vessie. Le reste du temps elle le passe en tapotant sur son ordinateur, envoyant et recevant des messages émanant de divers correspondants éparpillés dans différents pays éloignés. Elle utilise des alias accompagnés de photos dénichées par ci par là. Sinon, elle couve une vieille grenade, pas le fruit mais bien l'objet de guerre récupéré des décennies auparavant. Deux filles de l'hospitalisation à domicile de Reykjavík s'occupe d'elle deux fois par jour. La jeune vierge le matin et la vieille peau l'après-midi. A quatre-vingts ans on fait fi des convenances et de la courtoisie. Entre deux messages postés sur sa page Facebook, à quatre-vingts ans on a le droit d'avoir des correspondants issus de tous les milieux et de s'intéresser à l'informatique, et elle replonge dans ses souvenirs, nombreux et hauts en couleurs. Herra est la petite-fille du premier président d'Islande, mais la fille d'une paysanne et d'un père nazi avéré, le seul islandais recensé en tant que tel comme quoi il ne faut pas se fier aux ancêtres pour prolonger une lignée rectiligne. Les détails de son enfance reviennent comme des images, avec sa mère rencontrant son père dans un bal. Elle a assité à cette rencontre par procuration. Les années défilent dans un joyeux chaos, les paysages et les personnages aussi. Herra voyage beaucoup, selon les circonstances, passe une partie de son adolescence au Danemark, et d'ailleurs ce sont les années de la Seconde Guerre mondiale qui sont les plus récurrentes, mais aussi en Allemagne un peu plus tard et dans d'autres circonstances et un peu partout dans le monde. Il ne faut pas croire que cette petite Islandaise possédait en elle la froidure de son pays et elle a connu beaucoup d'hommes. Même encore en cette année 2009 où nous la découvrons alitée dans son garage. Elle correspond avec Bakari Matawu qui vit à Harare, la capitale du Zimbabwe. Il ne sait pas que celle qui se fait passer pour Linda Pétursdóttir, miss Monde 1988, n'est autre que notre octogénaire. En 1960, Herra se trouve à Hambourg. Elle participe à une soirée au cours de laquelle se produit un jeune groupe de musiciens anglais inconnus en provenance de Liverpool. Elle danse avec l'un d'eux, échange un langoureux baiser puis quelques paroles sur le balcon, et c'est fini. John Lennon sort de sa vie. Un épisode qui lui à fait penser juste après à son fils Haraldur qu'elle a confié à sa mère, alors qu'il n'a qu'un an, et à sa fille perdue dans un accident sept ans auparavant. Les rencontres ravivent des souvenirs douloureux alors qu'elles pourraient être sources de joie. Tout s'emberlificote et nous revenons de temps à autre en cette année 2009. Par exemple pour assister à cette scène qui donne son sens au titre de cet ouvrage. Empoignant le téléphone que son aide à domicile, la vierge, lui à prêté Herra contacte le crématorium de l'église de Fossvogur afin de recueillir des informations sur la façon de procéder pour se faire incinérer. La réceptionniste au bout du fil lui annonce que d'abord il faut une autorisation de crémation, et elle est complètement déboussolée lorsque Herra lui annonce que c'est pour elle, qu'elle n'a plus que quelques semaines à vivre et qu'elle voudrait effectuer une réservation. S'ensuit un dialogue hilarant (de la Baltique évidemment !) teinté de tragicomédie. Pour la première et la dernière fois, je vous propose un extrait de la quatrième de couverture qui résume mieux que je pourrais le faire cet ouvrage : Dans ce roman inclassable et truculent qui, à la manière qu'un collage, alterne humour, cynisme, tendresse, absurde, poésie et noirceur, Hallgrimur Helgason fait preuve d'une inventivité linguistique époustouflante. La femme à 1000° navigue entre légèreté et profondeur au gré du récit de l'irrévérencieuse Herra, dont l'histoire est à l'image de celle de l'Islande, sa patrie, et de celle de l'Europe : mouvementée, sanglante et tragique.
Roman hybride et stroboscopique, La femme à 1000° propulse des confettis mémoire jetés en pâture sous les yeux du lecteur dans une myriade de couleurs et de formes, jouant dans la lumière d'hier et d'aujourd'hui. |
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