le demi-sel de André HELENA


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ANDRE HELENA

Le Demi-sel


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Le mercredi 8 Septembre 2010

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André HELENA




Une lecture de
PAUL MAUGENDRE

PAUL MAUGENDRE  
Heureuse initiative que celle des éditions Plon de rééditer l’un des romans composant la série « Les Compagnons du destin » d’André Héléna. André Helena, un auteur peu ou mal connu, redécouvert cycliquement par des maisons d’édition qui ne mènent pas jusqu’au bout leur entreprise : 10/18, Fanval, et autres. Mais rééditer son œuvre, même partiellement, n’est que justice. Des romans qui malgré un petit air désuet n’ont pas pris une ride. Paradoxal ? Non. Ceux qui n’ont pas connu ces endroits chauds que sont Pigalle, Barbès, La Goutte d’Or, n’ont pas connu Paris à la fin de la guerre, n’ont pas connu ces bouges avec les comptoirs en zinc, et la sciure sur le sol, ne peuvent pas se rendre compte de la force d’évocation des écrits d’Héléna. Si les mauvais garçons et les filles écument encore les trottoirs entre l’avenue de Clichy et Barbès, les lumières, les musiques, les devantures accrocheuses ne sont plus les mêmes et c’est le Paris d’aujourd’hui qui semble superficiel. Les romans d’Héléna n’ont pas pris une ride car son écriture possède toujours cette force d’évocation, ce mélange acidulé de langue française et d’argot que l’on retrouve chez les grands anciens comme Francis Carco. De même les histoires sont de tout temps. Cette mouise dans laquelle se débattent les acteurs des drames de la ville, cette déchéance dans laquelle ils sont aspirés comme dans des sables mouvants, cette misère qui s’accroche à leurs basques et avec laquelle ils s’habituent à vivre, tout cela existe encore. Les demi-sels qui veulent se prendre pour des caïds ou qui sont jugés à tort comme tels, des victimes de la société, des autres, d’eux-mêmes ou du hasard qui complique toujours la vie. Ce roman d’Héléna retrouve une nouvelle jeunesse, et ce n’est que justice. Mais une fois de plus l’auteur, comme bien d’autres, ne jouira pas de ce regain d’intérêt porté à son œuvre car il est décédé en 1972. Restent ses compagnons de route, ses admirateurs, ses condisciples qui rendent hommage ici ou là à un romancier trop tôt disparu, dans l’indifférence générale et qui n’eut jamais de chance auprès des éditeurs ou alors trop tard. Sans oublier qu’il fut spolié, réédité sous des noms d’emprunts pseudo-américains, ou obligé d’écrire à la va-vite chez des éditeurs plus ou moins véreux afin de gagner la pitance quotidienne. Et ceux qui aiment chiner dans les vide-greniers tenteront de retrouver ses romans parus dans la collection La Chouette sous le pseudonyme de Noël Vexin qui pour certains critiques sont des ouvrages mineurs, mais pour les nostalgiques des romans populaires des ouvrages dignes de figurer sur les étagères des bibliothèques populaires.
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Une autre lecture du

Le Demi-sel

de
CLAUDE LE NOCHER

CLAUDE LE NOCHER

Paris, dans les années 1950. Balthazar est un marginal plutôt jeune, un voyou, buveur et peu courageux. Il est six heures du soir. Depuis neuf heures ce matin, son immeuble est surveillé. Pas par la police : “[un flic] n’aurait pas hésité. Il aurait grimpé l’escalier, frappé à la porte et, une main sur son revolver, il aurait exhibé sa carte.” Non, c’est un nommé Bob, complice du truand Scipioni, qui attend que Balthazar sorte. Ses adversaires ont donc retrouvé sa trace. Il n’a pas d’autre choix que d’éliminer Bob : “Le jeune homme leva son automatique, visa soigneusement. Au moment où l’autobus passait sous ses fenêtres, il tira. Il vit l’homme chanceler, porter les mains à sa poitrine, faire deux pas avant de s’écrouler dans le ruisseau.” Balthazar s’enfuit vers le centre de Paris.

Depuis qu’il a tué à juste titre Moreno, c’est déjà un homme traqué. Pourtant, Balthazar n’a pas une âme de criminel, juste de mauvaises fréquentations. La bande de Scipioni est à ses trousses. La police aussi ne tardera sans doute pas à le suspecter, à le pourchasser, estime Balthazar. Le hasard fait que deux autres membres du gang Scipioni sont abattus cette nuit-là. Flics et truands en arrivent à la même conclusion, il n’y aurait qu’un seul tueur. Scipioni s’inquiète : “Tout ce qu’il avait fait depuis deux ans avait été rasé en huit jours, même pas. Il avait eau six hommes sous la main, il lui en restait deux. Les quatre autres avaient été abattus par Balthazar (…) Un demi-sel, rien d’autre. Un petit paumé qui n’essayait même pas de jouer les gros bras. Et il les avait tous mis dans sa poche, cassé la baraque et démoli le gang.”

Le commissaire Barral n’a pas tardé à faire le rapprochement entre Scipioni et cette série de meurtres. Pour le moment, l’Italien réussit encore à se dédouaner. Mais, tant que Balthazar est introuvable, il risque de gros ennuis. Balthazar poursuit sa cavale dans le Paris nocturne. Trouver de l’aide auprès de sa petite amie Gisèle ? Non seulement elle ne mesure pas la situation, mais elle pourrait encore aggraver les choses. D’ailleurs Gisèle ne rime pas avec fidèle. Il y a aussi Simone, cette jeune fille trop tendre que Balthazar protège dans ce bistrot mal famé. Quel miracle un homme aux abois tel que lui peut-il espérer ? Du côté de la bande de Scipioni, René et Nestor s’interrogent sur la suite. Risquer sa peau pour rattraper Balthazar, supposé extrêmement dangereux ? Ou plutôt se confier aux flics, négocier avec le commissaire Barral ? Le destin est en marche…

Le talent de romancier d’André Héléna (1919-1972) fut sous-estimé de son vivant. À l’époque, on le considère comme un besogneux, productif mais peu fiable. Jusqu’en 1955, il est exploité par des éditeurs douteux. Il écrit de nombreux romans, signés de son nom ou sous pseudonymes. Il s’agit d’histoires sombres, ayant pour héros des malfrats médiocres aux destinées fatales. La pègre y est présentée sans concession. Les intrigues sont simples et solides. La narration entraînante évite les fioritures, dans un langage direct. “Le demi-sel” est un des neufs romans de son cycle Les compagnons du destin (1952-53). Un des plus noirs de l’auteur, servi par une narration nerveuse. Son malheureux héros est placé sur une pente fatale jalonnée de cadavres. Il y a peu de chances que s’inverse le cours des évènements, même si l’auteur introduit un mince espoir. Un récit sombre à souhaits et une narration fluide, pour un roman qui méritait d’être réédité dans la collection Noir Rétro.

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