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PIERRE HANOT |
Les Clous Du FakirAux éditions FAYARDVisitez leur site |
2577Lectures depuisLe mercredi 8 Avril 2009
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Une lecture de |
Il est animé par la haine. Le responsable du drame se nomme Arnaud. C’est ce salaud qui lui a pris sa fille Julia. Pour supprimer Arnaud, il ne possède qu’un simple couteau, acheté par hasard sans préméditation, une arme de prolo. Mais avant, comme dans un ultime message à Julia, il doit faire le bilan. Enfant élevé dans la conformité des années 1950-60, ayant même raté mai-68 (pour cause d’accident) et 69 (année pas si érotique pour lui), le père de Julia a choisi la vie d’artiste. Il devient le chanteur du groupe Total Alzheimer. Avec sa voix de blues singer, il tente le concept “mambo-Kalsoum”. Durant les années 70, les galas s’enchaînent. Pas de médiatisation, petit succès auprès d’un certain public. Le groupe affirme son style, sans séduire les pros du disques. Pour trouver un peu plus de fric, la solution c’est de dealer. Fournisseur honnête, voyages à risques pour véhiculer la dope, éviter de devenir soi-même consommateur accro, clients pas difficiles à trouver dans le milieu artistique, le bizness est classique. “Chez Astrid”, c’est un bistrot d’habitués, celui de Robin. Ce dernier est sans doute la seule personne avec qui il a partagé un vrai feeling. C’est dans le bar de Robin, qu’il a rencontré Isabelle, qui deviendra la mère de Julia. Même pour lui qui est trop souvent absent, qui manque d’esprit paternel jusqu‘à paraître psychorigide, sa fille est un trésor. Pour financer leurs vacances en camping, expérience unique, il recommence à dealer une fois. Mais les prédateurs du trafic ont la mémoire longue quand ils sont lésés. Arrivent les années 90, sans que Total Alzheimer ait jamais connu de succès probant. Mais un producteur de CBS remarque sa chanson, “Les clous du fakir”. Cas ordinaire, il engage le chanteur, qui doit rompre avec le groupe. Cette fois, c’est la gloire. Avec pour corollaire, le risque de dépendance à la coke pour Isabelle et lui, s’il ne réagit pas à temps. Pendant ce temps, Julia est devenue ado. Élève plutôt faible, peut-être par manque d’harmonie familiale, elle impose bientôt un petit ami nommé Damien. Rien d’anormal, juste un comportement déroutant pour ses parents. Mais c’est ainsi que Julia rencontre Arnaud, gourou fumeux qui va causer le drame et être condamné. Pour les obsèques de sa mère, Arnaud sort provisoirement de prison… Sans être exactement de l’autofiction, il est probable que Pierre Hanot ait puisé dans sa propre expérience de musicien quelques scènes qu’il adapte à son personnage. Des fins de nuits solitaires dans une ville où il n’a pas de repère, ou un chanteur célèbre qui fraternise avec l’artiste modeste avant de le jeter brutalement, ça respire le vécu. Mais on peut également voir ici une réflexion sur la culpabilité. La vie du narrateur n’a pas été d’une clarté absolue. Derrière la haine qu’il voue à Arnaud, à la manière d’un Charles Bronson vengeur, qui est le plus responsable des faits : celui qui intervient au dernier acte ou celui qui a choisi un chemin trop hasardeux pour sa famille ? Celui qui est en prison ou celui qui finance un maton véreux pour peaufiner sa vengeance ? La vérité possède toujours plusieurs facettes. Dans la vie comme dans un roman noir, si l’on est victime, c’est d’abord de son destin. Pierre Hanot confirme avec talent sa singularité. |
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